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Dans tous ses rapports l’Organisation internationale de la francophonie distingue "une francophonie du quotidien", (qu’elle place au sein de la planète "Naître et/ou vivre aussi en français") de celle "qui s’exprime dans des environnements où le français est exclusivement une langue étrangère".
Ainsi, selon l’OIF, les 36 pays de la planète "Naître et/ou vivre aussi en français" - où la langue est utilisée au quotidien - "concentrent à eux seuls près de 80 % des francophones du monde". Ils constituent donc "un ensemble déterminant pour l’avenir de la langue française".
Plus de 19 millions des "nouveaux francophones" résident dans cet espace dont la composante principale est africaine.
Mais c’est surtout sur le continent africain "que se joue l’avenir de la langue française". En effet, la croissance du nombre de francophones du quotidien est légèrement supérieure à celle enregistrée sur l'ensemble du monde, "mais elle représente surtout à elle seule 95 % de l’augmentation constatée". En d'autres chiffres, "plus de 19 millions des "nouveaux francophones" résident dans cet espace dont la composante principale est africaine".
Depuis 2018, le continent africain a gagné 2,5 points de pourcentage. Il confirme ainsi "sa place centrale dans la francophonie quotidienne et la dynamique qui le distingue des autres espaces". Cette croissance sur le continent est par ailleurs particulièrement due à l’Afrique subsaharienne dont les pays représentent "plus de 80% de la croissance francophone de cet espace".
Alors que le nombre de locuteurs quotidiens du français a progressé de 8% entre 2018 et 2022, il a bondi de plus de 15% dans l’ensemble Afrique subsaharienne-océan Indien.
Algérie, Andorre, Belgique (dont la fédération Wallonie-Bruxelles), Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Canada (dont Canada-Nouveau-Brunswick, Canada- Ontario et Canada-Québec), Comores, Congo, Congo (République démocratique du), Côte d’Ivoire, Djibouti, France (et ses territoires ultramarins), Gabon, Guinée, Guinée équatoriale, Haïti, Liban, Luxembourg, Madagascar, Mali, Maroc, Maurice, Mauritanie, Monaco, Niger, République centrafricaine, Rwanda, Sénégal, Seychelles, Suisse, Tchad, Togo, Tunisie, Vanuatu
Si le français a crû de 7% depuis 2018, sa croissance est plus lente que sur la période 2014-2018 (sa croissance était alors de 10%, ndlr).
Selon l'Organisation internationale de la Francophonie, il convient "face à cette évolution positive (...) de relever deux choses : la progression est partout légèrement inférieure à celle constatée entre 2014 et 2018 et elle masque des disparités certaines entre les pays".
La différence serait ainsi d'un point de pourcentage en Europe et en Océanie, de deux points dans les Amériques et en Afrique subsaharienne-océan indien. Enfin la différence serait de 10 points au Maghreb-Moyen-Orient.
Sur ce volet, l'Organisation internationale de la Francophonie conclut : "La langue française maintient sa présence, mais elle ne paraît pas creuser son avance. Si, sur le long terme, la part des francophones croît indéniablement, on doit constater qu’elle semble avoir atteint, certes assez rapidement (en une vingtaine d’années) une sorte de seuil. Partant de très bas, car, faut-il le rappeler, la période coloniale n’a que très faiblement contribué à la diffusion de la langue française parmi la population, le niveau de francophonie a spectaculairement augmenté, grâce à l’école".
En Algérie, la question linguistique fait régulièrement l'objet de débats. Si le statut officiel de l'arabe fait consensus, la place du tamazight (berbère), devenu langue officielle en 2016, et du français (qui n'est pas une langue officielle mais une langue d'usage), langue de l'enseignement scientifique et des affaires, héritée de l'ancienne puissance coloniale, soulève des polémiques sans fin.
Les enfants, qui ont repris le chemin de l'école le 21 septembre, démarrent désormais l'apprentissage de l'anglais dès la 3ème année de primaire, comme c'est déjà le cas pour le français, alors que jusqu'à présent ils ne le commençaient qu'au collège.
Interrogée par l'AFP pour savoir si les récents mouvements anti-France dans plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest pourraient entraîner un rejet de la langue française, Louise Mushikiwabo dit ne pas partager cet avis.
"La révolte qu'on voit dans la jeunesse francophone en Afrique vient d'un désenchantement politique", des "frustrations du quotidien" et vis-à-vis "de la classe dirigeante" et par extension de la France qui est l'ancien pouvoir colonial, déclare-t-elle. "Ce n'est pas du tout un rejet de la langue française".
"Ces pays ont investi énormément dans la langue française pour l'éducation, la communication", etc... "La langue française n'est pas prête à quitter le continent africain", juge-t-elle, appelant à une "réflexion" sur les crises qui secouent le monde francophone et la multiplication des coups d’État en Afrique de l'Ouest.
