Présidentielle 2022 : quelles promesses pour l’écologie ?

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Débat Politique France
Le débat "La France face à la guerre"à Paris, le 14 mars 2022.
AP/ Ludovic Marin
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Alors que la campagne présidentielle officielle a commencé le 28 mars, TV5MONDE vous propose une série d'articles sur les programmes des douze candidats. Nous avons choisi d'explorer dix grands thèmes, très présents dans l'actualité et dans le débat public. Dix thèmes, dix articles pour vous aider à faire votre choix.
Que promettent les candidats en lice en matière de protection de l'environnement, de défi climatique et de transition énergétique ? Épisode 4 de notre série sur les programmes.

Avec l'enchaînement des catastrophes climatiques à travers le monde, la publication de compte-rendus alarmants sur l'avenir de la planète et le réchauffement climatique, l'écologie s'est hissée parmi le top 3 des inquiétudes des Français. 

Coeur du programme pour certains, ou thème accessoire pour d'autres, comment les candidats de cette campagne considèrent l'urgence climatique ?

L’écologie au service de l’économie

Valérie Pécresse affirme vouloir « être une Présidente écologiste », mais elle préfère préciser, celle d' « une écologie des solutions et non une écologie punitive ou antisociale ». Car la représentante de la droite à l'élection souhaite avant tout aborder le réchauffement climatique sous le prisme d’« une opportunité pour nos emplois. »

Valérie Pécresse
La candidate Les Républicains lors de l'émission "la France face à la guerre" à Paris le 14 mars 2022. 
AP/Ludovic Marin

La candidate des Républicains pointe comme objectif principal l’atteinte de la neutralité carbone d'ici 2050. Pour cela, elle promet entre autres de  :

  • Développer les énergies renouvelables dans tous les domaines comme les biocarburants, le biogaz et la biomasse mais les projets éoliens ne pourront voir le jour qu’avec l’accord des populations. 
  • Stopper la vente de véhicules thermiques neufs en 2035 et des hybrides rechargeables neufs en 2040 tout en développant un marché de l’occasion pour les véhicules électriques.
  • Stopper les passoires énergétiques en doublant le nombre de logements rénovés, en lançant un grand plan de rénovation du parc social.
  • Mettre en place une taxe carbone aux frontières pour protéger les emplois, l'industrie et l'agriculture.

Sur les questions énergétiques, Valérie Pécresse mise fortement sur l’atome et projette même "un plan de relance gaullien de l’énergie nucléaire". Elle promet d'arrêter immédiatement le plan de fermeture des 12 réacteurs , de supprimer le plafond de 50% de nucléaire dans le mix électrique en 2035 (comme le projette la loi sur la transition énergétique de 2015) et de construire 6 EPR dont 4 à démarrer d’ici 2035. Par ailleurs, la candidate souhaite investir dans les biocarburants et le biogaz.

Fer de lance pour les Verts

L’environnement est naturellement au coeur du projet politique du parti d’Europe Écologie Les Verts. Toutes les thématiques de son programme sont reliées aux perspectives de transition écologique ou de défi climatique. 

Le candidat des Verts lors du débat "la France à la guerre" à Paris, le 14 mars 2022.
Le candidat des Verts lors du débat "la France à la guerre" à Paris, le 14 mars 2022.
AP/Ludovic Marin

Contrairement à la candidate de droite Valérie Pécresse, Yannick Jadot pense que le défi écologique n’est pas dissociable d’une justice sociale : « les 10 % les plus riches émettent 5 fois plus de CO2 que les 50 % les plus modestes » rappelle-t-il sur son site de campagne. Il souhaite pour cela : 

  • Mettre en place un impôt sur la fortune climatique (qui taxera les patrimoines supérieurs à 2 M€ et comportera un bonus-malus selon l’impact des actifs financiers et immobiliers sur le climat)

Par ailleurs, le candidat des Verts souhaite :

  • Inscrire la protection du climat dans la Constitution.
  • Mettre fin aux pesticides et engrais de synthèse, en divisant par deux l’usage des engrais et des pesticides de synthèse d’ici 2027 et supprimer les pesticides en Europe en 2035.
  • Mettre fin à la chasse le week-end et pendant les vacances scolaires.
  • Arrêter de verser de l'argent public à une entreprise toujours engagée dans les énergies fossiles.
Yannick Jadot mise par ailleurs sur une sortie du nucléaire « sur quinze ou vingt ans », et veut assurer une électricité 100 % renouvelable en déployant 3 000 éoliennes terrestres supplémentaires avant 2027.

