Fil d'Ariane
«Les montagnes de poubelles qui brûlent», la répression «parfois musclée» des policiers casqués, les casseurs masqués, les manifestations et les grèves massives, tout cela n’impressionne plus Le Temps de Genève, un brin blasé dans son éditorial. «Les exactions sont devenues le lot des mouvements sociaux français, qui reviennent plus régulièrement que la Coupe du monde ou l’Euro de foot. Rien d’historique pour l’instant».
(Re)voir : France : neuvième journée de mobilisation contre la réforme des retraites
Le Temps ne cache pas pour autant son inquiétude. «Le vrai bord du gouffre ce ne sont pas les poubelles qui brûlent» mais la présidentielle de 2027. Le cauchemar du quotidien francophone, c’est «un rabougrissement du camp de la raison et à un duel présidentiel catastrophique pour la France entre Jean-Luc Mélenchon, incarnation de la colère insurrectionnelle, et Marine Le Pen, incarnation de la colère de plus en plus «notabilisée» et rassurante en apparence».
Les manifestants répondent à un gouvernement qui a ignoré à plusieurs reprises l’opinion publique, les revendications des syndicats modérés et les grandes mobilisations dans la rueThe New York Times du 24 mars, quotidien américain
Le Soir de Bruxelles souligne le «pari risqué du dos rond» par Emmanuel Macron. « En n’optant ni pour un retrait de la réforme, ni pour un référendum, ni pour une dissolution, ni même pour un remaniement gouvernemental, le chef de l’Etat a pris la posture du général sans peur et sans reproches qui ne craint ni la foule ni l’impopularité. Mais son intransigeance pourrait bien rallumer le brasier.»
France : mobilisation et violences en hausse
À travers le gouvernement de sa Première ministre Élisabeth Borne, le président Macron a fait le choix de l’adoption sans vote de la réforme des retraites en vertu de l’article 49-3 de la Constitution de la Ve République du général de Gaulle.
Son intervention dans les journaux télévisés mercredi 22 mars a jetté de l’huile sur le feu «en évoquant , fût-ce pour les distinguer de ceux qui manifestent une colère à ses yeux légitimes, les « factieux », qui menaceraient de déstabiliser le pays à la manière des partisans de Trump qui avaient envahi le Capitole».
« Une comparaison fantaisiste » selon le New York Times qui constate que « la France est furieuse ». « Les manifestants répondent à un gouvernement qui a ignoré à plusieurs reprises l’opinion publique, les revendications des syndicats modérés et les grandes mobilisations dans la rue », rappelle le quotidien américain dans une tribune éditoriale.
Force est de constater avec le quotidien britannique The Guardian, que le soir du jeudi 23 mars, au lendemain de l’intervention de Macron, « la colère est entrée en ébullition » en conséquence de quoi la visite d’État du roi Charles III a été reportée le lendemain, note The Guardian qui tente d’expliquer « pourquoi la réforme des retraites de Macron a alimenté tant de colère en France ».
Le président et ses alliés utiliseront probablement la violence sporadique des manifestations de jeudi pour creuser un fossé entre le mouvement de protestation et le reste du public français
The Guardian du 24 mars, quotidien britannique
Le grand quotidien britannique distingue bien les deux voies séparant les protestataires : «d’une part, des manifestations de jour organisées par les syndicats dans un esprit parfois festif, d’autre part une ambiance plus sombre des actions non officielles durant la nuit »
« Le président et ses alliés utiliseront probablement la violence sporadique des manifestations de jeudi pour creuser un fossé entre le mouvement de protestation et le reste du public français », note The Gardian. Une tactique vouée à l’échec selon le journal qui voit « une bénéficiaire probable : la dirigeante d'extrême droite Marine Le Pen ».
Une même crainte est partagée par The Independent de Londres. Ce journal britannique pro-européen voit dans le président français « le principal dirigeant d’Europe » depuis le départ d’Angela Merkel et le repli sur soi du Royaume-Uni. The Independent ne doute pas que Macron survive aux protestations et aux manifestations, mais redoute que Le Pen en tire profit, « cela pourrait avoir de lourdes implications pour l’Europe ».
Voir aussi : Emmanuel Macron a-t-il été photographié au milieu de manifestants ? [À Vrai Dire]