Vidéo - Dans le Pacifique sud, le Vanuatu renoue avec le français
Le
10 Sep. 2018 à 11h53 (TU)
Mis à jour le
Kim Lévy
Le Vanuatu est aujourd'hui le seul pays indépendant du Pacifique sud à avoir inscrit le français dans sa constitution comme l'une de ses langues officielles. Dans une région largement anglophone, l'archipel - ancien condominium franco-britannique- est un terrain précieux d'influence culturelle et diplomatique de la francophonie. C'est d'ailleurs là que se tenait la semaine dernière le XIe Forum francophone du Pacifique. Reportage.
Dans les rues de Port-Vila, le français n'a pas la côte depuis l'indépendance, il y a 38 ans alors que l'anglais, l'autre langue survivante de l'époque coloniale, est utilisé dans les médias, les communications officielles et pour parler avec les touristes. « Ici on parle le bichelamar et l'anglais. Pas tellement le français », raconte Johanique Terter, entrepreneur électricien.
Pour se comprendre, dans cet archipel où sont pratiquées plus de 110 langues océaniennes, les Mélanésiens parlent le bichelamar, un pidjin né en Australie au XIXème siècle, lors de la traite du Blackbirding. Au fil du temps, le bichelamar est de plus en plus influencé par l'anglais.
Alors si un tiers de la population parle toujours français, la pratique en dehors de la maison se fait de plus en plus rare. « Quand les touristes viennent au Vanuatu, raconte Lilly Kalomor, marchande de fruits et légumes, si y a quelqu'un qui peut dire "bonjour", "ça va", voilà c'est tout. Il ne peut pas aller plus loin. »
Renouer avec le français
Au temps du condominium, le français et l'anglais se sont longtemps opposés sur le terrain politique. Mais aujourd'hui, elles représentent les deux langues internationales du petit archipel, et sont inscrites dans la Constitution en tant que langues officielles du pays, au même titre que le bichelamar.
Depuis 5 ans, le gouvernement renoue avec la langue de Molière. Port Vila a accueilli, pour la première fois cette année, le Forum francophone du Pacifique. Des classes de lycéens ont fait le déplacement. Dès la maternelle, les parents choisissent pour leurs enfants un enseignement en français ou en anglais.
Un choix déterminant pour la suite de leurs études : un étudiant francophone est plus souvent contraint de partir à l'étranger, faute de cursus supérieur adapté. « Nous nous devons de nous investir d'une manière équitable, explique Jean-Pierre Nirua, ministre de l'Education et de la Francophonie au Vanuatu, investir l'enseignement de nos jeunes dans les deux langues, et non continuer à investir sur une langue contre l'autre langue, ce qui continue à nous diviser. Donc l'enjeu principal pour nous maintenant, c'est de pouvoir former autant de plurilingues, de bilingues, de multilingues au pays qui sont des agents de développement dans ce monde global que nous vivons. »
Soutien de la France
Le territoire français de Nouvelle-Calédonie soutient activement la démarche du gouvernement. Il est le seul voisin francophone dans la région. « Un projet qui nous tenait à cœur avec Jean-Pierre Nirua, souligne Bernard Deladrière, ministre du Budget et de la Francophonie en Nouvelle-Calédonie, c'était la formation de diplomates ni-Vanuatu en français avec le partenariat ...»
La France apporte aussi son financement pour l'un des bâtiments de la future université nationale. Une façon pour la francophonie de peser dans la région et auprès du jeune Etat, courtisé par les influences étrangères. La future université bilingue du Vanuatu doit ouvrir ses portes en 2020, sur les locaux de l'actuelle Agence universitaire de la Francophonie.