Fil d'Ariane
En France, les retraites s’appuient sur un système de répartition. En clair, chacun paie pour tout le monde et tout le monde paie pour chacun. Concrètement, chaque mois, une partie des revenus des Français part dans une caisse commune, baptisée “régime de retraite”. Il existe une quarantaine de régimes différents, selon les métiers.
Ces cotisations servent à payer les retraités actuels.
Pour pouvoir prétendre à une retraite à taux plein, le salarié doit avoir un âge minimum (62 ans actuellement) et cotiser un certain nombre de trimestres. Ce nombre varie en fonction de l’année de naissance. En effet, des lois votées en 2003 puis 2013 ont prévu une augmentation progressive de la durée de cotisation. Un salarié né en 1954 a pu partir à la retraite après 41 ans et un trimestre de cotisation. Les salariés nés en 1973 partiront après 172 trimestres (43 années) de cotisation.
Selon la dernière étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), fin 2020, 16,9 millions de personnes, résidant en France ou à l’étranger, étaient retraitées d’au moins un régime français. La pension moyenne s’établit à 1 509 euros bruts mensuels, soit 1 400 euros nets par mois.
L’âge de départ à la retraite s’élève à 62 ans et 4 mois avec une légère différence entre les hommes et les femmes (62 ans pour messieurs, 62 ans et 7 mois pour mesdames)
Il y a de moins en moins de salariés et de plus en plus de retraités. Par conséquent, les régimes de retraite sont condamnés à être dans le rouge. Tel est en substance l'argument couramment mis en avant pour justifier une réforme des retraites.
La réforme des retraites vise à garantir "l'équilibre" du système en 2030 affirme ce mardi 10 janvier la Première ministre Elisabeth Borne.
Quels leviers le gouvernement compte-t-il actionner ?
Le plus emblématique est de toucher à l'âge de la retraite. Le gouvernement annonce ce mardi soir qu'il compte le faire passer à 64 ans contre 62 ans actuellement.
La durée de cotisation pourrait aussi être révisée. Elle resterait de 43 ans comme prévu, mais la réforme évoquée plus haut serait accélérée : sa mise en oeuvre pourrait être avancée à 2027 au lieu de 2035.
Aute sujet ultra-sensible, réformer les régimes spéciaux, c'est à dire les régimes de retraite propres à certaines professions et corporations. Là encore, il s'agit de reporter l'âge de départ. Le transport ferroviaire, mais aussi l'électricité et le gaz sont concernés. La Première ministre explique ce mardi que ces régimes spéciaux "ne sont plus justifiés aux yeux des Français". Les nouveaux entrants, à partir de septembre 2023, ne devraient plus en bénéficier et seront donc affiliés au régime général.
Cette perspective annonce une forte mobilisation dans ces secteurs fortement syndiqués.
La pierre d'achoppement reste la mesure d'âge. Plus de deux tiers des Français (68%) sont défavorables au report à 64 ans, selon un sondage récemment publié.
CFDT, CGT, Force Ouvrière... La perspective d'un tel report fait l'unanimité contre elle.
La plutôt conciliante CFDT le dit : "Il n'y aura pas de deal" en cas de report de l'âge légal et "on fera tout pour que le gouvernement recule", avertit son leader Laurent Berger. Ce qui préoccupe notamment : la question du chômage des plus âgés. Les syndicats font valoir que trop peu de seniors ont un travail (35,5% des 60-64 ans, fin 2021). Reporter l'âge de la retraite reviendrait donc, pour eux, à rallonger la durée du chômage.
"Le front syndical et politique sera totalement uni dans cette bataille", a promis le coordinateur de LFI Manuel Bompard.
La France a connu depuis une trentaine d'années une série de grandes réformes de ses systèmes de retraite pour répondre au vieillissement de la population et à la dégradation financière de ses caisses.
La publication en 1991 du Livre blanc sur les retraites marque un tournant : il met en évidence les difficultés financières à venir des régimes.
Au fil des années et des mandats, les réformes vont se multiplier. Les Français gardent en mémoire le plan Juppé de 1995 comportant une réforme des retraites des agents de l'État et des services publics. Les fonctionnaires observeront plusieurs semaines de grève. Trains et métros sont paralysés pendant plus de trois semaines. La réforme sera retirée.
Emmanuel Macron n'en est pas, pour sa part, à la première tentative. Fin 2019, une précédente réforme a, elle aussi, provoqué des grèves dans les transports pendant plusieurs semaines. Elle a finalement été reportée.
D'après le site financespubliques.fr, "les durées de cotisation en Europe sont variées et la France se situe dans la moyenne, avec une durée minimale programmée de 43 ans".
► Plus courts que la France : le Royaume-Uni (30 ans), l’Espagne (35,5 ans) et le Portugal (40 ans).
► Plus longs que la France : les Autrichiens, les Allemands et les Belges, notamment, doivent cotiser 45 ans s’ils souhaitent bénéficier d’une retraite à taux plein.