Une "planification écologique" pour les Insoumis

Jean-Luc Mélenchon a choisi de faire de l’environnement un élément central de son programme, « L’avenir en commun ». « L’exigence d’une société d’harmonie des êtres humains entre eux et avec la nature doit être inscrite au sommet de la hiérarchie des normes » écrit-il dans ce dernier. Il souhaite donc, lui aussi, inscrire l'urgence environnementale dans la Constitution, par le biais d'une « règle verte » selon laquelle « on ne prélève pas davantage à la nature que ce qu’elle est en état de reconstituer. »

Jean-Luc Melenchon
Le candidat insoumis Jean-Luc Melenchon, durant un meeting à Paris le 20 mars 2022.
AP/Thomas Padilla

Par ailleurs le candidat Insoumis souhaite : 

  • Relever les ambitions climatiques de la France avec pour objectif une baisse de 65% des émissions en 2030 (au lieu de 40 % actuellement) et rendre public un bilan annuel.
  • Créer un Conseil à la planification écologique.
  • Obliger les entreprises à mettre en œuvre une comptabilité carbone pour les émissions directes et indirectes certifiée par un organisme public agréé en commençant par les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre (GES).
  • Donner les moyens humains et financiers à l’État et ses opérateurs publics (comme le Cerema, l’Office national des forêts, l’Office français de la biodiversité ou Météo France) pour mener à bien leur rôle de planification.

La question environnementale éludée par le président sortant 

Après avoir déclaré sa candidature plus tard, Emmanuel Macron dévoile un programme peu détaillé, avec une partie sur l'environnement plus mince que la majorité de ses adversaires. En introduction, le président sortant se félicite cependant de "l'arrêt des grands projets obsolètes comme l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ou le centre commercial géant EuropaCity", de "la fin des centrales au charbon et des permis d’exploration des hydrocarbures" ou encore de "l'accélération des énergies renouvelables."

Le président Emmanuel Macron à Toulouse, le 20 mars 2022.
Le président Emmanuel Macron à Toulouse, le 20 mars 2022.
AP/ Ludovic Marin

Le président sortant propose pour sa potentielle réélection : 

  • La mise en œuvre d'une taxe carbone aux frontières de l’Europe pour éviter la concurrence déloyale.
  • Faire dépendre obligatoirement la rémunération des dirigeants des grandes entreprises du respect des objectifs environnementaux et sociaux de l’entreprise.
  • Réduire massivement les exportations de déchets, en développant les filières industrielles françaises de recyclage.
  • Planter 140 millions d’arbres d’ici la fin de la décennie, soit 2 arbres par Français et investir dans la filière française du bois.
  • Une offre abordable de voitures électriques pour tous grâce à une filière 100% française.
Défenseur du nucléaire, Emmanuel Macron prévoit par ailleurs de poursuivre la construction de six centrales nucléaires nouvelle génération. Côté énergies renouvelables, le président sortant annonce "la multiplication par 10 de notre puissance solaire et l’implantation de 50 parcs éoliens en mer d’ici 2050".

Pas de promesses écologiques pour Marine le Pen

Parmi les "22 mesures pour 2022" de Marine Le Pen, aucune ne se rattache à la thématique de l'écologie. Dans l'onglet "Agriculture" de son programme, on peut y découvrir des mesures telles que "lutter contre l’artificialisation des terres agricoles" ou "soutenir l’agriculture biologique", rattachées cependant à des perpectives de développement économique du secteur.

Marine le Pen
La candidate d'extrême-droite Marine Le Pen durant le débat "la France face à la guerre" à Paris le 14 mars 2022. 
AP/Ludovic Marin

Cependant, la candidate d'extrême-droite consacre un thème entier, à l'instar de la défense ou de l'école, à la protection des animaux. Elle souhaite entre autres "accorder une reconnaissance constitutionnelle au statut juridique des animaux" ou encore "doter l’État des outils nécessaires à la protection animale".

Concernant l'énergie, Marine Le Pen rejette l'idée de toute transition énergétique. Elle parle alors de "fléau des éoliennes et des parcs solaires" et souhaite "relancer la filière nucléaire, hydroélectrique et investir dans la filière hydrogène."

L'écologie au service du public pour les communistes

Objectif numéro 4 du programme communiste, le défi écologique engendré "par les logiques de rentabilité financière et de profit " n’est plus contournable. "C’est tout notre mode de développement qui est en cause", précise Fabien Roussel.

