Syrie : Bassel Khartabil, le militant du logiciel libre a été exécuté en prison en 2015

Bassel Khartabil, plus connu sous le pseudonyme de Bassel Safadi, a été exécuté  en prison par le régime syrien en 2015. Son crime ? Avoir ouvert un laboratoire de recherche informatique et participé à de nombreux projets open-source internationaux dont le Wikipedia arabe. 
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Bassel
Photo de Bassel Safadi, sur le site de creativecommons.fr alors que ses responsables demandaient sa libération le 18 octobre 2015.
Bassel Safadi CC
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C'est Nouara Safadi, l'épouse de Bassel, qui a annoncé son décès, ce mardi 1er août 2017 sur sa page Facebook :  "Les mots me viennent difficilement au moment où je m'apprête à annoncer la confirmation de la peine de mort et l'exécution de mon mari Bassel Khartabil Safadi". L'exécution a eu lieu à l'automne 2015, date depuis laquelle plus personne de l'entourage de l'informaticien n'avait de nouvelles de lui. Bassel Safadi avait été arrêté en 2012, un an après le début du printemps de Damas.

Un militant de "l'Internet ouvert"

Ce jeune informaticien, né en 1981 en Syrie et diplômé de l’université de Riga en Lettonie, s'est très vite passionné pour le développement de logiciels libres. Partisan de "l'Open Internet", Bassel travaille très tôt — courant des années 2000 — pour un institut syrien de recherche archéologique et artistique, et se retrouve chef d'équipe du Creative Commons syrien (www.creativecommons.org). Il a aussi collaboré au développement de Mozilla Firefox (www.mozilla.org), de Wikipedia en arabe (www.wikipedia.org), Openclipart (www.openclipart.org), Fabricatorz (www.fabricatorz.com), et Sharism (www.sharism.org).

Je peux vous dire combien les régimes autoritaires sentent les dangers que la technologie représente pour eux pour se maintenir en place.Bassel Safadi aux équipes de l'EFF (Electronic Frontier Foundation)

C'est en 2010 qu'il décide très logiquement d'ouvrir le premier hacker space de Syrie, Aiki Lab, un lieu de recherche en informatique. Lors de la soirée de lancement du hacker space à Damas, l’ancienne patronne de Mozilla,  Mitchell Baker, et le futur directeur du Media lab du MIT, “Joi” Ito, seront présents, exprimant ainsi une reconnaissance internationale du travail accompli par Bassel. 

Le "crime" du partage de connaissances technologiques

Les services de renseignements syriens arrêtent Bassel Safadi en mars 2012 lors des vagues de répression contre les manifestants, alors que les réseaux sociaux ont été débloqués par le régime pour pouvoir mieux repérer les dissidents. A cette époque, comme tous les spécialistes le précisent, la sécurité informatique n'est pas un sujet en Syrie. Et c'est justement là que Bassel Safadi est actif : expliquer aux internautes syriens comment protéger leurs ordinateurs contre la surveillance d'Etat, comment mieux sécuriser leurs liaisons internet. C'est pour cette activité de partage de connaissance technologique que Bassel est parmi les premiers "activistes d'Internet" à être arrêté. 

C'est la compétence et la technophilie de Bassel Safadi qui le mènent à sa perte, face à un régime aux abois et prêt à tout pour faire taire toute contestation. Bassel a été détenu dans une prison du renseignement militaire pendant près d'un an, torturé dans la prison de Sadnaya et finalement transféré à la prison d’Adra où ses proches iront — sous contrôle — de façon irrégulière, le visiter. Jusqu'à qu'ils n'aient plus de nouvelles de lui. Et pour cause : l'exécution de novembre 2015 n'a été connue qu'il y a quelques jours. Un échange que le militant du logiciel libre a réussi à  avoir avec les équipes de l'association américaine Electronic Frontier Foundation, lors de son internement à la prison d'Adra, résonne aujourd'hui comme un appel posthume pour tous les activistes et défenseurs du net : "Je peux vous dire combien les régimes autoritaires sentent les dangers que la technologiereprésente pour eux pour se maintenir en place. Et ils devraient avoir peur de ça, sachant que le code informatique est bien plus que de simples outils (…) Je suis en prison, mais je sais qu'il y a encore de milliers si ce n'est des millions de mains et d'esprits à l'extérieur, écrivant du code, pratiquant le hacking, et ils continueront à le faire, quoi que fassent ces régimes autoritaires pour stopper ce mouvement."

En 2012 et 2013, une campagne internationale pour demander la libération de Bassel avait eu lieu,  FreeBassel, avec le soutien de prestigieuses organisations dont Amnesty International et l’Electronic Frontier Foundation.