Fil d'Ariane
Ils font partie de celles et de ceux qu'on n'a peu vu ou entendu depuis le début de la campagne présidentielle, en France. Les jeunes membres des diasporas, présentes dans le pays, portent pourtant un regard acéré sur les sujets abordés dans le débat public et sur ceux qu'ils aimeraient voir davantage évoqués et discutés. Voilà pourquoi TV5MONDE a choisi de donner la parole à 8 d'entre eux. Ils détaillent les sujets qu'ils estiment prioritaires pour les 5 prochaines années. Épisode n°6 de notre série "Voix de diasporas" avec Bruce.
Montmartre baigne dans le soleil et l’odeur des croissants chauds quand nous retrouvons Bruce, tiré à quatre épingles, un dimanche matin. Le Chinois de 32 ans est installé à Paris depuis un an, après avoir vécu une année dans la ville d’Anger. Il vit avec son épouse, une Française.
Bruce est natif de la ville de Xinyang. « Personne ne connait Xinyang. Par contre, si je vous parle de Wuhan, tout le monde connait maintenant. Xinyang est à 200 kilomètres de Wuhan », dit-il en riant, une pointe d'amertume dans la voix. Ce serait dans le fameux marché de Wuhan, qu’en décembre 2019, le virus du Covid-19 aurait été transmis à l’homme, déclenchant une épidémie mondiale toujours en cours.
Une femme m’a vu, a porté la main à sa bouche et est partie.Bruce, expatrié chinois en France
C’est ainsi que dès son arrivée en France, l’ancien étudiant en logistique et marketing s’est retrouvé confronté à des gestes racistes. « Je marchais dans la rame du métro, quand une femme m’a vu, a porté la main à sa bouche et est partie. Quelques jours, plus tard, dans un train, un homme m’empêche de m’assoir à côté de lui. Je repars en tête du wagon, en colère et triste. Puis je décide de retourner m’assoir. Pourquoi n’aurais-je pas ce droit-là ? Pourquoi eux et pas moi ? », raconte Bruce, le souffle court.
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Bruce ne dispose pas du droit de vote. Cela ne l’empêche pas de porter des espoirs sur le prochain président français, à deux semaines de l’élection.« J’aimerai qu’il y ait une vraie égalité dans la société(…). Je ne veux pas que mes futurs enfants vivent la même chose que moi. C’est injuste, non ? », clame-t-il.
Il y a plusieurs quartiers de Paris dans lesquels je ne me sens pas en sécurité.Bruce, expatrié chinois en France
Bruce est aussi très sensible à la sécurité. Il l’estime moins bonne en France qu’en Chine. « Si un candidat proposait d’installer des caméras dans le quartier, je pourrais voter pour lui » dit-il en souriant.
De ses expériences en France, Bruce ne garde pas que des bons souvenirs. Le vendeur dans une boutique de linge de maison pour enfant, s’est plusieurs fois fait menacer physiquement. « Une fois, j’ai demandé à un homme de ne pas garer sa voiture devant notre entrepôt. Il m’a insulté, est sorti de sa voiture et s’est précipité vers moi, le poing dirigé vers mon visage. J’ai dû crier à l’aide pour que des collègues viennent m’aider. Il y a plusieurs quartiers de Paris dans lesquels je ne me sens pas en sécurité », avoue-t-il.
"J'aimerais qu'il y ait une vraie égalité dans la société"
— TV5MONDE Info (@TV5MONDEINFO) April 6, 2022
Bruce est un Chinois de 32 ans. Il habite en France depuis deux ans. À l'approche de la présidentielle, il aimerait plus de sécurité, de respect et d'égalité entre les personnes. pic.twitter.com/NbLPXSHM2o
Je pensais que tous les pays étaient comme la Chine, qu’il n’y avait qu’un parti dominant.Bruce, expatrié chinois en France
Avant d’arriver en France, Bruce n'avait voyagé dans aucun autre pays que la Chine. Il a été très surpris du système politique et de l’existence de plusieurs partis. « Je pensais que tous les pays étaient comme la Chine, qu’il n’y avait qu’un parti dominant », explique-t-il, avant de conclure pudiquement, "c'est vraiment surprenant".