Victoire des conservateurs, record de l'extrême droite,… : 5 points à retenir des élections allemandes

Les élections législatives allemandes du dimanche 23 février 2025 ont bouleversé le paysage politique du pays : les conservateurs reviennent au pouvoir, l’extrême droite fait une percée historique et les sociaux-démocrates réalisent leur pire score. Récapitulatif des résultats en cinq points. 

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Des personnes regardent les premières projections dans un pub à Berlin, dimanche 23 février, après les élections nationales allemandes. AP/ Martin Meissner.

Des personnes regardent les premières projections dans un pub à Berlin, dimanche 23 février, après les élections nationales allemandes. AP/ Martin Meissner.

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  1. La CDU-CSU remporte les élections avec un score décevant 

Les chrétiens-démocrates sont arrivés en tête des élections législatives de dimanche 23 février 2025, comme le prédisaient les sondages. Ils n’ont toutefois pas franchi la barre des 30 % et leur victoire est moins large qu’espérée. Il s’agit même du deuxième pire score de leur histoire. La CDU-CSU devra former une coalition pour gouverner, promise avant fin avril.

L’alliance CDU-CSU de l’ancienne chancelière, Angela Merkel, revient donc au pouvoir après moins de quatre ans de gouvernement social-démocrate, avec Olaf Scholz. Sa campagne s’est caractérisée par l’opposition aux personnes migrantes et demandeuses d’asile, ainsi que des promesses économiques, comme une baisse des impôts pour les entreprises et les particuliers. Les conservateurs veulent aussi réduire les normes environnementales, pour s’attaquer à la bureaucratie dans le pays.

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  • Virage à droite avec le futur chancelier, Friedrich Merz

Le nouveau chancelier allemand sera Friedrich Merz, président du groupe CDU-CSU au Bundestag, chambre basse du Parlement. Âgé de 69 ans, le député est entré sur la scène politique il y a plusieurs décennies, mais n’a jamais encore exercé de position de gouvernement.

Rival d’Angela Merkel, il est tenant d’une ligne plus à droite que l’ancienne chancelière, notamment sur les questions migratoires. En janvier, le groupe CDU-CSU qu’il dirige a brisé une règle dominant jusque-là la politique allemande, en adoptant un texte parlementaire avec le soutien des députés de l’extrême droite. Ce texte durcit les politiques sur l’immigration et l’asile. Friedrich Merz s’oppose à l’entrée de tout étranger sans papier en Allemagne, y compris demandeur d’asile.

Friedrich Merz s’est aussi déclaré contre la parité hommes-femmes au gouvernement, souhaite durcir les conditions des aides sociales. Il s’oppose également à la loi permettant de faciliter le changement de genre à l’état civil. 

Parmi ses premières déclarations depuis les élections, il a déclaré souhaiter "une capacité de défense européenne autonome" comme alternative à "l'Otan dans sa forme actuelle". Il a aussi garanti au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou qu’il pourrait se rendre en Allemagne, ne respectant ainsi pas le mandat d'arrêt émis par la Cour pénale internationale pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre dans la bande de Gaza. Il est par ailleurs partisan de la continuité de l’aide à l’Ukraine. 

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  • Le plus important score d’un parti d’extrême droite depuis la Seconde Guerre mondiale

L’AfD, Alternative pour l’Allemagne, a réalisé sa meilleure performance électorale depuis sa création en 2013 et est arrivée deuxième. Le parti d’extrême droite était toujours resté sous la barre des 15 % aux élections législatives et dépasse cette fois-ci les 20 % des voix, pour devenir la première force d’opposition allemande. Ainsi, il double presque son nombre de députés, pour atteindre 152, selon les résultats définitifs. 

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Le parti au programme nationaliste, xénophobe et radicalement conservateur a notamment gagné des voix chez les abstentionnistes et les électeurs des partis de droite traditionnels. Surtout ancré à l’est, il a aussi progressé à l’ouest du pays. Soutenu par le milliardaire Elon Musk aux États-Unis, il promet "remigration" aux personnes étrangères ou d’origine étrangère, fin des politiques climatiques et sortie de l’Union européenne. 

Ce score "historique" place l’AfD "dans les meilleures conditions" pour "dépasser" le parti conservateur "au cours des quatre prochaines années et aussi devenir le premier parti" national, a affirmé Alice Weidel, sa cheffe de file. La CDU a indiqué vouloir former un gouvernement avec les sociaux-démocrates du SPD, excluant ainsi une alliance avec l’extrême droite, qui reste isolée par le cordon sanitaire. 

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  • La débâcle du SPD

Le SPD, plus vieux parti politique d’Allemagne, a non seulement perdu les élections, mais a fait son pire score depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour n’atteindre que 16% des voix. 32 circonscriptions passent du SPD à l’AfD, selon un calcul de l’AFP. Les sociaux-démocrates obtiennent 120 députés, soit 86 de moins que lors de la législature précédente.

Le chancelier Olaf Scholz, grand perdant de l’élection, a déclaré assumer les responsabilités de cette défaite. Selon Jacob Ross, expert en relations franco-allemandes, "Olaf Scholz n’a pas réussi à se démarquer de l’héritage d’Angela Merkel, aujourd’hui impopulaire dans le pays". Il prédit que Friedrich Merz pourra négocier avec l’aile la plus conservatrice du SPD, qui pourrait aller encore plus loin sur la lutte contre l’immigration. En France, Jean-Luc Mélenchon a attribué la défaite du SPD à cette "politique du centre gauche", sans rupture "antiraciste et anti-libérale", contrairement à la gauche de Die Linke. 

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  • Agréable surprise pour Die Linke

Le parti Die Linke, situé à gauche du SPD, a créé la surprise en frôlant les 9 % et en remportant 25 nouveaux députés. C’est surtout chez les jeunes, en particulier chez les femmes, que Die Linke a réalisé des bons scores. Avec 25 % de leur voix, il devient ainsi le premier parti des 18-24 ans, devant l’AfD. 

Die Linke, partisan de la baisse de l’âge à la retraite et des taxes sur les personnes fortunées, se distingue dans un paysage politique majoritairement opposé à l’immigration en refusant par exemple toute restriction en matière de droit d’asile. Il a pu bénéficier du recul des Verts, alliés du SPD, et qui enregistrent, eux aussi, une défaite par rapport aux scrutins précédents, en perdant 33 députés. 

Le BSW, un parti issu d’une scission en 2023 avec Die Linke sur une ligne anti-immigration, ne parvient pas de son côté à dépasser la barre des 5 % et à entrer au Parlement.