Jimsaan : les jeunes pousses Des maisons d’édition plus anglées : à Dakar, trois amis inventent une nouvelle façon d’éditer, ciblée sur la littérature et les essais. En 2013, les trois écrivains Felwine Sarr, Boubacar Boris Diop, et Nafissatou Dia Diouf, créent "
Jimsaan", du nom d'une rizière de Niodior, une île du Saloum. L’objectif ? Publier des textes de littérature africaine avec une exigence de qualité sans faille et des méthodes professionnelles, "comme en France", en ce qui concerne le choix des manuscrits, les relectures, le travail du texte. "Autant d'éléments qui pêchent, regrette Felwine. Les grands auteurs africains ne doivent plus hésiter à se faire publier ici, pour qu’enfin nos images, notre imaginaire, se détachent des préoccupations, des attentes et du filtre d’autres régions du globe. Nous devons nous recentrer sur notre continent". Les trois complices ont déjà publié des rééditions – Comment philosopher en Islam ? de Bachir Diagne ; La Plaie de Malick Faye –, ainsi que l’original Cantate pour la Mer Noire de Leonora Miano (en décembre prochain). A l’épreuve du feu, ils se heurtent à une première difficulté : publier des livres selon un standard international. "Il n’existe pas d’imprimeur adéquat, en Afrique. Nous externalisons donc en France, alors qu’à terme, nous souhaiterions fonctionner exclusivement en local," Pour autant, Felwine Sarr se déclare confiant en l’avenir de l’édition en Afrique sub-saharienne francophone : "A mon sens, les perspectives sont bonnes, avec la hausse des taux d’alphabétisation, l’élargissement de la classe moyenne, une démographie, un besoin de savoir et une envie de culture croissants, dit-il. Les solutions résident dans la baisse du coût du livre, dans une politique adéquate de promotion de la lecture, et dans l’avènement des livres numériques et audio". Enfin, en parallèle de Jimsaan, les trois complices ont repris, à Dakar, la librairie Athéna, qui se veut un carrefour de débats et d’idées, un espace culturel, avec ateliers slams, soirées poésie, etc. Dans cet endroit convivial, un peu atypique dans la capitale africaine, les phrases semblent sortir des pages. Leur rêve à tous trois ? Que Jimsaan sème des graines et libère les mots d’écrivains africains, contraints à l’exil de la parution. L’avenir (de l’édition africaine) est en marche.