A trois mois des Jeux Olympiques de Rio de Janeiro, les travaux ne sont toujours pas terminés et sur les chantiers, les morts sont nombreux. La descente aux enfers du Brésil, ébranlé par une crise politique et économique, vient également peser sur les Jeux.
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Une équipe de football en morts". A 100 jours du coup d’envoi des Jeux Olympiques, l'Inspection du travail de l'Etat régional de Rio a lancé un cri d'alarme, lundi 25 avril, en annonçant que onze ouvriers sont décédés sur les chantiers. Ceux-ci concernent les installations sportives, mais aussi les structures urbaines, comme des routes ou des musées.
Pour Robson Leite, responsable de l'Inspection du travail, ce nombre est "
effrayant". Cette macabre comptabilité a été consignée dans un rapport diffusé lundi 25 avril 2016. L’organisme espère "
attirer l'attention pour sensibiliser les autorités sur la sécurité au travail et éviter de nouveaux accidents".
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Tout vient du manque de planification, sans doute. Et de la course contre la montre au moment de finir", juge Elaine Castilho, responsable de l'audit sur les travaux olympiques. C’est elle qui a présenté ce rapport dans le cadre de la Journée mondiale pour la sécurité et la santé au travail, prévue ce jeudi 28 avril.
Suspension des chantiers
Certains chantiers des JO ont pris du retard, et l'Inspection du travail craint qu'une accélération du rythme des travaux provoque de nouvelles victimes. La nouvelle ligne du métro, qui doit relier le quartier touristique d'Ipanema (zone sud) à celui de Barra da Tijuca (zone ouest, centre névralgique des Jeux), doit être inaugurée en juillet, à la veille des jeux. "
Je garantis que le métro sera opérationnel pour les Jeux Olympiques", martèle le secrétaire aux Transports de l'Etat de Rio, Rodrigo Vieira. Personne ne croit vraiment à cette promesse. A un mois de l'inauguration de ce tronçon, qui a coûté 2,50 milliards d’euros, le scepticisme est général.
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Il ne faut pas que les ouvriers fassent des journées exténuantes. Nous suspendrons les chantiers" si l'Inspection du travail le préconise, a prévenu Robson Leite. Il a précisé avoir déjà obtenu la suspension de certains travaux, comme sur le chantier du vélodrome olympique après y avoir constaté "
une série de problèmes".
Crise politique
Les projecteurs sont aussi braqués sur la capitale Brasilia. Alors que les premiers Jeux de l'histoire en Amérique du Sud vont avoir lieu, le Brésil est secoué par un
séisme politique. Qui de l'impopulaire présidente Dilma Rousseff, au bord de la destitution, ou de son vice-président "
conspirateur", Michel Temer, déclarera les Jeux Olympiques ouverts, le 5 août, au légendaire stade Maracana, devant des centaines de millions de téléspectateurs ?
Mi-mai, les sénateurs vont, selon toute vraisemblance, prononcer la mise en accusation de Dilma Rousseff et l'écarter du pouvoir pour un maximum de six mois, en attendant un jugement final. Nul ne sait s'il interviendra avant ou après les Jeux Olympiques.
A cette instabilité politique, s’ajoute les imprévisibles développements du scandale de corruption Petrobras, le virus Zika, la pollution et une grave récession économique. Le mécontentement des Brésiliens ternira-t-il la grande fête planétaire du sport ? L'inquiétude est palpable.
Dans ce contexte explosif, le Comité international olympique (CIO) s'efforce de faire bonne figure. La flamme "
apporte le message que notre cher Brésil peut, et va, être uni", s'est aventuré le président du comité organisateur Rio-2016, Carlos Nuzmann. Mais il a bien dû l'admettre, le Brésil navigue "
dans les eaux les plus difficiles que le mouvement olympique ait connues".
Sécurité renforcée
Côté sécurité, plus de 80 000 policiers et militaires - le double des JO de Londres en 2012 - veilleront au bien-être de 10 500 athlètes et 450 000 visiteurs du monde entier. Malgré des progrès ces dernières années, Rio demeure une ville dangereuse où narcotrafic et misère alimentent une criminalité élevée.
Si le Brésil n'a jamais été la cible d'une attaque terroriste, les attentats en Europe ont relevé le niveau d'alerte. Le service de renseignement Abin prend au sérieux la menace postée sur Twitter par l'activiste français de Daech Maxime Hauchard, le 16 novembre 2015, trois jours après les attaques de Paris : "Brésil vous êtes notre prochaine cible".