Seconde Guerre mondiale : des soldats SS wallons auraient participé au massacre de 6 000 femmes juives

Les Wallons auraient commis des crimes contre l’humanité pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est ce que révèle une enquête de Gérald Vandenberghe, journaliste de la chaîne belge francophone, la RTBF. Les faits remontent à 1945, sur la plage de Palmnicken, alors en Prusse-Orientale.
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Des soldats SS de la légion wallonne (image d'illustration).
© Capture d'écran RTBF
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Tout commence par une émission de la RTBF consacrée à la Seconde Guerre mondiale et au passé de la Belgique. Le programme se base sur l’œuvre d’un collectif d’historiens « Papy était-il un nazi ? ».

Un téléspectateur contacte la RTBF, curieux de connaître le rôle de son père pendant la guerre. Antoine, 63 ans, a l’intuition qu'il ne lui a « peut-être pas tout dit », même si ce dernier lui a avoué son passé de collaborationniste.

Engagé en 1941 dans la légion wallonne, son père combat aux côtés des Allemands. Plus tard, il se suicide. Pour Antoine, la mort de son père « pouvait être liée à une forme de culpabilité » en lien avec son passé. « Aurait-il participé à des massacres de masse ? », se demande-t-il.

Quand il fait part de ses doutes à ses proches, ils lui rétorquent que « rien dans les ouvrages historiques consacrés à la légion wallonne ne permet de prouver que des Wallons ont commis des crimes de guerre ou contre l’humanité », peut-on lire sur le site de la RTBF. Les Wallons ont pourtant intégré la Waffen-SS, les soldats d’élite d'Hitler.
 
Gérald Vandenberghe, journaliste à la RTBF, commence à enquêter (voir le reportage ci-dessous). Il rencontre Frank Seberechts, historien et auteur de « La Marche vers l’est » (« Drang naar Oosten »), un ouvrage sur les crimes des SS flamands en Russie.

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L’historien a étudié le massacre de Palmnicken. Cette ville, située sur les bords de la Mer baltique, a été le théâtre d’un massacre de 6 000 femmes juives, forcées à évacuer le camp de concentration de Stutthof en Pologne. Les Russes avançant vers l’Ouest, les nazis souhaitaient effacer les traces de leurs crimes.

Il est bien indiqué dans ces documents officiels que des Belges, des Wallons, ont participé au massacre.

Alexey Chabounine, journaliste

La « marche de la mort » des femmes juives


Les femmes du camp de Stutthof sont sous la surveillance d’officiers SS. Parmi eux, « des Flamands, des francophones de Bruxelles et de Wallonie », indique l’historien Frank Seberechts. Ceux-ci « vont encadrer la marche de la mort » de ces 6 000 femmes.

Elles partent vers la mer, vers Königsberg en Prusse-Orientale (Kaliningrad aujourd’hui en Russie, ndlr) : « Elles portent des chemises légères, ne portent pas de chaussures, il fait entre -15 et - 20 degrés ». Ces femmes meurent, sur la route, l'une après l'autre. Arrivées à la plage, les officiers « tirent, leur jettent des grenades », selon Frank Seberechts.

Plusieurs éléments tendent à montrer la participation de Belges – flamands et wallons – dans ce massacre de masse. D’abord, un dossier de 1 600 pages de la justice allemande datant des années 1960. Les termes « wallons » et « flamands » y figurent. « Il est bien indiqué dans ces documents officiels que des Belges, des Wallons, ont participé au massacre », estime Alexey Chabounine.
 
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Les termes "wallons" et "flamands" apparaissent dans les documents de la justice allemande que s'est procurés la RTBF.
© Capture d'écran RTBF
Ensuite, les enquêteurs de l’époque ont interrogé des survivantes du massacre de Palmnicken en Israël. Elles confirment que « ceux qui ont tiré parlaient allemand, russe, lituanien, mais aussi français et allemand », indique le journaliste Alexey Chabounine.
 

Devoir de mémoire

« Personne n’a été condamné » pour ce crime contre l’humanité, assure Alexey Chabounine. L’enquête de la RTBF n’a pas permis de retrouver la trace du père d’Antoine, mais elle aura au moins « validé » son intuition, observe ce dernier. « Mon père a dû au moins savoir ou voir » ce qui se passait.

Ce fils de SS wallon assure regretter s’être « construit sur l’oubli », et juge « indispensable » « un travail de mémoire » sur les activités des SS wallons dans l’est de l’Europe pendant la Seconde Guerre mondiale.

La collaboration en Belgique pendant la Seconde Guerre mondiale

Après l'invasion de la Belgique par l’Allemagne nazie le 10 mai 1940, le roi Léopold III décide la capitulation des armées belges.

Plusieurs mouvements collaborent alors à l’Allemagne nazie : le nationalisme flamand du VNV (Ligue nationale flamande) et le mouvement d’extrême droite du Rex de Léon Degrelle.