Fil d'Ariane
Dans l'après-midi, des manifestants se sont rassemblés à l'appel du syndicat Solidaires place de la Concorde, non loin de l'Assemblée nationale où Élisabeth Borne a déclenché l'article 49.3.
Voir : Réforme des retraites : après le 49.3, manifestation à Paris
Des représentants de plusieurs organisations de jeunesse, syndicats étudiants (Alternative), et organisations politiques (Jeunes insoumis, Jeunes écologistes, NPA Jeunes), à l'initiative de cette manifestation, étaient présents. Ils ont été rejoints par des travailleurs : cheminots, raffineurs notamment, puis par des manifestants massés près de l'Assemblée nationale et par un cortège de plus de 1.600 jeunes parti de la place de la Sorbonne, aux cris de "Emmanuel Macron, président des patrons, on vient te chercher chez toi" et "A bas le 49.3", a constaté une journaliste de l'AFP.
Selon une source policière, ils étaient "quelques milliers" à Paris, où les forces de l'ordre sont intervenues en début de soirée. Selon la préfecture de police, les forces de l'ordre sont entrées en action, notamment avec des canons à eau, après une tentative de dégradation du chantier de l'Obélisque, au centre de la place. Ces interventions ont provoqué d'importants mouvements de foule sur la place, selon les journalistes de l'AFP.
Des incidents ont aussi éclaté dans d'autres villes comme à Marseille sur la Canebière, où des jeunes masqués ont fracassé la vitrine d'une agence bancaire et un panneau publicitaires tandis que d'autres ont mis le feu à des poubelles aux cris de "à bas l'État, les flics et le patronat", a constaté un journaliste de l'AFP.
À Amiens, où 1.000 à 1.500 manifestants ont défilé, selon la préfecture, les CRS ont fait usage de gaz lacrymogènes, tout comme à Lille. À Dijon, où 700 personnes se sont rassemblées, certains s'en sont "pris aux forces de l'ordre et ont commis des dégradations", tandis qu'un mannequin à l'effigie du président de la République a été brûlé, selon la préfecture.
"Le 49.3 ça renforce forcément un peu la détermination", a témoigné auprès de l'AFP Ruben, 20 ans, étudiant en sciences politiques à Paris 1 rencontré place de la Concorde. "On est presque dégoûtés parce qu'on se mobilise depuis des semaines, et derrière, la seule réponse du gouvernement, c'est l'utilisation du 49.3", a-t-il dénoncé.
Engéline Allée, 48 ans, travaille à la RATP. "Élisabeth Borne a déclenché le 49.3. Elle a déclenché une bombe. Ça va mettre les gens encore plus en colère", juge-t-elle estimant que "tout le gouvernement devrait démissionner".
À Grenoble, 200 à 300 personnes se sont rassemblées dans l'après-midi devant la préfecture. "Je m'étais dit qu'ils respecteraient un peu la démocratie. A priori je suis très naïve donc j'ai été surprise, je croyais qu'ils n'allaient pas oser user du 49.3", explique Karen Mantovani, agente d'accueil à la CPAM et déléguée syndicale CGT. "Tout le monde grogne mais ça manque d'action", regrette-t-elle, se disant "révoltée".
À Lyon, une manifestation a rassemblé quelque 400 personnes vers 17H00 devant la préfecture aux cris de "Macron démission". Plusieurs milliers de personnes se sont également réunies à Toulouse, a constaté l'AFP.
À Lille, où plusieurs centaines de personnes étaient réunies sur la place de la République, "il y a de fortes probabilités qu'on durcisse le mouvement", prévient Sandrine Desmettre, déléguée CGT chez Malakoff Humanis. "On se disait: avec tout le monde qui s'exprime contre cette réforme, un 49.3, (...) ils vont quand même pas oser. Ben si. Maintenant c'est la colère. Il y a vraiment de l'abus".
Trois Intercités étaient bloqués en soirée entre Clermont-Ferrand et Paris en raison de manifestants présents sur les voies à Moulins qui empêchaient la circulation depuis 18H30, selon la SNCF.
À Bordeaux, environ 300 personnes se sont rassemblées, des rassemblements spontanés ont également eu lieu à Strasbourg ou encore Besançon (500 personnes selon la police), où des sacs poubelles ont été déposés devant la préfecture.
"Je n'étais pas en colère. J'ai été très choquée", a déclaré sur TF1 la Première ministre.
"Le Parlement, l'Assemblée nationale, c'est le lieu du débat. Si on ne veut pas s'écouter, ça traduit le fait qu'un certain nombre de groupes ne respectent pas nos institutions (...) Le chaos, le désordre ce sont les Français modestes qui en paient les conséquences", a estimé Élisabeth Borne.
Voir : France : l’Assemblée nationale se déchire sur la réforme des retraites
Pour la Première ministre, le recours au 49.3 de la Constitution, qui est le produit d'une "décision collective", n'est "pas un enjeu personnel". "Ce n'est pas un enjeu de personne. Ce dont on est en train de parler, c'est d'un élément crucial de notre modèle social et de notre capacité à le réformer pour assurer sa pérennité".
Élisabeth Borne a par ailleurs jugé, sur les motions de censure en préparation, qu'elles feront "l'objet d'un vote" et que "ce vote sera finalement ceux qui sont pour ou ceux qui sont contre la réforme".
Après avoir engagé l'article 49.3, considéré par les oppositions comme un "passage en force", elle estime que "la seule méthode pour trouver les meilleures solutions pour notre pays, c'est de rechercher des compromis, d'écouter les organisations syndicales".
"Nous avons beaucoup bougé" par rapport à notre texte initial, a-t-elle assuré.
Élisabeth Borne a aussi affirmé qu'elle "n'avait jamais cessé d'échanger" avec le patron du premier syndicat français, la CFDT, Laurent Berger, qui a appelé dans la soirée du 16 mars avec tous les autres syndicats à une 9e journée de grèves et de manifestations jeudi 23 mars.