Séisme en Syrie : "Il y a une énorme pénurie de médicaments et d'abris", témoigne un humanitaire

Le premier convoi d'aide de l'ONU aux zones rebelles du nord-ouest de la Syrie depuis le séisme meurtrier de ce lundi 6 février est entré ce jeudi par le poste-frontière de Bab al-Hawa avec la Turquie. Osama Al-Hussein coordonne l'aide médicale en Syrie pour l'ONG française Mehad (ex-UOSSM). Il est présent sur le terrain depuis le début du séisme. Témoignage.

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Syrie tremblement de terre
 Des équipes de secours transportent le corps d'une victime d'un bâtiment détruit après un tremblement de terre dévastateur qui a secoué la Syrie et la Turquie, à Alep, en Syrie, mardi 7 février 2023.
© Omar Sanadiki/ AP
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Osama Al-Hussein

Osama Al-Hussein, coordinateur des programmes médicaux et humanitaires de l’UOSSM

TV5MONDE : comment se passent vos journées depuis le début du tremblement de terre ?
 

Osama Al-Hussein, coordinateur des programmes médicaux et humanitaires de Mehad (ex-UOSSM) : La situation est terrifiante. Les quartiers sont complètement dévastés. Les gens ne savent pas quoi faire ni où aller. Nous entendons constamment les sirènes des ambulances, les cris des personnes qui voient leurs maisons détruites et les appels au secours sous les décombres. Les médecins et les secouristes s'occupent des blessés en urgence, mais ils sont complètement débordés. Les gens sont désespérés et la plupart sont sans abri. On dénombre plus de 2 000 morts côté syrien ( 3000 morts selon un dernier bilan), 11 000 blessés et d'autres personnes en proie à une véritable panique.


Les habitants des États du nord-ouest de la Syrie souffrent depuis longtemps, mais cette fois à cause d'une catastrophe naturelle, un tremblement de terre dévastateur. Les mots des rescapés : "s'il vous plaît, que les temps difficiles s'éloignent de nous, il est temps pour nous de vivre en paix." Cette catastrophe sans précédent ne fait qu'aggraver une situation déjà dramatique dans la région (zone rebelle au cœur de la guerre qui ravage la Syrie depuis 2011, n.d.l.r).

À (re)lire : Le séisme, une occasion pour Damas de sortir de son isolement diplomatique ?

TV5MONDE : comment la recherche des survivants s'organise-t-elle ?

Osama Al-Hussein : Les Casques blancs, (les secouristes des zones rebelles en Syrie, n.d.l.r), sont en train de secourir les gens, par petites équipes, pour couvrir autant d'endroits que possibles et nous, les autres associations, nous devons être prêts pour les personnes qui seront dehors sans rien. Notre association, Mehad, s'est engagée à abriter les familles.
 

Qui sont les Casques blancs ? 

La Défense civile syrienne (ou Casques blancs) est une organisation humanitaire de protection civile formée pendant la guerre civile syrienne. L’une des tâches principales de ses membres est de porter secours aux civils après les bombardements. Ils sont couramment désignés sous le nom des "Casques blancs" en échos à ceux qu’ils portent pendant leurs interventions. 

L’organisation émerge de manière spontanée en 2013 à l’initiative de jeunes organisés en petites unités de quartier dans la région de Idleb, en Syrie, lourdement touchée par les bombardements. Elle devient officielle l'année suivante après le rassemblement de différents comités locaux. 

La démarche est saluée dans le monde entier. Ces héros nationaux sont rassemblés autour d'une devise qui provient du Coran : "celui qui sauve une vie, sauve l’humanité entière". Pourtant, ils sont ciblés en 2017 par une campagne de désinformation visant à discréditer les preuves de crimes qu'ils récoltent. Ils sont accusés par les Russes d’être liés à des mouvements pro-djihadistes.

Les Casques blancs affirment à ce jour avoir sauvé plus de 100 000 vies civiles et qu'au moins 252 de ses membres ont été tués.