Fabien Roussel
Le candidat communiste Fabien Roussel pendant le débat "La France face à la guerre" à Paris le 14 mars 2022.
AP/ Ludovic Marin

Pour cela, le candidat propose que : 

  • La France se dote d’une grande politique conforme aux recommandations du Giec, dotée de 140 milliards d’euros par an.
  • Les transports collectifs urbains seront élevés au rang de priorité de l’action publique.
  • Les transports collectifs deviendront des biens communs.
  • Une loi de programmation sera soumise au Parlement, en faveur de la rénovation des logements et des bâtiments.
  • Une orientation active de protection et de promotion de la biodiversité sera définie et mise en œuvre, grâce à un vaste processus de concertation.
  • Une politique de lutte contre la déforestation importée par la production de biens agricoles sera mise en place.

Sur la thématique de l'énergie, Fabien Roussel fonde sa politique sur la constitution d’un mix énergétique "100 % public et 100 % décarboné" en investissant dans les énergies renouvelables (solaire, éolien, hydraulique) mais aussi dans l’électricité nucléaire avec la construction de six EPR supplémentaires au minimum.

Un sujet évité pour Eric Zemmour

L'environnement n'est pas le dossier de prédilection du candidat d'extrême-droite qui se démarque avec ses propos polémiques sur l'immigration et la sécurité. De fait, la partie "environnement" ne comporte que huit propositions parmi lesquelles : 

  • Lancer des chantiers de dépollution des sols.
  • Créer un ministère de la Ruralité.
  • Faire émerger une filière industrielle dans le recyclage des plastiques.
  • Aggraver les sanctions contre la pratique des décharges sauvages.
Eric Zemmour
Le candidat d'extrême-droite Eric Zemmour pendant le débat "la France face à la guerre" à Paris le 14 mars 2022.
AP/ Ludovic Marin
Éric Zemmour compte par ailleurs significativement sur l'atome dans sa politique de l'énergie et propose de supprimer le plafond de 50% de nucléaire dans le mix électrique en 2035, d'assurer le renouvellement du parc nucléaire français, de relancer la recherche du nucléaire du futur et "permettre à tous les consommateurs français de bénéficier de la compétitivité du parc nucléaire existant".

L'écologie prise au sérieux au parti socialiste

L'environnement fait l'objet du deuxième volet du programme de la candidate socialiste et ex-maire de Paris. Anne Hidalgo souhaite faire de l'écologie "le combat du siècle", peut-on lire sur son site de campagne. Ainsi, comme Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon, la candidate socialiste souhaite inscrire dans la Constitution "le principe de non-régression dans la protection de l’environnement et l’obligation de lutter contre le réchauffement climatique et la dégradation de la biodiversité."

Anne Hidalgo
La candidate socialiste Anne Hidalgo pendant le débat "la France face à la guerre", à Paris, le 14 mars 2022.
AP/Ludovic Marin

Par ailleurs, elle promet de  :

  • Créer un Défenseur de l’environnement ​sur le même modèle que le Défenseur des droits.
  • Nommer comme numéro deux du gouvernement un ministre du Climat, de la Biodiversité et de l’Économie.
  • Fixer un budget Climat et biodiversité qui fixera les programmations de réduction d’émission de CO2 et de décarbonation de la production d’énergie, et sera voté chaque fin d’année par le Parlement en même temps que les lois de finances et de financement de la Sécurité sociale.
  • Créer un Impôt de Solidarité sur la Fortune Climat et Biodiversité afin de mettre à contribution les plus fortunés pour financer la transition énergétique.
  • Surtaxer les placements liés aux énergies fossiles.

L’objectif énergétique sera de "parvenir à 100 % d’énergies renouvelables, aussi rapidement qu’il sera possible de le faire". Pour cela, Anne Hidalgo ne prévoit pas de nouvelles constructions d'EPR ou de petits réacteurs modulaires. Bien qu'elle conçoit qu'ils soient "utilisé comme énergie de transition."

