Présidentielle 2022 : quelle politique migratoire proposent les différents candidats ?

Alors que la campagne présidentielle officielle a commencé le 28 mars, TV5MONDE vous propose une série d'articles sur les programmes des douze candidats. Nous avons choisi d'explorer dix grands thèmes, très présents dans l'actualité et dans le débat public. Dix thèmes, dix articles pour vous aider à faire votre choix. 
Souvent objet de propos polémiques voire outranciers, l'immigration s'est imposée au fil des années comme un sujet majeur dans le débat politique. Comment les candidats traitent-ils le thème de la migration dans cette campagne  ? Épisode 3 de notre série sur les programmes.

Image
Musée immigration
Le Musée de l'Histoire de l'Immigration situé à la Porte dorée à Paris, 11 mars 2021.
(Francois Mori)
Partager10 minutes de lecture

Droit d'asile, obtention de titres de séjour, accès au logement et à l'emploi, la question de l'immigration recouvre bien des sujets. Les partis situés à droite du spectre politique plaident pour une politique migratoire plus souverainiste et fermée, tandis que les partis de gauche préfèrent une vision plus "humaniste".

Valérie Pécresse souhaite "mettre fin à l’immigration incontrôlée"

Sur son site de campagne, la candidate Les Républicains Valérie Pécresse se félicite d'avoir été "l’une des premières à mettre en évidence le lien qui existait entre immigration et délinquance." Si elle est élue, elle annonce qu'elle tournera "la page de 10 ans de laxisme migratoire" causé par ses prédecesseurs. 

Pour cela, elle promet en partie de : 

  • Faire voter chaque année par le Parlement des quotas maximum de titres de séjour par pays et par métier.
  • Obliger à ce que les demandes d’asile soient déposées à l’étranger ou à la frontière. 
  • Reprendre l’expulsion des clandestins par charter avec Frontex (l'agence européenne de garde-frontières et de gardes-côtes).
  • Mettre un terme à l’automaticité du droit du sol. ("Tous les enfants nés en France de parents étrangers devront faire un vrai choix à 18 ans et satisfaire à des conditions d’assimilation" )
  • Interdire le port du voile dans les compétitions sportives et pour les accompagnatrices scolaires.

Une "autre" politique migratoire pour Yannick Jadot 

Le volet migratoire est loin d'être central dans le programme du candidat des Verts. Pour autant, Yannick Jadot promet d'élaborer "une autre politique migratoire" notamment en sortant de "l’optique sécuritaire".

Il propose ainsi de : 

  • Respecter les droits fondamentaux des migrants en garantissant l’accès à la santé et à des hébergements dignes.
  • Mettre fin au harcèlement policier et judiciaire des migrants.
  • Interdire la détention des mineurs et faire de la rétention administrative un dispositif de dernier recours.
  • Régulariser les personnes installées en France justifiant d’un travail, d’une vie familiale ou d’enfants scolarisés.
  • Offrir le droit au travail dès la demande d’asile.

"Mieux maîtriser l'immigration" promet Emmanuel Macron

Durant son quinquennat, Emmanuel Macron a fait voter la loi « asile et immigration » qui est venue rallonger la période de rétention des personnes en situation irrégulière (la faisant passer de 45 à 90 jours) et autoriser le placement d’enfants en centre de rétention.

Pour sa potentielle réelection, le président souhaite continuer à "mieux maîtriser l'immigration" en : 

  • Créant une «  force des frontières  » pour renforcer les frontières nationales.
  • Accordant des titres de long séjour seulement pour ceux qui réussissent un examen de français et s’insèrent professionnellement.
  • Poursuivant la refonte de l’organisation de l’asile et du droit au séjour pour décider plus rapidement qui est éligible et "expulser plus efficacement ceux qui ne le sont pas".
  • Expulsant les étrangers qui troublent l’ordre public.

