Punaises de lit : la France face à une vague de panique

En France, les punaises de lit sont dans tous les esprits. Tout le monde pense en avoir vu une. Rampant sur un siège de train, tapie dans un fauteuil de cinéma... Des établissements scolaires sont également touchés. Ces insectes nuisibles infestent le débat public jusqu'au sommet de l'État.

Image
punaises de lit france
AP Photo/Carolyn Kaster, File
Partager 2 minutes de lecture

Des classes vides, des usagers qui ne s’assoient plus dans les transports en commun, des meubles potentiellement infestés déposés dans les rues: la France est balayée par une vague de "panique collective" face aux punaises de lit qui inquiètent jusqu'au sommet de l'Etat.

En ce moment, tout le monde pense en avoir vu une. Rampant sur un siège de train, tapie dans un fauteuil de cinéma... Les signalements de ces insectes suceurs de sang se multiplient, sans lien avec l'ampleur du phénomène selon les autorités mais décuplés par le côté viral des réseaux sociaux.

Au lycée Elisa-Lemonnier, dans le 12e arrondissement de Paris, elles sont bien réelles: quatorze classes, désormais "calfeutrées", ont été "infectées", sans compter le CDI et une salle des profs, selon un message du directeur transmis vendredi matin aux enseignants et consulté par l'AFP.

Je ne cesse de recevoir des messages de parents qui disent qu'ils n'enverront pas leur enfant tant qu'il y aura des punaises
Une enseignante du lycée Elisa-Lemonnier, Paris 12e

Résultat, les professeurs, qui avaient fait valoir leur droit de retrait jeudi, n'ont toujours pas repris les cours et envisagent une grève. Sur les 1.200 élèves, "à peine quelques dizaines" s'étaient présentés devant l'établissement vendredi matin, selon une enseignante qui a requis l'anonymat.

"Chez les parents et les élèves, il y a une psychose absolue. Je ne cesse de recevoir des messages de parents qui disent qu'ils n'enverront pas leur enfant tant qu'il y aura des punaises", raconte-t-elle.

Au total, cinq établissements scolaires ont été fermés en France à cause de ces insectes - dont l'un a rouvert - et plusieurs autres ont été concernés sans fermeture complète, selon un bilan du ministère de l'Education en fin de semaine.

"Ça me démange"

Le grand retour des nuisibles a pris des dimensions d'affaire d’État, à quelques mois des Jeux olympiques de Paris. Le gouvernement, qui veut rassurer y compris à l'étranger, assure prendre le problème à bras-le-corps. Une réunion interministérielle se tenait vendredi à Matignon sur le sujet.

Le tout même s'il n'y a "pas de recrudescence" des punaises de lit dans les transports, a assuré mercredi le ministre Clément Beaune. 

Tout ceci n'a rien d'une "psychose", balaye Marie-Christine Gesta, retraitée, qui parle "d'expérience" à 72 ans, dont les derniers à combattre les punaises de lit, qu'elle a découvertes lors d'un séjour à l'hôtel. "Ça m'a pourri la vie", explique à l'AFP celle qui "vérifie partout", désormais, y compris dans son sac de courses.

Mme Gesta s'était débarrassée de ces insectes depuis peu. Les voir ressurgir a donc "réveillé de mauvais souvenirs". "Ça me démange déjà rien que d'y penser", déplore celle qui vit près de Vannes.

Cela crée un stress important, plus marqué chez les personnes déjà anxieuses
Antoine Pelissolo, psychiatre au CHU Henri-Mondor, à Créteil

Une peur qui se diffuse. Les meubles que l'on croit infestés sont désormais déposés aux encombrants et tagués "Punaises de lit", comme sur une photo de canapé, matelas et autres table à repasser postée sur X (ex-Twitter) par l'internaute @masfargay, qui s'étonne: "Je sors du taff (travail, Ndlr) je vois ça. On vit en enfer".

"Il y a des matelas alignés dans ma rue avec des petites affiches demandant de ne pas toucher. On a peur de +la puce+", a même raconté au Guardian l'auteur américain Alfredo Mineo, qui vit à Paris.

"Obsessionnel"

"Il y a un petit effet de panique collective, ou même des gens qui n'ont pas de punaises de lit s'inquiètent d'en avoir, avec parfois un côté un peu obsessionnel", analyse le psychiatre Antoine Pelissolo, du CHU Henri-Mondor, à Créteil.

"Cela crée un stress important, plus marqué chez les personnes déjà anxieuses", relève-t-il, évoquant des épisodes précédents. Il avait eu alors des patients qui allaient "très mal (...) parce qu'il y a ce côté un peu incontrôlable, envahissant", et "le sentiment qu'on ne va jamais s'en sortir".

Reste que l'exposition médiatique a relancé les demandes pour des désinfections chez les particuliers mais aussi dans les transports publics, qui veulent montrer patte blanche. Le réseau de transports en commun de Montpellier, le TAM, a par exemple partagé vendredi sur les réseaux sociaux des photos d'une "opération de détection", mettant en avant un agent accompagné d'un chien renifleur. Résultat "négatif".

Tweet URL

Avant les JO-2024, avait d'ailleurs promis Clément Beaune, il faudra passer par un "grand nettoyage de printemps".

L'Algérie a d'ores et déjà annoncé la mise en place de "mesures préventives" pour prévenir toute propagation des punaises de lit, après la multiplication de signalements en France où vit une importante diaspora algérienne.