Cent-trente-deux enfants et adolescents d'une école abattus méthodiquement, à la chaîne, classe par classe. Leur crime ? Être scolarisés dans un établissement réservé aux enfants de militaires. Des soldats pakistanais qui, depuis six mois, mènent une offensive de grande envergure sur les montagnes du Waziristan, dans le Nord-ouest du pays, à la frontière afghane. Or c'est là que sont retranchés les islamistes d'une mouvance pashtoune particulièrement radicale : Tehreek-e-Taliban (TTP). Le "Mouvement des talibans du Pakistan" est né en réaction à l'assaut de la Mosquée Rouge d'Islamabad, où l'armée pakistanaise, en 2007, avait fait un carnage. Affaibli par les récentes offensives de l'armée pakistanaise, aidée de drones américains, le TTP réaffirme avec cet attentat sanglant son pouvoir de frappe et sa capacité à faire couler le sang. Si ses combattants ont visé cette école, c'est que "des enfants de plusieurs hauts gradés y étudient, a déclaré le porte-parole du mouvement. Nous voulons leur faire vivre la souffrance terrible de voir un être aimé être tué. Leurs familles devront pleurer leurs morts comme nous l'avons fait." Le TTP n'en est pas à son coup d'essai : ses différentes attaques ont déjà fait plus de 7000 victimes. Il est notamment à l'origine de l'attentat de l'aéroport de Karachi, en juin dernier. C'est également le TTP qui, en 2012, a tenté d'assassiner le prix Nobel de la paix, Malala Yousafzai. "Ma famille et moi avons le coeur brisé... Tous les enfants doivent avoir droit à une bonne éducation en toute sécurité", réaffirme la jeune militante pakistanaise, prix Nobel de la paix, en réaction au massacre de Peshawar. D'abord soutenu par al-Qaïda, le TTP se compose aujourd'hui de plusieurs groupes jihadistes dissidents qui compteraient plusieurs dizaines de milliers de membres. Des radicaux qui prônent la charia et cultivent la haine des États-Unis. Ils revendiquent leur clivage avec les autres réseaux talibans, à commencer par celui des Haqqani, lié à l’armée et au renseignement militaire pakistanais (ISI). De fait, au lendemain du carnage, les talibans afghans eux-mêmes condamnaient l'attentat de Peshawar, "contraire aux préceptes de l'islam". Depuis novembre 2013, le TTP est mené par le mollah Fazlullah, qui succédait à l'ancien numéro 1, Hakimullah Mehsud, tué par un tir de drone américain dans les zones tribales du Nord-Waziristan. Or Fazlullah est un fanatique de la tendance la plus dure, réfractaire à toute négociation avec l’État pakistanais. Son incapacité, pourtant, à s'imposer à la tête du mouvement est notoire, et le TTP est divisé. Ce sont probablement les plus radicaux des membres du TTP, sous le commandement du chef dissident Khalid Khorassani, qui ont mené l'opération du 16 décembre qui a traumatisé le Pakistan. Un massacre qui voulait affaiblir l'Etat, mais aussi montrer à la population que le soutenir peut coûter très cher. Aujourd'hui, Islamabad réaffirme sa détermination à éliminer le TTP et le Premier ministre Nawaz Sharif a dénoncé une "tragédie nationale".