SOS Méditerrannée, CALM : les aides humanitaires qui se passent des Etats

L'ONG SOS Méditerranée a permis de sauver des centaines de vies grâce à son navire Aquarius. CALM permet à des particuliers d'accueillir des réfugiés chez eux. L'aide humanitaire ne serait-elle plus la priorité des gouvernements ?
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Aquarius - cc
(cc/Wikipedia/Ra Boe)
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3800 morts par noyade en Méditerranée pour la seule année 2015. 3800 femmes, hommes, enfants qui fuyaient les guerres, la misère, ont perdu la vie dans des conditions effroyables, à quelques encablures des côtes européennes.

Les gouvernements de l'Union, face à ce flux migratoire sans précédent, se sont affrontés, non pas pour savoir comment empêcher ces morts, mais pour décider comment protéger les frontières du marché unique de ces populations, ou comment répartir celles déjà arrivées, voire en refouler une partie vers la Turquie. Face à ce constat, SOS Méditerranée (une association fondée en 2015 par un groupe de citoyens européens décidés à agir face à la tragédie des noyades à répétition en mer Méditerranée), en partenariat avec Médecins du Monde, a affrété un navire, l'Aquarius, pour venir au secours des migrants en détresse.

L'Aquarius est parti du port de Marseille le 20 février (voir notre sujet "Aquarius, le navire qui part sauver les migrants en Méditerranée") et indique — lors de son dernier sauvetage de 122 personnes, le 24 avril 2016 — avoir permis à 917 personnes d'échapper à la mort en mer depuis son départ.

Le financement de l'Aquarius est entièrement assuré par des dons privés — d'Européens pour la plupart — et sans aucune aide des Etats. La vidéo explicative de la mission de l'Aquarius souligne que 11 000 euros sont nécessaires, par jour, pour en assurer le fonctionnement :

CALM : un Airbnb solidaire des migrants

La crise migratoire en cours révèle un certain désintérêt des gouvernements dans l'aide humanitaire et force la société civile à inventer ses propres solutions. Le réseau CALM (Comme à la maison) "d'hébergement citoyen" de réfugiés, de l'association Singa, est un exemple frappant d'un relais humanitaire et social des administrés français, afin de pallier le manque d'engagement de l'Etat. Une sorte de "AirbnB solidaire des migrants" :

"CALM est un réseau d’accueil temporaire qui permet une immersion de 1 mois à 9 mois dans un foyer. Le dispositif CALM met en relation des personnes réfugiées mal logées ou sans domicile fixe et des particuliers. Pour cela, il s’appuie sur une communauté grandissante de citoyens souhaitant s’engager sur l’accueil des réfugiés et, à terme, sur une plateforme web qui permettra un impact plus important. Ce dispositif doit répondre, au-delà de l’hébergement, au besoin important et grandissant d’inclusion socio-professionnelle des personnes réfugiées en France".

Extrait du site SINGA,  "(…) pour favoriser l’émergence d’espaces et d’outils de rencontre, d’échange et de collaboration entre les personnes réfugiées et leur société d’accueil (…) "


L'initiative "Welcome" du Service des Jésuites de France, permet elle aussi de mettre en relation des réfugiés et des familles. Le principe n'est pas d'accueillir des personnes sur une durée établie, mais plutôt d'offrir l'hospitalité, le temps d'un repas ou d'un week-end, à des demandeurs d'asiles. "Welcome" propose d'échanger, de permettre de nouer des relations entre personnes étrangères en situation difficile, et des Français. D'autres organisations religieuses, en France et en Europe participent à l'aide et l'accueil des migrants demandeurs d'asile.

Ces initiatives d'aides humanitaires, financées sans le recours aux aides publiques, semble se développer de façon croissante. La majorité des gouvernements européens refusent d'utiliser l'argent public pour l'aide aux demandeurs d'asile, et laissent — en fin de compte — leurs concitoyens financer ou mettre en œuvre seuls des solutions, ouvrant la voie à de nouvelles formes d'entraides. Moins désincarnées et certainement plus actives. Avec la garantie — au final —que l'aide procurée… soit à la hauteur des besoins réels des personnes. Ce que l'Etat, absent ou désincarné, ne sait pas, ou plus faire.