Venezuela : Juan Guaido n’est plus "président par intérim", l’opposition reconnait son échec

L'opposition vénézuélienne a mis fin vendredi à la "présidence intérimaire" de Juan Guaido. Opposant notoire à l’actuel dirigeant Nicolas Maduro, il s'était autoproclamé président en janvier 2019.  À deux ans de la prochaine présidentielle, une partie de la communauté internationale ne reconnaît toujours pas la réélection en 2018 de Nicolas Maduro. 
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juan gaido venezeula août 2022
Figure phare de l'opposition vénézuélienne au président Nicolas Maduro, Juan Gaido s'est autoproclamé président de la République du Venezuela courant 2019. Caracas, 12 août 2022.
AP/Matias Delacroix
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L’échec est consommé. Les députés de l'ancien Parlement, élu en 2015 et contrôlé par l'opposition, ont voté à 72 voix pour la disparition de la "présidence" (29 contre, 8 abstentions) et du gouvernement intérimaires. Les deux institutions n'avaient pas de pouvoir réel mais contrôlaient toutefois les actifs vénézuéliens à l'étranger. 

Trois des quatre grands partis d'opposition (Primero Justicia, Accion Democratica et Un Nuevo Tiempo) étaient favorables à la disparition du "gouvernement intérimaire", qui a "cessé d'être utile (...) et ne présente aucun intérêt pour les citoyens", avaient-ils indiqué dans un communiqué commun. Cet ancien parlement défend sa continuité en considérant frauduleuses les élections législatives remportées par le pouvoir en 2020.

"C'est un saut dans le vide. Aujourd'hui on capitule. 72 députés ont capitulé", a réagi Juan Guaido après le vote. Il a toutefois assuré sur un ton plus consensuel : "Les différends que nous avons aujourd'hui, nous les dissiperons sans aucun doute".

La présidentielle de 2024 dans tous les esprits

Le vote de l'Assemblée élue en 2015 survient dans un contexte de division de l'opposition qui n'a pas su s'unir lors des régionales de 2021 remportées par le pouvoir et alors que la présidentielle de 2024 aiguise les appétits. "Il y a des leaders de l'opposition qui estiment que le gouvernement intérimaire était un avantage pour une éventuelle candidature de Guaido", a commenté à l'AFP le consultant Pablo Andres Quintero.

"Le gouvernement intérimaire était une émanation, une urgence de l'Assemblée nationale. Ce qui était provisoire est devenu perpétuel", a assuré de son côté lors Juan Miguel Matheus, favorable à la disparition du gouvernement intérimaire. Cet avocat constitutionnaliste a précisé: "Les actifs ne sont pas en danger. La plus grande partie du soutien (international) est un soutien à l'Assemblée nationale plus qu'à la présidence intérimaire... La loi fournit des outils suffisants pour protéger les actifs au Portugal, aux Etats-Unis et en Angleterre".
 
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Un nouveau leader pour l’opposition courant 2023 

Dans la tourmente, Juan Guaido avait plaidé pour que "cet outil ne soit pas détruit", estimant qu'il "soit défendu au-dessus des noms ou des intérêts personnels. Maintenir la présidence (intérimaire) n'a rien à voir avec Juan Guaido. C'est un devoir", avait-il estimé. Il n'a pas été entendu.

L'opposition a en outre annoncé qu'elle organiserait des primaires l'année prochaine. Objectif : choisir un candidat unique pour affronter le président Nicolas Maduro lors de la présidentielle de 2024. À ce stade, Juan Guaido fait toujours partie des possibles candidats.
 
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Le soutien international face à Maduro s’estompe 

Cette présidence "intérimaire" menée par l’opposant Juan Gaido avait été reconnue par les États-Unis et la France notamment. La crise pétrolière provoquée par la guerre en Ukraine a même entraîné un réchauffement des relations entre Washington et M. Maduro. La Maison Blanche a aussi assoupli en novembre les sanctions contre le Venezuela après une avancée dans les négociations entre pouvoir et opposition, permettant notamment au pétrolier Chevron d'opérer au Venezuela pendant les six prochains mois.
venezuela nicolas maduro
Au centre de cette image, le président du Venezuela Nicolas Maduro. Le dirigeant est entouré par d'autres leaders occidentaux. Il est en déplacement à Charm-el-Cheikh en Égypte à l'occasion de la COP27 sur le climat. 7 novembre 2022.
AP/Nariman El-Mofty
D'un autre côté, les pays sud-américains comme la Colombie voisine ou le Brésil qui étaient gouvernés par des droites dures très hostiles à Maduro ont basculé à gauche ces derniers mois, faisant perdre des alliés de poids à Juan Guaido. 

Mais l’assemblée n'a pas atteint son but d'évincer Maduro du pouvoir. Le soutien international s'était depuis étiolé. M. Maduro se moquait d’ailleurs régulièrement de la présidence intérimaire, la qualifiant de "Monde de Narnia".