Jean-Luc Mélenchon prône une "politique migratoire humaniste et réaliste"

Le chef de file des Insoumis débute son chapitre sur l'immigration par un constat : "l’émigration forcée est toujours une double souffrance : ne pas être chez soi où l'on vit, et ne plus être chez soi d'où l'on vient." Dans cette perspective, le parti de gauche radicale s'impose comme "première tâche" de permettre "à chacun de vivre chez soi, auprès de ses proches et de ses amis". 

Jean-Luc Mélenchon promet alors de :

  • Renforcer l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR).
  • S’opposer aux accords commerciaux inégaux afin d’éviter aux migrants de devoir fuir leur pays.
  • Agir contre les conséquences des bouleversements climatiques par des transferts de technologies et de l’aide financière et matérielle.
  • Garantir pleinement le droit d’asile notamment en prenant le temps d’étudier chaque dossier.
  • Faciliter l’accès aux visas, régulariser les travailleurs, étudiants, parents d’enfants scolarisés et instituer la carte de séjour de dix ans comme titre de séjour de référence.

L'immigration, fer de lance du Rassemblement national de Marine Le Pen

Dès sa création, le sujet de l'immigration a été la raison d'être du parti du Rassemblement national, anciennement Front national. Marine Le Pen, candidate pour la troisième fois à la présidentielle, en fait toujours le dossier prioritaire de son programme.

Dans le descriptif de sa première promesse, "Arrêter l’immigration incontrôlée en donnant la parole aux Français par référendum", elle développe : 

  • Mettre fin à "l’immigration de peuplement" et au regroupement familial.
  • Traiter les demandes de droit d’asile uniquement à l’étranger.
  • Réserver les aides sociales aux Français et conditionner à cinq années de travail en France l’accès aux prestations de solidarité.
  • Assurer la priorité nationale d’accès au logement social et à l’emploi.
  • Expulser systématiquement les clandestins, délinquants et criminels étrangers.
  • Supprimer le droit du sol

Une politique migratoire "d'humanité" pour Fabien Roussel

Seule une des 180 mesures détaillées du programme du candidat communiste Fabien Roussel traite du sujet de l'immigration. Ce dernier détaille une "politique d’humanité [...] pour accueillir les populations migrantes" sur quelques lignes, dans laquelle il propose :

  • L'interdiction des tests osseux pour les mineur·e·s non accompagné·e·s qui seront protégé·e·s dans le respect de la Convention internationale des droits de l’enfant. 
  • La régularisation des travailleuses et travailleurs sans papiers en activité "car l’égalité de statut est une arme contre le travail clandestin et la mise en concurrence des salarié·e·s, tels que le pratiquent des employeurs".
  • La garantie du droit d’asile aux réfugié·e·s.

La théorie du "grand remplacement", socle du programme d'Eric Zemmour

Le candidat d'extrême-droite Eric Zemmour motive son projet politique -et plus significativement sa politique migratoire- selon la théorie du "grand remplacement". Cette idée conspirationniste promue par l'écrivain d'extrême-droite Renaud Camus affirme que les populations européennes seront bientôt substituées par les immigrés non-européens. Dans cette continuité, l'ancien éditorialiste aujourd'hui candidat à la présidentielle Eric Zemmour promet un ministère de la "remigration", concept sulfureux emprunté aux identitaires.

Dans son programme, il promet de : 

  • Supprimer le droit au regroupement familial et tous les droits automatique liés à l'immigration familiale
  • Limiter le droit d'asile à une centaine d'individus chaque année
  • Exiger que les demandes d'asile soient déposées en dehors du territoire national
  • Sélectionner au mérite les étudiants étrangers
  • Créer une force garde-frontières à statut militaire pour "épauler la police aux frontières du pays"
  • Instaurer une caution obligatoire de 10 000 euros pour l'obtention d'un visa "pour les étrangers provenant de pays dont sont majoritairement issus les immigrés clandestins."

