Leur sort a scandalisé une partie des Britanniques ces dernières semaines. Il a poussé la ministre de l'Intérieur à démissionner, ce 30 avril 2018, et la Première ministre Theresa May à s'excuser. Comment les immigrés antillais de la "génération Windrush" se sont-ils retrouvés clandestins dans leur propre pays ? Récit.
Le 21 juin 1948, l'
Empire Windrush entre dans le port de Tilbury, près de Londres avec 1027 personnes à bord. Parmi ces passagers : environ 500 immigrants venus des Antilles britanniques (essentiellement de Jamaïque), à l'époque colonies anglaises, pour aider à la reconstruction du pays.
Selon les
archives nationales britanniques, tous ont déboursé l'équivalent de 1000 livres sterling actuelles pour venir en Angleterre. La plupart sont des hommes, artisans, charpentiers, mécaniciens, tailleurs, ingénieurs ou musiciens, venus avec femme et enfants.
Ce navire, resté dans l'histoire, est le premier d'une longue série à traverser l'Atlantique pour amener au total 524 000 immigrants accueillis à bras ouverts à l'époque. Ces arrivants obtiennent la nationalité britannique et l'autorisation de rester indéfiniment dans le Royaume-Uni.
"Génération Windrush"
Tout change en 1971. Cette année-là, une loi met fin à cet afflux de main d'oeuvre et considère que tout nouvel arrivant, à partir du 1er janvier 1973, ne pourra rester que temporairement, même faisant partie du Commonwealth.
Ceux de la "génération Windrush" conservent, eux, leur droit de vivre et de travailler au Royaume-Uni. Les autorités n'exigent aucune démarche et nombre de ces immigrants légaux n'en entreprennent aucune pour faire reconnaître leur droit à résider. La carte d'identité n'existe pas dans le pays et seuls ceux qui ont voyagé après 1973 ont demandé un passeport britannique.
Politique de "l'environnement hostile"
La situation change radicalement pour cette population en 2012. La ministre de l'Intérieur de l'époque, une certaine Theresa May, se lance dans une politique anti-immigration clandestine radicale, dite de "l'environnement hostile".
Le principe : compliquer la vie des immigrants clandestins. Les médecins, employeurs, propriétaires doivent vérifier les papiers de leurs patients, employés, locataires pour pousser les clandestins à quitter le pays. Une campagne d'affichage publicitaire agressive est lancée, comme en témoigne la photo ci-dessous.
Cette politique va se retourner contre la "génération Windrush". Ceux qui se considéraient comme britanniques depuis plusieurs décennies réalisent qu'ils ne possèdent aucune preuve de leur permis de résider.
Le quotidien
The Guardian, en premier, a révélé ces derniers mois les conséquences : des milliers d'entre eux ont perdu emploi, logement et même accès aux soins médicaux. Certains ont aussi été menacés d'expulsion vers un pays où ils n'avaient pratiquement jamais vécus.
"Je veux m'excuser"
Ces révélations de la presse ont suscité un tollé. La responsable de la politique de "l'environnement hostile", devenue depuis Première ministre, Theresa May, a demandé pardon le 17 avril dernier. "Je veux m'excuser auprès de vous aujourd'hui. Nous sommes vraiment désolés d'avoir causé la moindre anxiété", a t-elle affirmé lors d'une réunion avec des dirigeants antillais des pays du Commonwealth.
Le gouvernement britannique a, depuis, promis une aide active pour obtenir gratuitement la nationalité britannique et assure que les tests de langue ne seront pas obligatoires pour la "génération Windrush".
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Des promesses qui n'auront pas empêché la ministre de l'Intérieur d'être emportée par cette polémique. Amber Rudd a démissionné ce lundi 30 avril.
L'Empire Windrush, lui, a coulé depuis longtemps. Il a été détruit par un incendie en 1954.