Retour aux racines
En quelques années les néopaïens sont donc ainsi sortis de l’ombre. Les raisons de cette première petite percée sur le marché des croyances religieuses semblent nombreuses et diverses. La recherche identitaire reste très forte. "Paradoxalement, dans un monde de plus en plus globalisé et connecté, l’individu entend retrouver ses racines historiques, qu’elles soient réelles ou imaginaires", explique Kaarina Aitamurto, spécialiste du néopaganisme.
Marc Beaulieu organise dans la petite ville de Rawdon, au Québec, des cérémonies druidiques. Huit fois dans l’année, quelques 70 fidèles y célèbrent le rythme des saisons. L’homme voit une filiation personnelle dans ses pratiques druidiques : "Mon nom Beaulieu vient de France. Nous sommes des Celtes du Québec. Dans le village de Beaulieu, il y a un grand Dolmen. Mes ancêtres étaient peut-être druides", plaide sérieusement le fidèle. "Le renouveau du néodruidisme en Bretagne dans les années 1990 reste intimement lié aux mouvements régionalistes et à la redécouverte de la langue bretonne. Les cérémonies druidiques n’ont rien d’historique, mais le culte est toujours fait en Breton", indique Philippe Le Stum, historien. Ainsi, la quête identitaire chez de nombreux fidèles constitue un facteur d’adhésion à ces mouvements. "Le druidisme a un lien avec la Bretagne et la France, et ce lien est fort pour moi en tant que Québécois", explique ainsi Marc Beaulieu.
Dans l’est de l’Europe, la croissance des mouvements néopaïens est intervenue au moment de la chute du communisme. L’instabilité politique et sociale, alliée à l’apparition d’un capitalisme sauvage, ont fragilisé de nombreuses communautés. Le besoin de se recentrer sur la nature et sur la célébration de son sol ou de sa patrie explique en partie l’émergence de ces nouvelles spiritualités dans les anciens pays du bloc de l’Est. "Elle est liée aux réveils nationalistes dans cette partie de l’Europe", analyse Kaarina Aitamurto.
La croissance des ces nouveaux cultes trouve désormais un relais dans le désamour d’une partie des populations occidentales pour les grandes institutions religieuses. "Les scandales de pédophilie m’ont détourné de l’église catholique", reconnaît ainsi Marc Beaulieu. "Parmi la gent féminine, beaucoup considèrent que les différentes formes du christianisme laissent peu de place aux femmes et que le corps de la femme, dans les religions monothéistes, reste souvent perçu comme impur et source de péchés. Le divin est ici féminisé. Gaia, la Terre, est représentée sous la forme d'une déesse", indique Kaarina Aitamurto.