"Je pense que nos dirigeants ont besoin d'écouter beaucoup plus, de faire attention aux citoyens, c'est pour cela que nos programmes à l'OIF ont été recentrés et resserrés pour créer un impact sur les citoyens", indique-t-elle.
Au sommet de Djerba, un huis clos politique aura justement pour thème la "défiance citoyenne".
S’il est en progression dans le monde, le français est en recul au sein des organisations internationales. La Secrétaire générale de la Francophonie, Louise Mushikiwabo, s'est d'ailleurs exprimée sur ce point.
Interrogée par l’AFP, elle exhorte les États membres à "redoubler d’efforts" pour que la langue française, dit-elle, "continue d'occuper sa place".
C'est au niveau institutionnel qu'il faut redoubler d'efforts.Louise Mushikiwabo, Secrétaire générale de la Francophonie à l'AFP
"On se rend compte d'après nos rapports que dans les organisations internationales, il y a eu un recul" du français, argumente Louise Mushikiwabo. Or, "ce sont nos États qui siègent (...) et décident dans ces organisations et moi j'aimerais beaucoup les réveiller", relève-t-elle annonçant qu'elle lancerait un "appel" aux chefs d’État et de gouvernement des pays ayant le français en partage lors de leur 18ème sommet, samedi et dimanche (19 et 20 novembre, ndlr) à Djerba en Tunisie.
Ces chefs d’États seront alors appelés "à s'assurer de garder la langue française dans leurs instances internationales" et "dans l'enseignement au niveau des pays" notamment. Pour Louise Mushikiwabo, "c'est au niveau institutionnel qu'il faut redoubler d'efforts".
Dans son édition 2022 de "La langue française dans le monde", l’Organisation internationale de la Francophonie - qui cite aussi bien des organisations internationales que des observateurs externes - fait état d’une "dérive dans les pratiques linguistiques vers le non-respect du multilinguisme". L'OIF souligne que lors de réunions officielles, "l’usage d’autres langues que l’anglais (...)reste une exception".
Sur 103 entités distinctes inventoriées, pour l’année 2019, 45,6 % des recrutements n’exigeaient pas la connaissance de langues autres que l’anglais.
La langue française dans le monde, édition 2022.
Ainsi, "98,7 % des offres d’emploi exigent la connaissance de l’anglais, alors que le français enregistre une diminution de 1,2 point depuis 2017 (à 10,4 %). Seule une minorité d’avis de vacance de poste exigent l’anglais ou le français (68 avis de vacance de poste en 2019, soit 1,13 % du total).
Même tendance à Genève, ville pourtant francophone, "où le français n’était exigé que dans 14,9 % des avis de vacance de poste publiés en 2019 (soit une baisse de 13,6 % depuis 2017)". Enfin, sur "103 entités distinctes inventoriées, pour l’année 2019, 45,6 % des recrutements n’exigeaient pas la connaissance de langues autres que l’anglais".
Du côté de l’Union européenne, même constat. Louise Mushikiwabo, toujours à l’AFP, s’est dit "mécontente par rapport à l'Union européenne (...) où l'on voit que la tendance, même dans les documents écrits, est d'aller vers la facilité qu'offre l'anglais, alors que l'UE est le deuxième bloc le plus important à la Francophonie".
L'allemand, l'anglais,le bulgare, le croate, le danois, l’espagnol, l’estonien, le finnois, le français, le grec, le hongrois, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le suédois, le tchèque.
En ce sens, dans la 7ème édition de son rapport de suivi du Vade-mecum relatif à l’usage de la langue française dans les organisations internationales du mois d’octobre 2020, l’OIF relève "qu’entre 3,7 % (à la Commission européenne) et 12 % (au Parlement européen) seulement des documents produits ont pour langue source le français (qui est aussi la première langue cible des traductions). Cette proportion était de 34% en 1999.
Dans son rapport, l’OIF précise que sont aussi concernées d'autres organisations régionales ou internationales, telles que l'Union africaine, le Parlement europée et le Conseil de l'Europe.
Pour "faire reculer le recul du français", l’Organisation internationale de la Francophonie, en la personne de Louise Mushikiwabo, met en œuvre un certain nombre d’actions dont, "le dispositif de veille, d’alerte et d’action en faveur de la langue française et du multilinguisme dans les organisations internationales".
"En ce qui concerne l’anglais, sa place relative continue de se restreindre et passe de 30 % en 2017 à 25 % en 2021, même si les médias, s’appuyant sur des résultats fortement biaisés, par faute de considération sérieuse du multilinguisme, con- tinuent à annoncer des chiffres supérieurs à 50 %. En effet, l’Internet a considérablement changé dans les dix dernières années avec une entrée massive d’internautes de langues asiatiques et de l’arabe. Quant au pourcentage mondial de locuteurs anglophones connectés, il était estimé par l’Observatoire de la diversité linguistique et culturelle dans l’Internet, en 2007, à 32 %, et il est passé maintenant à 15 %".
Source : Gallimard/Organisation internationale de la Francophonie – "La langue française dans le monde", édition 2022.