L'organisation internationale de la Francophonie a organisé ces jeudi et vendredi, à Montréal, une conférence sur le devenir des médias francophones. Elle a rassemblé les responsables de grandes entreprises de presse provenant de 18 pays issus de la Francophonie. La presse écrite, la radio, la télévision, aucun média n'est épargné par les nouvelles habitudes de consommation du public qui leur impose des changements majeurs.
Crise des médias traditionnels
Les médias sont en crise un peu partout dans le monde. C’est une évidence : les tirages des journaux, même les plus prestigieux, sont en forte baisse, les journaux télévisés voient leur audience diminuer d’année en année, seule la radio tire relativement bien son épingle du jeu dans la tempête. Pourtant, le public est plus que jamais avide et consommateur d’information. Sauf que ses habitudes ont changé drastiquement : la vague internet a déferlé sur la sphère médiatique, rendant caduque les modèles traditionnels que sont le tirage papier d’un quotidien ou le journal télévisé à heure fixe.
A la recherche d'un nouveau modèle économique
L'emprise d'Internet impose une nouvelle réalité aux entreprises de presse : la gratuité. Le quotidien montréalais La Presse, lui, a relevé le défi avec succès en offrant gratuitement aux propriétaires de tablettes l'édition quotidienne de son journal. L’expérience a commencé en avril 2013 et semble plus que prometteuse : l’application La Presse + a été téléchargée sur 585 000 tablettes depuis et le nombre de téléchargements ne cesse d’augmenter. Le produit plaît au public et il permet maintenant d’assurer 40% des revenus publicitaires de La Presse. Ce modèle est unique dans l’univers médiatique et il suscite beaucoup d’intérêt de la part de nombreux éditeurs dans le monde, peut-être que l’avenir de la presse écrite passe par ce concept. Guy Crevier, le président-éditeur de La Presse, qui a piloté cette expérience semble en tout cas avoir été visionnaire : le chiffre d'affaire du quotidien montréalais croît alors que celui de ses rivaux est en baisse.
L’information télévisée, de son côté, doit se réinventer sur le net. Le public n’a plus du tout la fidélité qu’il pouvait avoir il y a 10 ans en écoutant religieusement tous les soirs dans son salon le journal télévisé. L’information, il l’a consommée toute la journée sur son téléphone intelligent ou sa tablette, alors à quoi bon la regarder de nouveau à la télé le soir dans son salon ? A moins qu’on ne lui offre un produit qui ne l’informe davantage... Une tendance que l’on peut observer dans certains journaux télé diffusés en soirée sur les grands réseaux nord-américains. En effet, ceux-ci ressemblent de plus en plus à des magazines, au contenu plus léché et plus approfondi. La télévision est donc en pleine transformation.
Inquiétudes
Sylvain Lafrance, qui a été vice-président des services français de Radio-Canada, croit de son côté qu'il y aura une télévision de qualité dans 20 ans mais qu'il faut dès maintenant faire attention à ce que cette télévision garde ses particularités nationales, ne soit pas englobée par la mondialisation, qu’elle offre des produits respectant les spécificités culturelles du public qui la regarde. Sylvain Lafrance estime que le service public a un rôle majeur à jouer à ce niveau et qu’il faut donc lui donner les moyens d’assumer ce rôle. Les réseaux publics de radio-télévision sont pourtant tous aux prises avec des compressions majeures : CBC et Radio-Canada, la BBC, France Télévisions…
Cette conférence unique en son genre a permis de faire l’état de santé des médias francophones dans le monde. Un rapport général doit être produit et présenté à l’Organisation internationale de la Francophonie qui va l’intégrer dans ses grandes orientations pour les années à venir.