Fil d'Ariane
À la surprise générale ce mardi 3 décembre, le président Coréen Yoon Suk-Yeol décrétait la loi martiale. Une décision historique, dont la nécessité a été immédiatement contestée. Le fauteuil de celui qui a été élu à la tête du pays en 2022 était déjà vacillant depuis plusieurs mois. Qui est cet homme accusé d'avoir voulu porter atteinte à la démocratie ? Portrait du président sud-coréen, Yoon Suk-Yeol.
Le président sud-coréen Yoon Suk Yeol répond à une question des journalistes lors d'une conférence de presse au bureau présidentiel à Séoul, en Corée du Sud, le jeudi 7 novembre 2024.
Né de parents tous deux professeurs, Yoon Suk-Yeol grandit dans la capitale Coréenne Séoul. Après une scolarité classique, il intègre la faculté de droit de l’Université nationale de Séoul. En 1991 et après plusieurs tentatives infructueuses, il réussit son entrée à l’école de la magistrature. Trois ans plus tard, sa carrière de procureur est lancée.
Il se fait connaître du grand public en 2016, en faisant tomber Park Geun-Hye alors présidente en exercice, pour abus de pouvoir. En 2019, il est nommé procureur général de Corée du Sud et s'attaque à la destitution du ministre de la Justice Cho Kuk. Alors qu’il est sous la pression de l’exécutif qui tente de le destituer, il gagne une certaine popularité auprès des coréens. Il démissionne finalement en mars 2021, en signe de protestation. Yoon Suk-Yeol nourrit déjà secrètement, des ambitions présidentielles.
« Pouvoir au peuple », le parti de Yoon Suk-Yeol voit le jour début 2020, après la fusion de plusieurs partis mineurs. Conservateur, le parti s’oppose notamment à l’existence d’inégalités liées au genre. Partant du constat qu’il « n’existe pas de discrimination structurelle liée au genre », le parti avait fait de la suppression du ministère de l’Égalité des sexes et de la famille, une mesure phare de la campagne présidentielle de Yoon Suk-Yeol en 2022. Toujours au cours de la campagne, Yoon Suk-Yeol avait proposé de rehausser le temps de travail légal de 52, à 120 heures hebdomadaires.
Des manifestants sont bloqués par des officiers de police alors qu'ils tentent de marcher vers le bureau présidentiel après une veillée aux chandelles contre le président sud-coréen Yoon Suk Yeol à Séoul, Corée du Sud, mercredi 4 décembre 2024.
Depuis son élection en 2022, son image de pourfendeur de la corruption n’a cessé d’être mise à mal. Outre des sorties polémiques, sa gestion de l’épisode de la « bousculade d’Halloween » à Séoul qui fera 150 morts, lui sera fortement reprochée. À peine quelques semaines avant les législatives de 2024 c’est au tour de sa femme de faire la une des journaux. Elle est accusée d’avoir accepté un sac à main en guise de pot-de-vin, d’une valeur de 2000 euros. Des élections législatives qui seront synonymes de défaite pour Yoon Suk-Yeol et son parti. Avec 174 sièges, le Parti démocrate s’offre une victoire écrasante face au pouvoir en place. Avec ses 108 sièges, le « pouvoir du peuple » perd sa majorité relative et ne peut plus gouverner. Ce revers coutera sa place au Premier ministre de l’époque, Han Duck-soo, contraint de présenter sa démission.
Pour protéger la Corée du Sud libérale des menaces posées par les forces communistes nord-coréennes et éliminer les éléments antiétatiques (…) je déclare la loi martiale d’urgence.
Une déclaration et une décision forte, qui en dit long sur les velléités du président coréen envers le régime de Kim Jong-Un. En effet, depuis plusieurs mois, la tension monte entre Séoul et Pyongyang. Le 9 octobre dernier, l’armée nord-coréenne a annoncé couper définitivement les axes routiers et ferroviaires hautement symbolique avec son voisin. Déjà en 2020, un bureau de liaison entre les deux pays avait été dynamité par l’armée du régime autoritaire. Partisan d’une certaine fermeté, Yoon Suk-Yeol n’a cessé de renforcer ses alliances militaires avec le Japon et les États-Unis depuis son arrivée au pouvoir
Sa décision historique a d’ores et déjà plongé la politique coréenne dans une crise sans précèdent. Lâché par ses plus proches fidèles, au sein même de son parti, ses jours à la tête de la Corée semblent comptés. La motion de destitution déposée par le Parti démocrate s’ajoute à la plainte pour « rébellion » dont-il fait déjà l’objet. La confédération coréenne des syndicats a de son côté appelé à « une grève générale illimitée », jusqu’à sa démission.