L'écosocialisme pour le candidat anticapitaliste Philippe Poutou

Pour le candidat du nouveau parti anticapitaliste (NPA), la planète "est malade du  "capitalocène ", cette ère géologique où le mode de production capitaliste bouleverse en profondeur climat et vie sur terre". Pour cela, le parti d'extrême-gauche met en avant des changements dans le secteur de l'agriculture et la protection de la biodiversité : 

  • Interdiction des intrants chimiques.
  • Développement des circuits courts : aides aux filières autogérées et aux coopératives.
  • Vers le tout biologique sur 10 ans.
  • Nationalisation des forêts de plus de 20 hectares.
  • Pas plus de 10 % de territoire artificialisé et 10 % classé en réserves naturelles.
Philippe Poutou

Le candidat anticapitaliste Philippe Poutou lors d'un débat présidentiel à Paris le 4 avril 2017.

AP/ Lionel Bonaventure

Le projet environnemental basé sur l'écosocialisme passe aussi avant tout sur "la socialisation de différents secteurs clés, en particulier l’énergie, combinée à une sobriété énergétique." En cela, le NPA propose la socialisation du secteur de l’énergie, la sortie des énergie fossiles, l'arrêt du nucléaire en 10 ans (fermeture immédiate des réacteurs de plus de 40 ans, abandon des projets d’enfouissement des déchets) et le développement des énergies renouvelables (100 % en 2050).

L'écologie sous le prisme des campagnes pour Jean Lassalle

Fils de berger, et maire à ses 21 ans de son village natal, Lourdios-Ichère (Pyrénées-Atlantiques), Jean Lassalle met un point d'honneur à la valorisation des campagnes françaises. À défaut d'une partie sur l'écologie, le candidat sans étiquette promet dans son programme politique :

  • D'affecter 3 milliards d’euros aux campagnes, grande cause nationale.
  • D'entretenir les paysages, chemins et cours d’eau en biens communs.
  • De mettre en place le « ticket paysan » pour soutenir les circuits courts ou élargir l’usage des « tickets restaurants » aux agriculteurs locaux et régionaux.
Jean Lassalle
Le candidat sans étiquette Jean Lassalle lors d'un débat présidentiel à Paris le 4 avril 2017.
AP/ Lionel Bonaventure
Dans le domaine de l'énergie, Jean Lassalle souhaite rénover et prolonger de 25 ans les centrales nucléaires en fin de vie. Il exige par ailleurs de stopper les projets éoliens non validés par les maires et de développer l'énergie solaire.

Pas d'écologie tant qu'il y a du capitalisme pour Nathalie Arthaud

"Tous ceux qui sont convaincus que l'heure de la mobilisation climatique a sonné doivent remettre en cause l'organisation capitaliste de la société sous peine de demeurer impuissants." C'est ainsi que Nathalie Arthaud, candidate du parti Lutte Ouvrière, angle sa politique environnementale. Pas de propositions concrètes listées pour autant, mais juste un constat, celui d'une crise climatique indissociable de la "mainmise sur l’économie des grands groupes capitalistes."

Nathalie Arthaud
La candidate de Lutte ouvrière Nathalie Arthaud lors d'un débat présidentiel à Paris le 4 avril 2017.
AP/ Lionel Bonaventure

Même logique aussi pour la question énergétique et celle du nucléaire dont "le principal danger ne réside pas dans la technique elle-même mais, comme Fukushima l’a montré, dans l’irresponsabilité des entreprises." Enfin, la candidate de Lutte ouvrière plaide pour "une politique [écologique] concertée et planifiée à l’échelle de la planète".

Nicolas Dupont-Aignan propose une écologie "intelligente" 

Parmi les "18 décisions pour promouvoir une écologie intelligente au service des Français", constitutives du programme du candidat souverainiste, on trouve des propositions telles que la "suppression du permis à point" ou "le déploiement d’Internet haut débit et de la téléphonie mobile sur tout le territoire."

Le candidat Nicolas Dupont-Aignan à Paris le 20 mai 2020.
Le candidat Nicolas Dupont-Aignan à Paris le 20 mai 2020.
Thomas Coex/AP

Le candidat propose également entre autres :

  • L'interdiction des produits qui répondent de l'obsolescence programmée.  
  • Le lancement d’un programme zéro déchets sur 10 ans pour les océans.
  • Le développement des circuits-courts dans l’alimentation et l’approvisionnement des cantines scolaires.
  • L'interdiction massive des perturbateurs endocriniens.

Côté énergie, Nicolas Dupont-Aignan propose la nationalisation complète d’EDF (Électricité de France), la suppression d'implantations d'éoliennes pendant cinq ans, le maintien du nucléaire à 70% de la production d’électricité minimum et la poursuite de la recherche pour un nucléaire 100 % propre.