Fil d'Ariane
Le 11 septembre 2020, Donald Trump, alors président des États-Unis annonce la normalisation des relations entre Bahreïn et Israël. Le 15, les Émirats et Bahreïn, qui n'ont jamais été en conflit avec Israël, signent officiellement à la Maison Blanche des accords de normalisation avec l'État hébreu. L'Autorité palestinienne dénonce également une "trahison".
Le 23 octobre, Donald Trump annonce que le Soudan et Israël sont "convenus de normaliser leurs relations". Le 10 décembre, Donald Trump annonce que le Maroc s'est engagé à normaliser ses relations avec Israël et que les États-Unis reconnaissent la souveraineté marocaine sur le territoire disputé du Sahara occidental. Le roi Mohammed VI confirme en qualifiant la décision de Washington sur le Sahara occidental de "prise de position historique".
La reconnaissance de l'État hébreu par l'Égypte en 1978 n'a pas débouché sur une réelle coopération militaire et économique entre les deux pays. Ce n'est pas le cas avec les Émirats arabes unis et surtout le Maroc dans leur nouvelle relation avec Israël. Un an après la normalisation de leurs relations diplomatiques, Abou Dhabi et Tel Aviv ont signé plus de 60 protocoles d'accord d'une valeur de 700 millions de dollars. Plus de 200 000 Israéliens se sont rendus en un an dans les Émirats. Le contenu des accords de coopération entre Tel Aviv et Rabat sont encore plus spectaculaires.
Lire : le Maroc et Israël signent un accord de coopération sécuritaire
Le Maroc et Israël concluent le 24 novembre 2021 un accord de coopération sécuritaire "sans précédent" lors d'une visite historique à Rabat du ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, en pleine tension entre le royaume chérifien et son voisin algérien.
Lire : pourquoi les visites diplomatiques d'Israël se multiplient au Maroc ?
Ce protocole le premier du genre avec un pays arabe, selon la partie israélienne, facilite alors l'acquisition par le Maroc de technologies de la puissante industrie militaire d'Israël. L'État hébreu est l'un des principaux exportateurs au monde de drones armés et de logiciels de sécurité comme le très controversé Pegasus de la société NSO. Le Maroc a toujours nié l'achat de ce logiciel espion. Cette coopération en matière de défense intervient au moment où les tensions sont grandes entre Rabat et Alger notamment sur la question du Sahara occidental.
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Les deux pays sont engagés dans une course à l'armement. Rabat a porté à plus de 4, 3 milliards de dollars son budget militaire. Alger vient d'annoncer un doublement de son budget militaire de 10 à 20 milliards de dollars. Les deux pays ont rompu leur relation diplomatique le 24 août 2021. Alger accuse alors Rabat et des "agents israéliens", sans élements de preuves, d'être derrière les incendies qui ont alors ravagé la Kabylie durant l'été 2021.
Voir : Algérie : Incendies meurtriers
Alger est resté de son côté un farouche soutien des Palestiniens. Le gouvernement algérien a parrainé à la mi-octobre un accord de réconciliation entre factions palestiniennes rivales, même si les chances de le voir se concrétiser sur le terrain paraissent faibles. Alger peut aussi compter sur le soutien diplomatique de la Tunisie ou du Liban. Mais la position algérienne semble de plus en plus isolée au sein de l'organisation régionale
L'Arabie saoudite a toujours, pour sa part, lié la reconnaissance d'Israël à la résolution du conflit israélo-palestinien mais ces derniers mois les signes de rapprochement entre les deux pays se sont multipliés. En mars dernier, dans un entretien au journal américain The Atlantic, le prince et dirigeant de facto du pays, Mohammed ben Salmane a parlé d'Israël comme d'un "allié potentiel", soulignant des intérêts communs entre les deux États.
L'Arabie saoudite autorise alors l'ouverture de son espace aérien aux avions civils israéliens. Les deux pays ont un adversaire stratégique commun, l'Iran. Israël a accordé de son côté à l'Arabie saoudite la souveraineté des îlots de Tiran et de Sanafir en mer Rouge. Le Qatar lui réfléchit à l'ouverture d'un bureau consulaire israélien sur son territoire à l'occasion de la Coupe du monde de football.
En moins de trois ans la solidarité de facade au sein des pays membres de la Ligue arabe vis- à-vis de la cause palestinienne a disparu.
Qu'est ce que la Ligue arabe ?
La Ligue arabe est fondée en 1945 au Caire. Elle ne compte à l'époque que six pays. En 2022, elle compte 22 membres dont l'Autorité palestienne. Elle est une organisation régionale au statut d'observateur auprès de l'ONU. Son siège est au Caire et son Secrétaire général est l'Égyptien Ahmed Abou al-Gheït, ancien ministre des Affaires étrangères, un proche du maréchal Al-Sissi. En 1945, l'action de la Ligue arabe et de ses six pays fondateurs (Égypte, Arabie saoudite, Irak, Jordanie, Liban et Syrie) est de lutter contre l'ingérence des anciennes puissances coloniales que sont la France et le Royaume-Uni.
À partir de 1948, Israël est considéré comme un État illégitime, une entité exogène au monde arabe. La relation avec l'État hébreux va continuellement marquer l'histoire de la Ligue arabe. La ligue arabe à partir des années 1950 n'est plus un bloc homogène. Une division s'opère entre les pays proches de l'Union soviétique que sont la Syrie, l'Algérie ou l'Égypte et les membres proches des États-Unis comme le Maroc, l'Arabie saoudite ou la Jordanie. En 1978, l'Égypte signe les accords de Camp David et reconnaît l'existence d'Israël. Les pays membres de la Ligue arabe excluent l'Égypte de l'organisation régionale en 1979. Le pays sera réintégré en 1989.
En 2012 la Ligue arabe décide d'exclure la Syrie de l'organisation régionale. En plus de 70 ans d'existence la Ligue arabe n'aura jamais réussi a peser sur les affaires du monde arabe et sur la résolution du conflit israélo-palestinien. Les divisions des pays membres témoignent des alliances et des rapports de force au sein du monde arabe.