Fil d'Ariane
Procureur, avocats, témoins, parties civiles, médias internationaux annoncés en masse: il devrait y avoir foule, ce lundi 12 octobre, à l’ouverture du procès d’Hervé Falciani devant le Tribunal pénal fédéral à Bellinzone. Mais l’accusé, lui, devrait rester obstinément absent.
L’ex-informaticien de la banque HSBC à Genève a fait savoir par son avocat, Me Marc Henzelin, qu’il bouderait ses juges suisses. L’homme qui a fait plier le secret bancaire en livrant à la France le nom des trois quarts environ des clients privés de son employeur, selon les chiffres cités par l’acte d’accusation, dit n’avoir qu’une confiance relative dans la justice helvétique.
La Suisse est bien seule en effet à lui reprocher ses actes. Et si Hervé Falciani, qui vit en France, ne vient pas de son propre chef, il n’y a pas moyen de le faire amener de force. Car la France – tout comme la Suisse d’ailleurs – n’extrade pas ses propres ressortissants.
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Souvent traité en héroïque lanceur d’alerte hors de Suisse, il n’est, aux yeux de la justice helvétique, que l’auteur de la plus grosse affaire de vol de données bancaires. Il ne conteste pas la plupart des faits. Accusé d’espionnage économique, de violation du secret bancaire et commercial et de soustraction de données, il risque la prison ferme. Et pourrait être arrêté immédiatement s’il venait à l’audience.
Mais celle-ci risque d’être brève, lundi, s’il ne se présente pas. Le président pourrait être contraint de lever rapidement l’audience en convoquant à nouveau tout le monde pour le lundi 2 novembre. Le temps d’adresser une deuxième citation à l’accusé, comme l’exige le code de procédure pénale. Après quoi, si Hervé Falciani ne comparaît toujours pas, le tribunal pourra le juger par défaut.
Une autre hypothèse est néanmoins sur la table. La cour pourrait décider de passer tout de suite, dès le 12 octobre, à la seconde phase, Hervé Falciani ayant d’ores et déjà clairement manifesté son refus de comparaître.
Comme pour narguer ses juges, il va participer, le 28 octobre, à une conférence de presse organisée sur territoire français, à Divonne, en marge des 4èmes Assises du journalisme de Genève. Ce ne sera pas le premier pied de nez de l’accusé à la justice. Interpellé à Noël 2008 par le Ministère public de la Confédération, l’homme avait su mettre suffisamment en confiance la procureure Laurence Boillat, alors chargée du dossier, pour qu’elle le laisse rentrer chez lui, à Genève, avec la promesse de revenir le lendemain. Hervé Falciani en a profité pour passer immédiatement en France, où ses informations intéressaient au plus haut point le fisc français.
Les Suisses ont alors lancé un mandat d’arrêt international et réussi à le faire arrêter lors d’un de ses déplacements à Barcelone. Las, la procédure d’extradition devait rester sans succès. Convaincue, après la France, de l’intérêt des fameux fichiers de l’ex-informaticien de HSBC, l’Espagne a refusé de le livrer.
Article paru sur le site du journal Le Temps