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© TV5MONDE/P. Randriana Rimanane
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Roumanie : le premier ministre lâché par ses alliés

Nouvelle crise politique en Roumanie. Les sociaux-démocrates au pouvoir se désolidarisent du Premier ministre Sorin Grindeanu qui  refuse de démissionner. Au coeur de la polémique, la lutte anti-corruption.

Une nouvelle crise politique se profile, quatre mois après des manifestations sans précédent contre la corruption.
"Un Premier ministre est légitime tant qu'il dispose du soutien des partis qui l'ont nommé, or nous avons retiré ce soutien", a déclaré le chef du Parti social-démocrate (PSD) Liviu Dragnea à l'issue d'une réunion de son parti. "Les ministres ont démissionné, M. Grindeanu n'a plus de gouvernement".
M. Grindeanu a toutefois immédiatement indiqué qu'il refusait de remettre son mandat.

"Je ne démissionne pas. ll s'agit du gouvernement de la Roumanie (...) nous avons tous une responsabilité envers cela"
Sorin Grindeanu, Premier ministre

S'il campe sur cette position, le PSD semble condamné à devoir déposer une motion de censure contre son propre gouvernement. 
Selon M. Grindeanu, cette crise à une seule explication: le souhait du chef du PSD "de concentrer tout le pouvoir entre ses mains".


M. Dragnea, qui avait mené les sociaux-démocrates vers une écrasante victoire aux législatives fin 2016, avait dû renoncer à briguer le poste de Premier ministre en raison d'une condamnation à deux ans de prison avec sursis pour fraude électorale. Il avait proposé M. Grindeanu, 43 ans, pour le poste.
Selon plusieurs analystes, un coup de froid intervenu récemment entre M. Dragnea et son ancien protégé serait lié au réticences de celui-ci vis-à-vis d'amendements au code pénal voulus par le chef du PSD.
Une tentative d'assouplir la législation anti-corruption avait provoqué l'hiver dernier une vague de protestation d'une ampleur sans précédent depuis la chute du régime communiste, contraignant le PSD à revoir sa copie.

Législation anti-corruption

"Liviu Dragnea veut une seule chose: la modification des lois anticorruption" qui l'empêchent d'accéder à la fonction de Premier ministre, a indiqué le sociologue et ancien membre du PSD Alin Teodorescu, selon qui M. Grindeanu n'était pas prêt à obtempérer.
Le chef du PSD a assuré avoir "rigoureusement analysé" l'activité du gouvernement, avant de soumettre le sort de M. Grindeanu au vote des responsables du PSD.
Mais selon le politologue Ioan Stanomir, un seul critère compte aux yeux de M. Dragnea: "la servilité". Le chef du PSD n'a d'ailleurs pas fait un secret de son intention d'être le vrai maître du jeu.
Or, M. Grindeanu, un ancien ministre des Communications jusque là très discret, a donné des signes d'"affranchissement" ces dernières semaines, soulignent les analystes. Des proches de M. Dragnea lui ont ainsi reproché de "ne plus consulter le chef du PSD" aussi souvent qu'il le faisait au début de son mandat.
La décision du PSD intervient alors que la Roumanie a enregistré la plus forte croissance économique de l'UE au premier trimestre 2017, à 5,6%.
Mais là encore M. Dragnea a trouvé une explication inédite: cette bonne performance s'explique par "la confiance dans le programme du PSD et n'a rien à voir avec le gouvernement".
Début juin, le Parlement dominé par la gauche a adopté un projet de loi qui majorera de jusqu'à 100% les traitements de la fonction publique, faisant fi des craintes de l'UE et du Fonds monétaire international (FMI) quant à un dérapage du déficit.  
L'entrée en vigueur de ce texte, prévue initialement pour juillet, a été reportée à janvier, les recettes publiques pour les premiers mois de 2017 ayant été moindres qu'espérées.
"Le gouvernement Grindeanu a été amené à improviser sans cesse pour réconcilier le programme du PSD avec les mathématiques", a commenté l'analyste économique Cristian Grosu.