Aux petites heures du matin en ce jeudi 9 mai, 120 policiers québécois ont mené une vaste opération au Québec : ils ont arrêté 37 personnes et effectué 70 perquisitions. Parmi les personnes arrêtées, Gilles Vaillancourt, l’ex-maire de Laval, troisième ville de la province, ainsi qu’un entrepreneur tout-puissant dans les chantiers publics au Québec, Tony Accurso. Un coup de filet d’importance, donc, dans la lutte contre la corruption au Québec.
Fraude, fraude contre le gouvernement, complot, abus de confiance, corruption dans les affaires municipales, recyclage des produits de la criminalité et gangstérisme : telles sont les principales accusations qui pèsent contre Gilles Vaillancourt… Parmi les personnes arrêtées, on retrouve des avocats, des ingénieurs, des hauts fonctionnaires de la ville de Laval et des entrepreneurs en construction. Des accusations très graves, donc, surtout celles de recyclage des produits de la criminalité et de gangstérisme, passibles de dizaines d’années de prison. Les policiers ont parlé d’un "réseau organisé et structuré qui opérait un système de corruption et de collusion dans l’octroi de contrats publics, bien établi à Laval, et orchestré par trois groupes distincts : des entrepreneurs et des ingénieurs, des facilitateurs (avocats, notaires et un commerçant), ainsi qu’un groupe d’individus, composé d’un maire, d’un directeur général et d’un directeur général à l’ingénierie".
Gilles Vaillancourt, ancien maire de Laval (photo AFP)
La chute du "monarque de Laval"
C’est caché au fond d’un fourgon cellulaire de la Sûreté du Québec que l’ex-maire Gilles Vaillancourt est arrivé au palais de justice de Laval peu avant 14h30 jeudi pour comparaître devant un juge… Aucune image publique, donc, de l’ex-maire menottes aux poings, celui qui était surnommé le "monarque de Laval" tellement il était puissant dans cette ville sur laquelle il a régné pendant 23 ans. Il a démissionné le 9 novembre dernier à la suite de nombreuses perquisitions menées par la police dans ses résidences et à la mairie de Laval, l’étau se resserrait de plus en plus sur lui et plusieurs de ses collaborateurs. Selon plusieurs témoignages entendus devant la Commission Charbonneau, cette commission d’enquête publique sur l’industrie de la construction, l’ex-maire de Laval aurait réclamé 2,5% des contrats de chantiers publics réalisés dans sa ville et ce, pendant plusieurs années. On estime que Gilles Vaillancourt se serait ainsi constitué une petite fortune de plusieurs dizaines de millions de dollars. Il a été remis en liberté ce vendredi 10 mai moyennant une caution de 150 000 euros. Le coup de filet mené ce jeudi est le résultat d’une enquête qui a duré trois ans, avec l’analyse de 30 000 conversations électroniques et de milliers de documents. Il s’agirait donc de la chute d’un pan entier du système de corruption et de collusion qui gangrène les chantiers publics dans la grande région de Montréal depuis des décennies.
D’autres têtes tomberont
Les policiers promettent de poursuivre leurs enquêtes au cours des prochaines semaines pour arrêter et faire accuser d’autres personnes impliquées dans ces combines de corruption et de collusion. Le chef de la brigade anti-corruption Robert Lafrenière avertit : "Le message est clair, l’UPAC n’hésitera pas à épingler les corrupteurs et les corrompus, qui qu’ils soient et où qu’ils se trouvent. La corruption n’est pas tolérée au Québec et nos actions sont sans limites pour enquêter, détecter et prévenir la corruption dans notre système public". Et pendant que les policiers travaillent, la Commission Charbonneau poursuit ses audiences. Le gros ménage est en cours…