Russie : le patriarche Kirill, chef de l'Église orthodoxe au service de Poutine

Le patriarche Kirill, de son vrai nom Vladimir Mikhaïlovitch Goundiaïev, est en plus d’être le chef de l’Église russe, un personnage incontournable dans le paysage politique russe. Ces déclarations en soutien au Kremlin depuis le début de l’invasion russe lui ont valu plusieurs sanctions de la part de pays européens.

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Le patriarche russe orthodoxe Kirill
Le patriarche russe orthodoxe Kirill conduit le service de Pâques

dans la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou, en Russie, le 24 avril 2022.

AP/Alexander Zemlianichenko
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Petit-fils d’un prêtre victime des répressions staliniennes, Vladimir Goundiaïev entre dans le clergé de l’Église orthodoxe russe du temps de l'URSS et soumise au régime soviétique. À l’âge de 19 ans, en 1965, il entre au séminaire de sa ville natale de Léningrad (aujourd'hui Saint-Pétersbourg) et revêt l'habit monacal quatre ans plus tard. 

Il accède rapidement à son premier poste diplomatique dès 1971 et en 1989 il prend la tête du département des relations extérieures, équivalent d'un ministère des Affaires étrangères. C’est en 2009 qu’il succède alors au défunt patriarche Alexis qui avait reconstruit l'Église après la chute de l'URSS et de son système athée.

Kirill planifie alors de faire de la religion orthodoxe une religion d’État, au service du Kremlin et plus précisément au service de Vladimir Poutine. En 2012, il qualifie sa prise de pouvoir à la tête du pays de "miracle de Dieu" après la crise post-soviétique des années 1990. Il partage avec lui l’ambition d'une Russie conservatrice dominatrice.

Le patriache russe orthodoxe Kirill
Le patriache russe orthodoxe Kirill arrive à un rassemblement du président russe Vladimir Poutine avec des officiers militaires à Moscou, le 21 décembre 2022.
AP/Sergey Fadeichev

Soutien à l’invasion russe 

Depuis de longues années, le dirigeant religieux, âgé de 75 ans, est un fervent soutien des interventions militaires russes, notamment en Syrie, et n'hésite pas à s'afficher en bénissant armes et missiles. L’invasion russe en Ukraine n’y déroge pas et le patriarche multiplie les déclarations en faveur de cette soi-disant "opération militaire spéciale". Si bien que la Commission européenne veut le cibler avec des sanctions, comme c'est déjà le cas pour Vladimir Poutine et une foule de responsables russes.

Le 27 février, trois jours après le début des hostilités, Kirill avait qualifié de "forces du mal" les détracteurs des ambitions russes chez le voisin ukrainien. En avril, il appelait les Russes à "faire corps" pour combattre ses "ennemis extérieurs et intérieurs".

Lui, comme Poutine, voit dans l'Ukraine et la Biélorussie des pays "frères" qui auraient dû rester sous la houlette de Moscou et non comme des nations distinctes. Face à ces prises de position, le pape catholique François avait appelé en mars le patriarche à "ne pas utiliser le langage de la politique, mais le langage de Jésus".

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KGB et cigarettes

La carrière du patriarche Kirill est nourrie de longue date d’un soupçon de liens étroits avec le KGB, les services secrets soviétiques, qui s'appuyaient sur l'institution pour espionner les fidèles du temps de l'URSS.

Dans les années 1990, il est éclaboussé par un autre scandale, l'Église étant alors accusée de profiter de ses exemptions fiscales pour revendre à profit des cigarettes. Cette affaire lui vaudra le surnom de "métropolite (évêque, ndlr) du tabac". 

Kirill est aussi remarqué pour son goût du luxe. En 2012, une photo rendue publique révèle qu'il porte une montre d'une valeur de 30 000 dollars. Une dispute de voisinage révèlera aussi que le patriarche est propriétaire d'un appartement dans l'un des immeubles moscovites les plus en vue. 

Autant de zones d’ombre qui ne l’empêcheront toutefois pas d’avoir voix au chapitre sur biens des sujets de société.

Il est un pourfendeur de l'homosexualité et se satisfait de la loi voulue par Vladimir Poutine interdisant "la propagande de l'homosexualité aux mineurs", texte vu par les ONG comme un outil homophobe légal.

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Les grands rassemblements après l'arrestation en janvier 2021 de l'opposant russe Alexeï Navalny étaient pour lui la marque d'une « crise au sein de la jeune génération ».

Lorsqu’en 2012, quatre jeunes femmes cagoulées, qui forment le groupe punk Pussy Riot, pénètrent dans la cathédrale du Christ Sauveur, la principale de Moscou, pour y chanter une prière anti-Poutine, Kirill y voit un acte diabolique.

Alors que trois d'entre elles ont été arrêtées et condamnées à des peines de prison ferme, il rappelle régulièrement que le fidèle orthodoxe ne doit pas protester.

Paix et guerre

Kirill voit son influence récompensée notamment en 2020 où une référence à Dieu est inscrite dans la Constitution de la Russie. Une réforme validée en même temps que celle autorisant Vladimir Poutine à rester au pouvoir jusqu'en 2036 et celle définissant le mariage comme l'union d'un homme et d'une femme. 

Dernièrement, sa demande de cessez-le-feu pour le Noël orthodoxe dans le conflit ukrainien a été entendue par Vladimir Poutine qui en a fait l’annonce pour le 6,7 et 8 janvier 2023. Si la démarche se veut pacifique le temps d’une trêve de Noël, le patriarche affiche un soutien sans faille à l'offensive militaire, affirmant qu'il faut appuyer les "frères" prorusses de l'est de l’Ukraine qui ont "rejeté" les valeurs occidentales.