Téléphone mobile : les constructeurs peuvent-ils encore innover ?

Alors que se referme le Mobile World Congress 2017 (MWC), le grand salon mondial de la téléphonie mobile, un constat : aucune des nouveautés annoncées ne viendra révolutionner le marché. Les constructeurs de smartphones semblent avoir du mal à trouver l'innovation qui fera la différence.
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Chaque année, c'est la grand-messe du secteur de la téléphonie mobile. Le salon de Barcelone attire presque tous les grands fabricants de smartphones, ces téléphones mobiles dits "intelligents". A l'exception d'Apple qui préfère organiser ses propres événements, les Samsung, Huawei, LG, Nokia ou Sony se sont à nouveau retrouvés au Mobile World Congress du 27 février au 2 mars 2017.
 
MWC2017
Le Mobile World Congress 2017 à Barcelone
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Le numéro un mondial, Samsung, a déçu : la dernière mouture de son modèle phare ne sera présenté que le 29 mars. Le constructeur s'est contenté de dévoiler une nouvelle tablette, la Galaxy Tab S3. 

Pour les autres, il s'est agi non pas de présenter un appareil innovant mais bien d'améliorer les caractéristiques déjà existantes de leurs précédents produits. Les constructeurs en sont réduits à proposer deux optiques photos au lieu d'une, à s'allier avec des grands noms de la photographie, à agrandir la taille des écrans (le LG G6 a été le plus remarqué avec un écran presque sans bordure), à faire disparaître un bouton ou une prise casque, à renforcer les capacités des processeurs.

Pire, la sensation de ce MWC 2017 aura été un vieux téléphone. Nokia a présenté une version modernisée du "3310", un produit commercialisé initialement dans les années 2000 et qui s'était écoulé à 126 millions d'exemplaires. En trois jours, 10 000 articles de presse ont été écrits sur ce modèle, selon le fabricant. La vedette en 2017 est donc un téléphone incapable d'envoyer des courriers électroniques ou de prendre une photo.  
 
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Présentation du Nokia 3310, réédition d'un modèle commercialisé dans les années 2000.
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Alors les smartphones ont-ils atteint un plafond de verre technologique ? L'industrie attend en fait la prochaine révolution. Et elle viendra, selon Olivier Frigara, journaliste au magazine iCreate : "Le vrai schisme, selon lui, a été le lancement de l'iPhone il y a 10 ans, avec l'interface tactile multipoints, qui a fait que n'importe qui pouvait utiliser un téléphone intelligent et pas seulement les "geeks". Depuis, il y a eu des améliorations - certaines majeures- mais par petits bouts. Il n'y a pas des révolutions tous les ans." Pour le journaliste spécialisé, la prochaine rupture viendra du design des téléphones : "avec des écrans pliables, qui tiennent dans la poche". Samsung vient de déposer la marque d'un tel produit, selon des fuites venues de Chine et citées par le blog spécialisé SamMobile.
 
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Prototype d'écran souple développé par Samsung
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Mais pour Olivier Frigara, "la vraie révolution viendra des batteries. L'enjeu est qu'elles durent de plus en plus longtemps. Et pour le moment, les constructeurs stagnent." Ils reculent même, à en croire les déboires rencontrés l'an dernier par Samsung avec une batterie nouvelle génération. L'autonomie des appareils progresse malgré tout mais le problème de la recharge des téléphones demeure l'un des défauts les plus cités par les consommateurs.

Le constructeur qui arrivera à faire oublier cette contrainte -parfois quotidienne- sera sans doute celui qui gagnera le plus vite des parts de marché.
 
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Le chinois Huawei s'est allié avec le spécialiste allemand de la photo Leica. Sur cette photo, présentation du P10 Plus par Richard Yu, directeur général de la branche grand public de Huawei.
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S'accaparer des parts du gâteau commercial, c'est ce qu'a fait Huawei, désormais troisième fabricant mondial. Le constructeur chinois a doublé ses ventes en deux ans, détient désormais 10,6% des parts du marché mondial du smartphone (contre environ 18% chacun pour Apple et Samsung) et vise la première marche du podium d'ici à 2022. Les appareils de la marque se veulent haut-de-gamme, ils restent moins chers que les principaux concurrents et le dernier modèle présenté à Barcelone offre, selon le constructeur, 1,8 jour d'autonomie. Vincent Vantilcke, directeur marketing France de Huawei CBG explique que "c'est un point très important pour le consommateur. Huawei réfléchit en permanence à la manière d'intégrer la contrainte des batteries toujours plus grosses dans un design toujours plus fin. Et une fois qu'on a travaillé sur ce compromis, on essaye de penser à tout ce qui va pouvoir permettre d'économiser la batterie. Par exemple, faire travailler les processeurs uniquement lorsqu'ils sont sollicités ou intégrer des écrans dits LTPS, beaucoup plus lumineux, et donc qui ont besoin de moins de rétroéclairage."

Le constructeur dit avoir investi 38 milliards de dollars ces 10 dernières années en recherche et développement. Il dispose notamment de centres de recherches en France, à Sophia-Antipolis (Alpes-Maritimes) et à Paris, sur les technologies photographiques et le design.
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9 janvier 2007, Steve Jobs présente le premier iPhone à San Francisco
©AP/P. Sakuma
Car pour sortir la prochaine innovation de rupture, les constructeurs lancent des recherches tous azimut : intelligence artificielle, réalité virtuelle, écrans souples. Certains spécialistes s'attendent à ce qu'Apple fasse à nouveau la différence lors de sa "keynote", sa conférence de septembre. Le groupe doit marquer les esprits comme il l'a fait il y a 10 ans tout juste en présentant l'iPhone, son produit phare. "Peut-être un écran sans bouton ou à écran courbe, espère Olivier Frigara. En tout cas, Apple a ralenti son rythme de renouvellement l'an dernier. Cela lui sera reproché à juste titre, en septembre prochain, s'il n'a pas cassé son design."