La liberté de circulation promue par Philippe Poutou

Pour le candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste, "chaque personne a le droit fondamental de jouir de tous les droits politiques et sociaux du pays où il ou elle réside." Il souhaite pour cela "ouvrir les frontières", le seul moyen selon lui de "permettre aux gens de migrer dans des conditions dignes et sûres."

Ainsi, Philippe Poutou prône :

  • La liberté de circulation et d'installation.
  • Un droit d’asile pour celles et ceux qui fuient la guerre et les persécutions.
  • Un accueil "digne pour tou·te·s les migrant·e·s, sans distinction entre les migrant·e·s dits « économiques » et les réfugié·e·s"

Anne Hidalgo prévoit de "redéfinir une politique d’asile"

La candidate socialiste prévoit de s'appuyer sur les compétences décisionnelles de l'Union européenne pour "se doter d’une politique migratoire plus humaine, solidaire et efficace". Elle souhaite alors"aboutir la réforme complète du système de Dublin" qui sera basé "sur la solidarité entre États membres, en fonction de leurs capacités, notamment d’accueil, plutôt que sur la règle arbitraire qui veut que le premier pays d’entrée dans l’Union soit le pays responsable du traitement des demandes d’asile".

Au niveau national, Anne Hidalgo promet une "politique réfléchie et apaisée plutôt que les excès et les fantasmes dont elle fait trop souvent l’objet" qui se traduirait par : 

  • La garantie d'un accueil digne en toutes circonstances des demandeurs d’asile et une répartition équilibrée sur tout le territoire.
  • La lutte contre les voies irrégulières et meurtrières d’immigration clandestine.
  • Une politique d’intégration qui s’appuiera sur l’accès au travail dès la demande d’asile, sur l’organisation de cours de français gratuits pour les nouveaux arrivants comme pour les immigrés déjà installés.

Les migrants, avant tout des travailleurs pour Nathalie Arthaud

"À l’opposé de l’orientation réactionnaire, antimigrants, pour ne pas dire raciste, qu’a pris le début de la campagne présidentielle, je suis fière de dire « bienvenue » aux femmes et aux hommes forcés d’émigrer." C'est ainsi que la candidate Lutte Ouvrière, introduit son propos sur la liberté de circulation, idée socle -voire unique- de son projet sur l'immigration.

Pour Nathalie Arthaud, ceux qui traversent les frontières font avant tout "partie intégrante de mon camp, le camp des travailleurs." Sans avancer de promesse électorale, l'enseignante en lycée revendique la liberté de circulation et d'installation afin de "se préparer à accueillir ces femmes et ces hommes chassés de chez eux comme des frères et des sœurs, parce que la plupart travailleront demain sur les lignes de découpe dans les abattoirs ou sur les chantiers."

La question migratoire peu évoquée par Jean Lassalle

Le candidat sans étiquette originaire des Pyrénées-Atlantiques ne présente que deux propositions se rapportant à la question migratoire. Il propose alors de 

  • Renforcer les effectifs des douanes et les forces aux frontières "où se concentre l’immigration illégale".
  • Respecter le droit d’asile, droit qu'il estime fondamental.

Nicolas Dupont-Aignan revendique de "rétablir l'ordre"

Résolument souverainiste et eurosceptique, le candidat de Debout la République, qui a appelé à voter pour la candidate d'extrême-droite Marine Le Pen au second tour en 2017, présente 16 décisions "pour rétablir l’ordre, maîtriser l’immigration et garantir la cohésion nationale". Il promet pour cela de :

  • Rétablir le contrôle aux frontières par la fin des accords de Schengen.
  • Expulser les délinquants étrangers à l’issue de leur peine.
  • Supprimer le droit du sol et conditionner l'obtention de la nationalité par un processus de naturalisation exigeant.
  • Imposer un délai de carence de 5 ans pour les étrangers pour recevoir des aides sociales.