Fil d'Ariane
Sur la route défoncée menant à Minova, dans le Sud-Kivu, seuls quelques motos et véhicules militaires parviennent à passer. Après un trajet difficile, nous atteignons Kalungu, un petit village sous le contrôle du M23.
Pour dominer la cité, les combattants rebelles ont pris position sur un chemin surplombant la route principale. Le M23 y est présent en grand nombre. Un camion dépose des troupes et, durant notre tournage, cinq véhicules similaires ont transporté environ 150 soldats. À Kalungu, ils stationnent depuis deux à trois semaines, nous confie un gradé. Leur campement a été installé en contrebas d'une maison occupée.
Dans le village, il est interdit de filmer ou d’interroger les combattants du M23. Notre présence est toute juste tolérée. Une femme, cheffe de centre, héberge les soldats. Même prendre quelques images d’elle suscite la méfiance des militaires. Son témoignage, livré sous surveillance, est sans ambiguïté :
"Nous allons très bien avec les militaires, tout se passe bien. Mais nous avons une seule difficulté : la route est impraticable et nous ne pouvons pas mener nos activités. Ils sont ici depuis trois semaines. Il n’y a aucun problème avec la population."
Un peu plus loin, un habitant accepte de nous parler, mais seulement après le départ des soldats :
"Nous parlons avec eux sans problème. Mais ils obligent les jeunes à porter leurs affaires sur la tête. Ils passent, et d'autres arrivent tous les deux jours."
Autour des échoppes, des combattants du M23, bien équipés, déambulent. Ils occupent chaque coin du rond-point central, le cœur de Kalungu.
Les soldats récemment arrivés sont partis vers le sud, en direction du pont Makélélé, un passage stratégique visible au loin. Mais l’accès y est strictement interdit. Un colonel du M23 nous en empêche l’approche : au-delà, commence la zone des opérations militaires.