Fil d'Ariane
Depuis 40 jours, le journaliste français Loup Bureau est en prison en Turquie. Le comité de soutien lancé par ses proches sur Facebook "Free Loup Turkey - Comité de soutien à Loup Bureau" a organisé un rassemblement à Paris ce lundi 4 septembre. Il s'agissait d'écrire des cartes postales à l'attention de Loup Bureau pour lui exprimer son soutien.
.@cdeloire & @cgirard devant la @Mairiedu4e pour écrire à Loup Bureau. Vous aussi venez avant 19h30 lui envoyer un message! #FreeLoupTurkey pic.twitter.com/ajQ2EFloVp
— RSF (@RSF_inter) September 4, 2017
En outre, une pétition en ligne en faveur de sa libération, lancée sur change.org par le même comité, a déjà récolté plus de 31 000 signatures, ce lundi 4 septembre.
Loup Bureau a été interpellé le 26 juillet au poste-frontière de Habur entre l'Irak et la Turquie.
Après avoir passé cinq jours en garde à vue, Loup Bureau a été incarcéré dans la ville de Sirnak, dans le sud-est à majorité kurde de la Turquie, selon les sources judiciaires. Sirnak est située dans la province du même nom, frontalière de l'Irak et de la Syrie.
Mardi 8 août, les autorités turques ont décidé du transfèrement imminent du journaliste de la prison de Sirnak à Van près de la frontière iranienne. Son transfert à neuf heures de route va éloigner Loup Bureau de son avocat turc. "Cela va avoir un effet désastreux, son avocat qui lui rend visite tous les deux jours, ne pourra plus travailler normalement, et lui va se retrouver isolé", confiait son avocat français Martin Pradel, à l'AFP.
Loup Bureau a été arrêté après que des photos le montrant en compagnie de combattants kurdes syriens des YPG, qu'Ankara considère comme une extension des séparatistes kurdes de Turquie (PKK), eurent été trouvées en sa possession.
Les YPG et le PKK sont classés organisations "terroristes" par la Turquie qui les combat militairement. Les Etats-Unis soutiennent les YPG contre les jihadistes du groupe Etat islamique (EI).
Loup Bureau, journaliste indépendant avait collaboré avec notre chaîne TV5MONDE, en 2013, pour un reportage sur les combattants kurdes en Syrie du YPG (à voir ci-dessous).
" [Les autorités turques] lui reprochent le tournage, le montage et la diffusion d’un reportage datant de 2013, qui a été diffusé sur TV5MONDE, explique son avocat Martin Pradel à L'Obs. Aux yeux du procureur de la ville de Sirnak, cela est constitutif d’un crime, qui est celui de la participation à une organisation terroriste armée. Quand on regarde l’acte d’accusation, la seule chose qui lui est reprochée ce n’est pas d’avoir franchi illégalement une frontière ou d’avoir séjourné de manière illégale sur le territoire turc, c’est le reportage de 2013. On ne lui pose que des questions sur ce sujet. On lui demande comment ce reportage a pu être tourné et quels sont ses contacts."
"Il n'était pas en mission pour nous quand il a été arrêté mais nous allons bien sûr suivre la situation attentivement", a indiqué André Crettenand, directeur de l'Information de TV5MONDE. La Société Des Journalistes (SDJ) de TV5MONDE s'associe à la demande de libération de Loup Bureau.
"Nous suivons avec la plus grande attention la situation de notre compatriote détenu en Turquie et sommes en relation avec sa famille", avait indiqué, début août, à l'AFP le ministère français des Affaires étrangères.
Loup Bureau n’est qu’un journaliste : nous espérons que l’enquête le reconnaîtra dans les plus brefs délais.
Johann Bihr, responsable à RSF
“Nous appelons à la remise en liberté immédiate de Loup Bureau, a déclaré dans un communiqué Johann Bihr, responsable du bureau Europe de l’est et Asie centrale de Reporters sans frontières (RSF). Son incarcération et les lourdes accusations portées contre lui nous inquiètent au plus haut point. Loup Bureau n’est qu’un journaliste : nous espérons que l’enquête le reconnaîtra dans les plus brefs délais.”
Cette affaire rappelle le cas de Mathias Depardon, un photojournaliste français arrêté dans le sud-est de la Turquie en mai et expulsé après un mois de détention et une importante mobilisation.
Les autorités turques le soupçonnaient d'avoir fait de la "propagande terroriste" pour le compte du PKK pour avoir diffusé sur les réseaux sociaux des photos prises au cours d'un reportage.
Les organisations de défense de la liberté de la presse dénoncent des atteintes régulières à cette liberté de la part des autorités turques, notamment depuis la tentative de coup d'Etat du 15 juillet 2016.
La Turquie occupe la 155e place sur 180 au classement 2017 de la liberté de la presse établi par RSF.