Fil d'Ariane
Nous voilà déjà à mi-chemin de la campagne électorale au Canada, avec un scrutin prévu le 28 avril : les libéraux de Mark Carney ont maintenant une avance de plusieurs points dans les intentions de vote des Canadiens, selon les derniers sondages. L’ombre de Donald Trump continue de planer sur cette campagne unique en son genre. La question des relations entre le Canada et les États-Unis et les négociations à venir dans la guerre commerciale entre les deux pays est, hors de tout doute, l’enjeu principal de ce scrutin.
Le Premier ministre canadien Mark Carney s'entretient avec le Premier ministre britannique Sir Keir Starmer au 10 Downing Street, Londres, Angleterre, lundi 17 mars 2025.
Projet Qc125 est un site qui fait la synthèse des sondages électoraux réalisés au Canada et qui fait des projections électorales à partir de ces sondages. Selon ces projections mises à jour le 11 avril, au terme de cette troisième semaine de campagne, le Parti libéral du Canada remporte maintenant 44% des intentions de vote, contre 38% pour le Parti conservateur du Canada, 9% pour le Nouveau Parti démocratique, 6% pour le Bloc québécois et 1% pour le Parti vert du Canada.
Le site prévoit donc que, si la tendance se maintient, le Parti libéral du Canada remporterait ces élections du 28 avril avec un gouvernement majoritaire, avec plus ou moins 196 sièges (il faut avoir 172 députés sur 338 pour avoir une majorité à la Chambre des Communes) Au Québec, les projections prévoient 48 sièges pour le Parti libéral, 17 pour le Bloc Québécois, 12 pour le Parti conservateur et 1 pour le NPD.
Cette possible victoire des troupes libérales, si elle se confirme le 28 avril, serait un miracle, ni plus ni moins, parce qu’au début de l’année, alors que Justin Trudeau était encore premier ministre et que Mark Carney n’avait pas encore sauté dans l’arène politique canadienne, le chef conservateur Pierre Poilievre voguait allègrement vers une victoire facile et sans appel. Les conservateurs avaient alors plus de 15 points d’avance dans les sondages, une avance qui semblait insurmontable.
L’entrée en scène de Mark Carney, son élection le 9 mars comme chef du Parti libéral, et le retour de Donald Trump à la Maison Blanche ont complètement changé la donne politique canadienne. Ce que les analystes constatent, c’est que les conservateurs n’ont pas perdu de points en tant que tel dans les intentions de vote des Canadiens. Ce sont les libéraux qui en ont gagné en allant piocher dans le bassin des électeurs du Nouveau Parti démocratique, qui enregistre même une dégringolade historique, et du Bloc Québécois.
Ces deux partis ont perdu beaucoup de plumes ces derniers mois et ils ont de la difficulté à se faire une place dans la campagne électorale dominée, jusqu’à maintenant, par la guerre commerciale déclarée par Donald Trump contre le Canada avec ses tarifs douaniers et la question des relations entre le Canada et les États-Unis. Selon le sondage mené le 5 avril par Pallas pour le magazine québécois L’actualité, à la question « quel parti propose le meilleur programme pour répondre aux politiques de Donald Trump contre le Canada ? », 51% des personnes interrogées répondent que ce sont les libéraux de Mark Carney, contre 31% pour les conservateurs de Pierre Poilievre. 52% des répondants jugent que Mark Carney est le chef qui a le mieux répondu aux tarifs douaniers imposés par Donald Trump contre 26% pour Pierre Poilievre.
Ce sondage révèle également que 52% des personnes interrogées veulent voir un gouvernement libéral élu le 28 avril, qu’il soit majoritaire (38%) ou minoritaire (14%). 34% des répondants préfèrent un gouvernement conservateur majoritaire, 6% un gouvernement conservateur minoritaire.
Enfin le plus récent sondage, mené par la firme Nanos entre le 29 mars et le 3 avril auprès de 1233 répondants pour les quotidiens La Presse et The Globe and Mail, révèle que 62,3% des Canadiens estiment que Mark Carney est celui qui sera le meilleur pour négocier avec Donald Trump, contre 23,8% pour Pierre Poilievre. Et l’on apprend aussi que 47% des Canadiens interrogés estiment que cette négociation avec le président américain est l'enjeu le plus important de cette campagne électorale, contre 25% pour l’économie, 5% les impôts et 4% l’immigration. Clairement, le facteur Trump est l’élément déterminant auprès de l’électorat canadien et il avantage largement Mark Carney versus son rival conservateur.
Les 16 et 17 avril vont se tenir le débat des chefs en français, puis en anglais : des étapes importantes dans cette campagne électorale. Le débat en français va être une épreuve difficile pour le candidat libéral qui maîtrise le moins la langue de Molière. Il aura l’occasion de se reprendre au besoin, le lendemain, lors du débat en anglais. Ce genre de débat est toujours un exercice périlleux pour les chefs de partis en campagne électorale.
Ce sera encore plus le cas pour Mark Carney, qui vient de plonger en politique et qui n’a pas l’expérience de politicien du conservateur Pierre Poilievre, reconnu notamment pour ses attaques envers ses rivaux politiques. Mais Pierre Poilievre ne s’avoue pas vaincu, loin de là. Il a tenu cette semaine en Alberta un rassemblement auquel ont participé plusieurs milliers de personnes et où l’ancien Premier ministre conservateur Stephen Harper est venu louer ses louanges. La base électorale conservatrice, concentrée dans l’ouest du pays, est solide.
La difficulté des conservateurs, c’est d’aller chercher des appuis dans les deux plus grosses provinces du Canada, l’Ontario et le Québec, celles aussi qui ont le plus de sièges à la Chambre des Communes. Au Canada, les élections se gagnent dans ces deux provinces. Pour l’instant, les libéraux y ont une large avance sur les conservateurs. Ils mènent aussi dans les trois provinces atlantiques, dans l’est du pays, tandis que les conservateurs dominent dans les provinces de l’ouest canadien. C’est en Colombie-Britannique, la province qui borde l’Océan Pacifique, que la lutte s’annonce serrée entre les Libéraux et les Conservateurs.
Il reste deux semaine de campagne électorale et il faudra voir si les libéraux vont maintenir leur avance sur les conservateurs après les deux débats à venir.
Moins de femmes candidates
Il y a moins de femmes candidates à ces élections que lors des élections précédentes : elles sont 38% de femmes à se présenter alors qu’elles étaient 43,7% en 2021. C’est donc un recul de 5,7%, ce qui éloigne la Chambre des Communes de la parité , avec 45% de femmes et 55% d’hommes. Pour Esther Lapointe, directrice générale du Groupe Femmes, Politique et Démocratie (GFPD) : « il s’agit là d’un recul désolant sur le plan de la représentation démocratique paritaire et inclusive ». L’organisme estime que « sans législation, la progression des candidatures féminines, et, par conséquence des élues, est sujette à des reculs comme celui que l’on déplore aujourd’hui. C’est pourquoi il est nécessaire d’inscrire dans la loi électorale l'obligation pour les partis politiques de présenter 45-55 % de candidatures féminines pour s’assurer d’atteindre la parité de 40-60 % d’élues. C’est une question de démocratie inclusive et de justice sociale ».