Fil d'Ariane
La petite île tunisienne n'a pas connu une telle effervescence depuis des années.
Djerba, fief de la plus ancienne synagogue d'Afrique, a vu converger des milliers de pèlerins cette semaine, participant au pèlerinage juif de la Ghriba qui s'est achevé jeudi soir sans incident, sous un très important dispositif sécuritaire.
Pendant deux jours, les pèlerins ont prié, chanté en hébreu, allumé des cierges, fait bénir fruits secs et boukha (l'alcool de figue local) et déposé des oeufs sur lesquels ils ont écrit des voeux dans une cavité au fond de la synagogue de la Ghriba.
Cette marche joyeuse faisait habituellement le tour des autres synagogues de l'île et des quartiers juifs avant d'être ramenée à la Ghriba. Mais ces dernières années, les festivités se cantonnaient aux alentours de la synagogue pour raison sécuritaire.
Confirmant le regain d'affluence pour ces festivités, René Trabelsi, co-organisateur de ce pèlerinage annuel, précise que près de 400 Israéliens se trouvaient parmi les pèlerins cette année, dont plusieurs dignitaires et personnalités.
Le Premier ministre tunisien Youssef Chahed a aussi fait le déplacement, pour envoyer un "message d'amour et de paix pour tout le monde depuis Djerba" et inciter les touristes à revenir.
Côté français, le rabbin Moshe Sebbag de la Synagogue de Victoire à Paris, et l'Imam de Drancy, le Franco-tunisien Hassen Chalghoumi, ont incarné cette relation plus que millénaire entre les deux communautés sur l'île.
Organisé chaque année au 33ème jour de la Pâque juive, le pèlerinage de la Ghriba est au cœur des traditions des Tunisiens juifs, une communauté qui ne compte plus que quelque 1.200 âmes contre 100.000 avant l'indépendance en 1956.
Ce pélerinage a durement souffert des attaques qui ont touché la Tunisie ces dernières années.
Dans son histoire, la synagogue a été ensanglantée à deux reprises : en 1985, plusieurs personnes sont tuées par un policier. Puis, en avril 2002, 21 personnes, dont une majorité d'Allemands, périssent dans un attentat revendiqué par Al-Qaïda.
Quelque 8.000 fidèles participaient au pèlerinage de la Ghriba jusqu'en 2002.
Après une série d'attentats meurtriers en 2015 visant des touristes et les forces de l'ordre tunisiennes, la situation sécuritaire en Tunisie s'est largement améliorée ces deux dernières années, mais l'état d'urgence reste en vigueur sur l'ensemble du territoire.