Présidentielle américaine : premier duel télévisé Clinton / Trump

Il s'agit du premier face à face entre Hillary Clinton et Donald Trump. Les Américains seront peut-être, selon les estimations, 120 millions à regarder ce lundi les passes d’armes entre les deux candidats à la Maison-Blanche. 
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©AP Photo/Mary Altaffer, Chuck Burton
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Les Américains l’ont déjà baptisé le «débat du siècle». Rien à voir avec la qualité des candidats en lice qui serait plus exceptionnelle que lors des présidentielles précédentes. Le superlatif décrit plutôt d’autres phénomènes. La joute cathodique de nonante minutes diffusée lundi soir sur le coup de 21 heures (heure locale) à la Hofstra University, à Long Island près de New York, devrait battre tous les records d’audience.

Le 26 septembre 1960, ils étaient 36% à regarder le premier débat télévisé jamais organisé entre John Fitzgerald Kennedy et Richard Nixon. Cette année, si la même proportion d’Américains entend suivre la confrontation entre la démocrate Hillary Clinton et le républicain Donald Trump, qui chacun convoite la Maison-Blanche, ils devraient être 120 millions devant leur poste de télévision. Soit davantage que les grands-messes du sport que sont le Super Bowl ou les finales de NBA, la ligue nord-américaine de basketball.

Selon un sondage publié dimanche par le «Washington Post/ABC News», 80% des électeurs disent vouloir suivre l’événement de lundi soir et 44% pensent que Hillary Clinton va l’emporter face à son rival républicain (34%). Si l’intérêt pour ce rendez-vous est si grand, c’est parce que jamais une campagne présidentielle n’a autant mis sens dessus dessous le système politique américain. En grande partie à cause de Donald Trump, dont personne ne s’aventure désormais à prédire les chances de devenir le successeur de Barack Obama à la tête de la première puissance mondiale.

L’Amérique modérée retient son souffle, espérant ne pas voir un homme d’affaires sans expérience politique devenir le 45e président des Etats-Unis et hériter de la valise nucléaire. Une attitude paradoxale, car cette même Amérique peine à s’enthousiasmer pour la candidate démocrate. En Europe, où la montée du populisme est aussi une réalité, on observe le déroulement de la campagne électorale américaine avec inquiétude.

Plus faible cote de popularité de l’histoire


Hillary Clinton et Donald Trump ont la plus faible cote de popularité dans l’histoire de l’élection à la présidence des Etats-Unis. 39% des électeurs inscrits ont une opinion favorable de l’ex-secrétaire d’Etat et 57% ont un avis négatif. Donald Trump est tout aussi impopulaire: 38% le voient sous un jour positif, 57% ont une opinion négative de lui.

Selon le sondage «Washington Post/ABC News», les deux candidats sont au coude à coude: 46% d’électeurs probables disent préférer la démocrate au républicain (44%). Hillary Clinton a perdu l’avance qu’elle avait au mois d’août. Une très large majorité de citoyens ne lui font pas confiance. L’épisode de la pneumonie dont elle a souffert au moment des commémorations des attentats du 11 septembre 2001 et le fait qu’elle s’est quasiment effondrée sous les yeux d’un passant qui a filmé la scène, ont sapé sa campagne électorale. Si la question de l’état de santé ne semble pas être un problème durable pour l’ex-patronne de la diplomatie, la manière dont son équipe de campagne a géré la communication de l’incident a été très dommageable. L’épisode a accentué le sentiment que la candidate n’est pas transparente avec l’électorat.

A propos des thèmes qui seront en partie abordés lundi soir, Donald Trump est jugé plus apte (50%) à gérer les questions économiques que sa rivale (43%), mais aussi à mener la lutte contre le terrorisme (47% contre 45%). L’ex-secrétaire d’Etat est considérée comme étant en revanche plus capable (52%) de gérer une crise internationale que le républicain (40%).

Quel visage montrera Trump?


La grande incertitude qui plane sur le débat a trait au candidat républicain. Sera-t-il le Donald Trump outrancier, héraut du «politiquement incorrect» ou sera-t-il un candidat plus posé montrant qu’il a le tempérament d’être le commandant en chef de la plus puissante armée du monde?

Pour Hillary Clinton, le caractère imprévisible de son rival est difficile à appréhender. Mais elle a l’habitude des débats face à un seul adversaire. Elle l’a expérimenté lors des primaires de cette année face à Bernie Sanders et en 2008 face à Barack Obama. Donald Trump n’a, pour sa part, jamais excellé dans ce type d’exercice. De plus, il a toujours été confronté à plus de dix candidats.

Cette fois, il ne pourra plus se contenter de «one-liners», ces phrases courtes qui avait permis à Ronald Reagan, en 1980, de saper l’assise de Jimmy Carter en déclarant «There you go again» pour montrer que le démocrate chantait toujours la même antienne.

Très critique des débats présidentiels, la papesse du journalisme Elizabeth Drew le souligne: les qualités testées lors des débats n’ont rien à voir avec ce qui est requis pour gouverner. L’impact de cette joute cathodique pourrait d’ailleurs être minimal. 17% des électeurs inscrits affirment qu’ils pourraient changer leur avis après lundi soir. Mais seuls 6% estiment qu’il y a une chance que cela arrive.

Animant un débat qui se déroule dans un contexte ultra-tendu peu après l’attentat de Manhattan et les violentes émeutes raciales de Charlotte, Lester Holt porte une lourde responsabilité. Devant une audience record, il devra rester impartial, équilibré. Une gageure.

Article publié en accord avec nos partenaires Le Temps

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