Ukraine : que sont les munitions à uranium appauvri ?

Le Royaume Uni envisage de fournir des munitions contenant de l'uranium appauvri. Une proposition immédiatement commentée par le chef de la diplomatie russe comme une "aggravation supplémentaire du conflit".  Que sont ces munitions redoutables et à l'usage controversé ?
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Munition en uranium appauvri
Un membre d'une équipe de radiothérapie tenant un obus anti-blindage de 30 mm contenant de l'uranium appauvri utilisé par l'OTAN lors de frappes aérienne en Bosnie en 1995.  Vogosca, près de Sarajevo, le 15 janvier 2001
© AP Photo/Hidajet Delic, File
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"C'est un pas en direction d'une aggravation supplémentaire, une aggravation sérieuse" du conflit, a déclaré Sergueï Lavrov lors d'une conférence de presse à Sotchi, dans le sud de la Russie le 22 mars quand il a appris que Londres allait fournir à l'Ukraine des munitions contenant de l'uranium appauvri.

Ces armes sont redoutablement efficaces pour percer les blindages mais leur usage est controversé en raison des risques de toxicité pour les militaires et les populations des zones visées.

Que sont les munitions à uranium appauvri ? 

L'uranium appauvri est un produit dérivé du processus d’enrichissement de l'uranium. Il est environ 60% moins radioactif que l'uranium naturel.
L'uranium est un métal extrêmement dense : il l'est 1,7 fois plus que le plomb. Il est tellement dur qu’il ne se déforme pas quand il entre en contact avec sa cible. L'uranium appauvri est ainsi utilisé dans les obus perforants et les bombes pour les rendre plus pénétrants. 

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"C'est un type de munitions commun, utilisé particulièrement pour sa capacité de perforation des blindages", expliquait le 22 mars John Kirby, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, assurant que ces obus "ne sont pas radioactifs" et "ne s'approchent même pas" de la catégorie des armements nucléaires.

Le recours à de telles munitions n'est pas interdit par le droit international.

Où ont-elles déjà été employées ?

Ces munitions sont en dotation dans de nombreuses armées, notamment américaine et russe. Elles ont été employées au cours des deux guerres du Golfe de 1991 et 2003 ainsi qu'en ex-Yougoslavie pendant les années 1990.

Le Pentagone a en outre reconnu s'être servi d'obus contenant de l'uranium appauvri à deux reprises en 2015 dans des opérations contre le groupe État islamique en Syrie.

Ces munitions présentent-elles un risque sanitaire et environnemental ? 

Selon le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), l'uranium appauvri est un "métal lourd, chimiquement et radiologiquement polluant".

Les obus perforants atteignant leur cible produisent une poussière d'uranium ainsi que des fragments de métal.

Sur le plan de la santé, "le principal risque" qu'entraîne l'uranium appauvri "n'est pas la radioactivité mais bien la toxicité chimique. L'ingestion ou l'inhalation de grandes quantités peut nuire au fonctionnement des reins. Si une personne inhale de grandes quantités de petites particules pendant une longue période, la principale préoccupation pour la santé sera l’augmentation du risque de cancer du poumon", souligne la commission canadienne de sûreté nucléaire.

Les munitions à uranium appauvri ont notamment été citées comme l'une des causes possibles des problèmes de santé des anciens combattants de la guerre du Golfe ou encore du nombre élevé de cancers ou encore de malformations congénitales dans la ville irakienne de Falloujah. Toutefois, leur rôle n'a pas été scientifiquement prouvé.

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De nombreuses études ont conclu à l'absence de preuves établissant la nocivité de l'uranium appauvri mais ces résultats restent contestés.

Selon les études auxquelles l’Agence internationale de l’énergie atomique a été associée, "le risque radiologique auquel étaient exposés les populations et l'environnement n'était pas important dans les cas où la présence d'uranium appauvri avait provoqué une contamination localisée de l'environnement sous forme de petites particules libérées au moment de l'impact", souligne le bureau des affaires de désarmement de l'ONU.

En revanche, "lorsque des fragments de munitions à uranium appauvri ou des munitions complètes de ce type sont découverts, les personnes qui entrent en contact direct avec ces objets pourraient subir les effets des rayonnements", concluent les Nations unies.