Fil d'Ariane
Chaque année depuis 2019, le Sommet des jeunes activistes (#YAS22) prime six jeunes lauréats des quatre coins du monde qui se battent pour un monde plus inclusif et solidaire. Construction d’un orphelinat en RDC, écoles pour les filles en Afghanistan ou encore lutte contre le racisme en Afrique du Sud… On vous présente ces jeunes qui font bouger les lignes.
Pashtana Durrani a 24 ans. Jusqu’à l’année dernière, elle était étudiante à l'Université américaine d'Afghanistan et menait une vie de jeune femme tout à fait normale. Une vie qui a changé du tout au tout lorsque les talibans ont repris le pouvoir, le 15 août 2021. « Un jour, des hommes ont pris le contrôle de mon pays et on m'a dit que je n’avais plus le droit d’aller à mon bureau ou à l'université, que je ne pouvais plus prendre l'avion sans un accompagnant masculin et que je n’avais plus le droit de quitter mon pays », raconte-t-elle. « C'est ça la vie d’une fille aujourd'hui en Afghanistan ».
Mais pour Pashtana, pas question de se laisser abattre. La jeune femme, fondatrice de LEARN Afghanistan, un réseau d'écoles pour filles qui propose notamment des enseignements en science, technologie, ingénierie et mathématiques (STEM), a transformé son organisation en mode clandestin, pour continuer à offrir une éducation aux jeunes afghanes. « Nous faisons donc en sorte que les filles soient capables de se mettre à leur compte une fois qu'elles sont diplômées de notre programme », explique Pashtana. « Cela les aide à devenir la personne qui a le pouvoir de prendre les décisions dans leur propre famille ». Environ 120 jeunes filles suivent les cours prodigués par LEARN.
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Keely Cat-Wells est la fondatrice de C-Talent, une agence de talents qui promeut les artistes en situation de handicap et fait évoluer les mentalités grâce au divertissement. Son agence a notamment travaillé sur des projets d’inclusion avec Savage X Fenty, HBO, Hulu, About-Face, Disney, Google Pixel, Subaru, Nike. « La plupart du temps, c'est un processus de sensibilisation : beaucoup de gens ne savent pas parce que les personnes handicapées ont été malheureusement tellement invisibles dans la société » explique la jeune femme.
À 26 ans, l’Américaine choisit de revendiquer son propre handicap pour faire passer un message : « Ce n'est pas à cause de ma condition médicale que je suis handicapée, mais à cause de la société dans laquelle nous vivons. Si nous déchargeons l'individu de sa responsabilité, c’est-à-dire que ce n'est pas nous qui ne fonctionnons pas mais le système, les entreprises et le public pourront ainsi commencer à comprendre et seront capables de prendre les mesures nécessaires pour changer les choses. »
Sameer Jha a 21 ans et son action se concentre sur la création et la promotion d’espaces d’apprentissage sûrs pour les étudiants LGBTQ+ aux États-Unis. Lui-même victime de harcèlement à l’école car jugé trop efféminé, il a fondé l’Empathy Alliance à l’âge de 14 ans, pour lutter contre les discriminations subies par les personnes LGBTQ+ au cours de leur scolarité.
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Cette population est particulièrement discriminée aux États-Unis, où plusieurs États ont adopté des lois interdisant les enseignements en lien avec le genre, voire interdit aux élèves trans de pratiquer des activités sportives au cours des derniers mois. « Mon message principal est le suivant : vous avez forcément des étudiants LGBTQ+ dans vos classes. Les statistiques disent que 21% de notre génération s'identifie comme LGBTQ+. Même si vous ne le savez pas, ils et elles existent, alors assurez-vous de créer un espace qui les soutienne pour qu'ils et elles se sentent inclus·es » plaide Sameer.
Zulaikha Patel est Sud-Africaine et elle lutte contre le racisme au sein de son pays, encore profondément marqué par l’héritage de l’apartheid. Dès l’âge de 13 ans, elle a mené des manifestations contre la politique raciste de son école, qui discriminait les étudiants noirs : « Ce qui m'a poussée à commencer à organiser ces manifestations, c’est qu’on nous forçait à nous assimiler à ce que nous n'étions pas. On nous disait que nous ne pouvions pas porter nos cheveux comme ils poussent naturellement, que nous ne pouvions pas parler dans nos groupes d’amis dans nos langues africaines.
« C'est devenu une guerre contre notre identité, nous avons été forcés d'effacer notre identité noire, et cela m'a poussé à faire quelque chose » explique la jeune femme. Un combat pour son identité qui l’a aussi poussée à écrire un livre pour enfant, My Coily Crowny Hair, pour célébrer les cheveux afro.
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C'est Prévu Emmy Lusila veut offrir un meilleur avenir aux enfants des rues en République démocratique du Congo. C’est pour porter cette vision qu’elle a fondé l’orphelinat La Maison des Anges, à Kinshasa, alors qu’elle avait tout juste 18 ans. « On essaye d’en parler, de montrer aux gens que c’est l’avenir ces enfants. On ne sera pas seulement en train d’aider les enfants, mais d’aider le monde parce que l’avenir va dépendre de ces enfants. S’ils ne sont pas éduqués, s’ils ne vont pas à l’école et qu’ils sont dans la rue, c’est un déséquilibre. Le monde n’a pas besoin de ça », estime la jeune femme.
Cinq ans après sa création, La Maison des Anges accueille 13 enfants quotidiennement, un accomplissement dont C’est Prévu est fière : c’est une preuve que n’importe qui peut avoir un impact. « On ne doit pas forcément être député, quelqu’un d’important pour défendre de vraies causes. On veut être la preuve vivante qu’on peut être jeune, et se battre pour les autres jeunes. »
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Sebastián Benfeld est Chilien, et son combat, c’est la protection de l’environnement. Avec Escazu Ahora, mouvement qu’il a cofondé, cet étudiant en journalisme milite pour un environnement sans pollution et pour la protection des défenseurs de l'environnement. « Ma région est la plus polluée de tout le pays », raconte le jeune homme. « Cela a eu des effets désastreux sur la santé des enfants. Il y a du soufre et de l'arsenic dans leurs poumons. Ils ont le cancer à un âge de plus en plus précoce, et cela va à l'encontre des droits des personnes vivant dans la région. Ce que nous essayons de faire, c'est de donner aux gens les moyens de se défendre et de défendre leurs droits ».
Un combat d’autant plus important et complexe car l'Amérique latine est la région du monde la plus dangereuse pour les défenseurs de l’environnement selon un rapport de Global Witness : l’ONG souligne l'augmentation rapide du nombre de défenseurs de l'environnement tués ces dernières années dans la région, alors même que l’urgence climatique est plus pressante que jamais.