TV5MONDE : comment aidez-vous les personnes une fois secourues ?

Osama Al-Hussein : Nous fournissons des kits NFI (bien de première nécessité non-alimentaire, comme de seaux, moustiquaires, nattes et de bâche n.d.l.r), des kits alimentaires, des couvertures et des services médicaux par le biais de cliniques et d'hôpitaux mobiles. 

Cependant, il y a une énorme pénurie de médicaments, de produits pharmaceutiques et d'abris. Première étape pour nous, nous devons collecter ce matériel avec votre soutien. 

Les besoins d'urgence les plus importants dans le Nord-Ouest de la Syrie. 

Des dons à Mehad et aux Casques blancs sur leurs sites web.

Des tentes pour abriter les familles qui ont perdu leur abri.
Des matelas et couvertures.
Des kits d'hivernage pour les familles touchées.
Des repas prêts à être consommés.
Des combustible de chauffage.
Un accès à des écoles et des instituts équipés pour héberger temporairement les personnes touchées.
Du pain fournis quotidiennement aux personnes touchées.

Du soutien aux hôpitaux et aux centres de don du sang pour soigner les blessés et sauver des vies.
Mise en place de dispensaires mobiles et distribution de fournitures médicales.
Des kits chirurgicaux.
Du pain fournis quotidiennement aux personnes touchées.
Du soutien psychosocial aux familles, aux enfants et aux femmes qui ont perdu leurs proches lors de la catastrophe.

Nous devons réhabiliter nos cliniques mobiles. Cela permettra de sillonner la région d'Idleb, la plus touchée par le tremblement de terre, afin d'offrir des consultations aux survivants des zones les plus reculées.Osama Al-Hussein, coordinateur des programmes médicaux et humanitaires de Mehad

Puis, nous devons faire la distribution et réhabiliter nos cliniques mobiles (des véhicules avec chauffeur, équipement médical, un professionnel de la santé, n.d.l.r). Cela permettra de sillonner la région d'Idleb, la plus touchée par le tremblement de terre, afin d'offrir des consultations aux survivants des zones les plus reculées. 

TV5MONDE : le tremblement de terre a également touché des camps de réfugiés. Où vont-ils ensuite ?

Osama Al-Hussein : Les camps d'Atmah et de Basinya (dans le sous-district de Salqin, district de Harim) sont les plus touchés. Néanmoins, d'autres villes comme Jendaris dans le district d'Afrin, Salqin, Harim et Idleb sont également sévèrement touchées. Les gens se rendent dans des abris temporaires, des lieux publics comme les écoles.

TV5MONDE : y a-t-il encore un espoir de retrouver des personnes sous les décombres plusieurs jours après ?

Osama Al-Hussein : Malheureusement, les équipes de secours ont commencé à perdre l'espoir. Mais elles continuent les recherches dans les décombres des bâtiments effondrés pour sortir les morts et espérer trouver quelqu'un en vie. 

En ce qui concerne l'aide internationale, Mehad et d'autres ONG ont demandé un soutien interne, mais jusqu'à présent, rien n'est parvenu jusqu'ici.
Osama Al-Hussein, coordinateur des programmes médicaux et humanitaires de l'UOSSM​

TV5MONDE : comment coordonnez-vous vos actions avec les autres associations et l'aide internationale ?

Osama Al-Hussein : Il y a une bonne coordination avec les ONG partenaires, les directions de la santé (dans le nord-ouest de la Syrie). En ce qui concerne l'aide internationale, Mehad et d'autres ONG ont demandé un soutien interne, mais jusqu'à présent, rien n'est parvenu jusqu'ici.

TV5MONDE : Vous êtes en zone syrienne rebelle, y a-t-il une pause dans les combats ?

Osama Al-Hussein : Depuis le tremblement de terre jusqu'à aujourd'hui, les bombardements ont cessé.