Fil d'Ariane
La Suisse accueille samedi 15 et dimanche 16 juin un sommet conçu comme un "premier pas" pour trouver la voie vers la paix en Ukraine. Des dizaines de hauts dirigeants sont attendus, mais pas la Russie, ni a priori la Chine.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, à droite, et le président suisse Ignazio Cassis participent à une conférence de presse après leur rencontre à Kiev, Ukraine, jeudi 20 octobre 2022.
"Nous osons parler de paix", a lancé le ministre suisse des Affaires étrangères, Ignazio Cassis, en présentant lundi aux médias le programme du rendez-vous prévu en Suisse du 15 au 16 juin. Intitulé "Conférence de haut niveau sur la paix en Ukraine", se déroulera dans la foulée de la réunion du G7, de jeudi à samedi, dans le sud de l'Italie, avec la participation aux deux rencontres du président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Les dirigeants du G7 espèrent parvenir à un accord sur l'utilisation des intérêts provenant des avoirs russes gelés pour aider l'Ukraine, visée depuis février 2022 par une offensive russe meurtrière.
Le président Zelensky rejoindra ensuite en Suisse les représentants de plus de 90 États et organisations, dont le président français Emmanuel Macron, la vice-présidente américaine Kamala Harris, le chancelier allemand Olaf Scholz ou le Premier ministre japonais Fumio Kishida.
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"La conférence est un premier pas", a souligné Ignazio Cassis, mais "il n'y aura pas de processus de paix sans la Russie. La question n'est pas si la Russie sera à bord mais quand".
Berne n'a pas invité la Russie. Moscou a fait savoir qu'elle n'était pas intéressée car elle considère que la Suisse a perdu sa neutralité en s'alignant sur les sanctions européennes.
Le Kremlin a déclaré à plusieurs reprises qu'il ne participerait à aucune négociation si Kiev n'acceptait pas l'annexion par la Russie des quelque 20% du territoire ukrainien qu'elle occupe actuellement.
"Nous aimerions développer (...) une feuille de route sur la manière dont les parties peuvent se réunir dans le cadre d'un futur processus de paix", a affirmé la présidente suisse, Viola Amherd, dont le pays plaide pour la mise en place de "mesures de confiance".
Parmi les membres du groupe des Brics (cinq pays émergents) dont fait partie la Russie, seule l'Inde a confirmé publiquement sa participation. La Chine et le Brésil jugent difficiles d'y être sans Moscou et la participation de l'Afrique du Sud reste incertaine.
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La conférence se tient alors que les forces russes ont obtenu leurs gains territoriaux les plus importants en 18 mois en Ukraine. Avec l'assaut terrestre majeur contre la région de Kharkiv qu'elles ont lancé le 10 mai dernier, la Russie a réussi à s'emparer de plusieurs villages frontaliers et a forcé des milliers de personnes à fuir.
L'armée ukrainienne, en manque de munitions et d'hommes, est à la peine. Le retard pris dans la livraison de l'aide militaire occidentale est notamment en cause.
En Suisse, les autorités sont pour leur part sur leurs gardes face à l'éventualité de cyberattaques pendant le sommet, alors que "leur nombre a massivement augmenté ces dernières semaines", selon Ignazio Cassis.
L'objectif du sommet, demandé par Kiev, est d'"inspirer un futur processus de paix", mais l'issue de la rencontre reste incertaine. "Il est très important d'éviter d'avoir des attentes exagérées", a prévenu une source gouvernementale allemande.
L'Ukraine espère obtenir un large soutien international en exposant les conditions qu'elle estime nécessaires pour mettre fin à la guerre. La conférence s'appuie en particulier sur le plan de paix en dix points du président ukrainien, avec pour objectif d'établir les moyens de parvenir à "une paix juste et durable".
"Nous allons mener des discussions approfondies sur des thèmes essentiels pour l'Ukraine et le monde : situation des prisonniers de guerre, menace nucléaire et sécurité alimentaire", a indiqué Ignazio Cassis.
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Selon le porte-parole du ministère suisse des Affaires étrangères, Nicolas Bideau, ce ne sont pas ses compatriotes qui vont "diriger" les discussions thématiques mais "des pays du Sud global" ou ceux ayant "des compétences" en la matière.
Ces thèmes "ne sont pas les plus délicats mais ils sont néanmoins importants", a dit à l'AFP le directeur de l'institut de recherche Swisspeace, Laurent Goetschel.
"S'il s'avère possible de générer un suivi, le traitement de ces thèmes conjointement avec des participants russes pourrait faciliter l'établissement d'une base de confiance pour des négociations de paix futures", a-t-il ajouté.