Suisse : “Non“ à une nouvelle limitation de l'immigration
Les électeurs suisses ont massivement refusé dimanche de limiter encore davantage leur immigration lors d'une votation proposée au nom de la protection de l'environnement, selon les résultats officiels de cette consultation.Quelque 74% des Suisses ont dit "non" à l'initiative de l'organisation Ecologie et population (Ecopop), qui affirme vouloir lutter contre la surpopulation.
Un panneau dans le vieux Fribourg appelle à voter le 30 novembre 2014
(Photo Fabrice Coffrini. AFP)
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Un "non" massif et bien net. Quelque 74% des Suisses ont donc dit "non" à l'initiative de l'organisation Écologie et population (Ecopop), qui affirme vouloir lutter contre la surpopulation. Les Suisses ont aussi nettement refusé les deux autres textes sur lesquels ils étaient consultés, à savoir la suppression des forfaits fiscaux réservés aux millionnaires étrangers, et la hausse des réserves d'or de la Banque nationale suisse. La suppression des forfaits fiscaux a été refusée par 60% des Suisses, et les achats d'or par 78% d'entre eux. Sur le site du journal "Le Matin" , le conseiller d'Etat vaudois Pascal Broulis, le chef des finances cantonales, s'est dit "soulagé" du rejet de l'initiative pour l'abolition des forfaits fiscaux. Il précise : "Il était naïf de croire que les riches contribuables étrangers seraient restés» en Suisse. L'enjeu global pour la Suisse avoisinait le milliard de francs. Les cantons suisses ont joué le jeu, ils sont restés respectueux les uns des autres. Cela garantit la cohésion». Le canton de Vaud, pionnier des forfaits fiscaux, risquait de perdre quelque 200 millions de francs. Autre réaction, celle de la déception côté syndicats. L'Union syndicale suisse (USS) écrit, qu'en refusant la suppression des forfaits, "on a malheureusement raté l'occasion de garantir un peu plus de justice fiscale". Le conseiller national Jean Christophe Schwaab (PS/VD) s'est déclaré "évidemment déçu", mais il se console grâce au bon score. "Il est largement supérieur à la force électorale de la gauche", estime-t-il. Le chef du groupe aux Chambres fédérales Andy Tschümperlin (SZ) a annoncé que le parti va lancer d'autres initiatives pour plus d'équité fiscale. Même son de cloche du côté des Verts, qui continueront à lutter pour l'équité et la durabilité. Car aux yeux des écologistes, "la sous-enchère fiscale nuit à la réputation de la Suisse et contribue à un type de croissance qui n'est pas durable".
La Banque Nationale Suisse stocke 30% de ses réserves d'or à l'étranger
Paul J. Richards (AFP)
Tous les trois mois, les Suisses votent sur des sujets divers, et ce dimanche, ils devaient se prononcer sur ces trois textes, très surveillés par la communauté internationale du fait de leurs répercussions à l'étranger. Les sondages avant les votations avaient prédit un refus pour les trois textes, mais l'ampleur du "non" a dépassé les estimations. Le texte Ecopop était soumis à votation dix mois après le vote du 9 février dernier, par lequel les Suisses avaient dit "oui" à "l'arrêt de l'immigration de masse". Ecopop souhaitait limiter le solde migratoire annuel du pays à 0,2% de la population (environ 16.000 personnes), contre 83.000 actuellement, au nom de la protection de l'environnement et pour mettre fin au bétonnage du pays. Il prévoyait aussi que la Suisse consacre 10% de son aide au développement à des mesures de contrôle des naissances dans les pays du Sud. "Ce texte était mal rédigé et maladroit", a reconnu dimanche l'un de ses initiateurs Philippe Roch, un ancien haut-fonctionnaire suisse à la retraite. De son côté, un autre responsable de l'initiative en Suisse alémanique s'est déclaré "attristé" par le fait que "l'argent a prévalu sur la nature". Les opposants au texte avaient en effet prédit un effondrement de la prospérité de la Suisse si l'initiative d'Ecopop était acceptée par les Suisses. En février dernier, les Suisses avaient voté à la surprise générale une initiative de l'UDC (droite populiste), qui demandait le rétablissement de quotas et contingents pour limiter l'immigration du pays dans un délai de 3 ans. Considérée à l'étranger comme un îlot de prospérité avec peu de chômage, la Suisse attire de nombreux étrangers qui rêvent de s'y installer et d'y travailler. L'initiative Ecopop avait reçu samedi le soutien du parti d'extrême droite français, le Front national. Le scrutin sur les forfaits fiscaux, combattus au nom de "l'équité" par la gauche, concernait 5.729 riches étrangers qui préfèrent payer un total d'un milliard de francs suisses (830 millions d'euros) d'impôts négociés en Suisse plutôt que les taxes dans leur pays. La 3ème initiative qui voulait obliger la Banque nationale à conserver un minimum de 20% de ses avoirs en or, a aussi été massivement rejetée par les Suisses. Mais selon l'élu genevois Yves Nidegger (UDC), le texte a au moins eu une conséquence positive : "nous avons enfin obtenu des informations sur les endroits où se trouve l'or de la BNS, alors que cette information semblait taboue auparavant". La BNS stocke 30% de ses réserves d'or à l'étranger, notamment en Grande-Bretagne et au Canada.