Fil d'Ariane
Le 12 avril 2018, Maxime Borodine est retrouvé gravement blessé au pied de son immeuble de Ekaterinebourg, après être tombé de son balcon du 4e étage. Le jeune journaliste russe ne reprendra jamais connaissance. Il succombe à ses blessures le 15 avril à l'hôpital.
"Sa mort est une grande tragédie. La rédaction est sous le choc après la perte d'un homme aussi brillant que Maxime", selon Ekaterina Norseïeva, une collègue journaliste du site d'informations Novy Dien, contactée par téléphone.
Âgé de 32 ans, Maxime travaillait pour cette agence de presse depuis plusieurs années. C'était un journaliste qui s'intéressait à de nombreux sujets. Il réalisait aussi bien des enquêtes, des reportages et des interviews. Certaines de ses publications dépassent largement le cadre de Ekaterinbourg, ville du sud de l'Oural, et ont un écho parfois à l'échelle nationale voire jusqu'à l'étranger.
Les circonstances de sa chute mortelle restent à élucider. Selon les éléments rapportés par la police, son appartement était fermé de l'intérieur avec le loquet. Les clés étaient là, aucun écrit n'a été trouvé expliquant ce qui aurait pu se passer. Et le porte-parole de la police Valery Gorelykh d'en conclure, "il est peu probable que cette affaire ait un caractère criminel", selon le site d'info local E1.
Un épisode sème le trouble. Viatcheslav Bachkov, un défenseur des droits à Ekaterinbourg, affirme avoir reçu la veille, un appel du journaliste qui le connaît bien. Inquiet, Maxime Borodine affirme que des hommes camouflés encerclent son appartement, une personne armée et masquée est sur son balcon et d'autres sur le palier. Il a besoin d'un avocat car il pense qu'ils viennent le chercher. Une heure plus tard, Maxime rappelle pour s'excuser et dit qu'il s'agit d'un exercice. Fausse alerte.
Mais dès qu'il apprend ce qui est arrivé le lendemain, Viatcheslav raconte tout à la police. "Ils m'ont semblé totalement indifférents", nous confie-t-il par téléphone. Le Comité d'enquête de la région de Sverdlosk qui reprend l'affaire après le décès du journaliste, n'a pas plus réagi. Il procède à la recherche de témoins éventuels et l'audition des proches de la victime. Aucune hypothèse n'est écartée, y compris la thèse de l'accident.
D'après sa collègue Ekaterina Norseïeva, Maxime n'a parlé à personne à la rédaction du passage d'hommes masqués et armés, ni à des journalistes, ni à ses collègues, ni à son patron. En revanche, elle exclue catégoriquement l'hypothèse d'un suicide. "Maxime allait être muté dans la capitale pour travailler dans notre rédaction à Moscou. Il avait beaucoup de projets, beaucoup d'énergie, et il s'occupait de plein de choses".
Le mystère qui entoure la mort brutale de Maxime Borodine suscite l'émotion y compris à l'étranger. Le représentant de l'OSCE pour la liberté de la presse, Harlem Désir, demande aux autorités russes une enquête complète, transparente et indépendante. Selon l'ONG Reporters sans frontières, on ne peut pas exclure l'hypothèse "d'un assassinat lié à ses publications".
Plusieurs médias étrangers évoquent en particulier les enquêtes de Maxime Borodine concernant la société Wagner, qui recrute des mercenaires russes envoyés sur le front du Donbass et en Syrie. Le 7 février , lors de frappes américaines, des mercenaires russes subissent de lourdes pertes en Syrie : envrion 200 hommes selon Washington. Moscou dément, mais ne concède pas plus de 5 Russes tués. Maxime Borodine avait fait état de plusieurs victimes originaires de la région de Sverdlosk, notamment des Cosaques.
En apprenant sa mort, de nombreuses personnes ont contacté sa rédaction. Son enterrement est prévu le 18 avril et une page Facebook a été créée pour faciliter la venue du public et mettre un bus à disposition. Tous reconnaissent en Maxime Borodine, un journaliste professionnel, talentueux et courageux.