Fil d'Ariane
Des affrontements ont éclaté entre des manifestants et des policiers à Istanbul.
À Istanbul, des manifestants continuent de se mobiliser contre un magazine satirique turc "LeMan" ce mardi 1er juillet, l'accusant d'avoir publié une caricature du prophète Mahomet. La veille, des heurts ont eu lieu après l'annonce de l'arrestation de plusieurs journalistes et collaborateurs du journal.
En dépit des mesures draconiennes prises par les autorités turques qui ont bouclé le cœur d'Istanbul, des centaines de manifestants ont de nouveau conspué, mardi, un magazine satirique turc accusé d'avoir publié une caricature du prophète.
Quelque 300 personnes réunies dans et autour de la mosquée de Taksim, près de la célèbre place du même nom et de l'avenue commerçante Istiklal, ont dénoncé le dessin paru dans la revue d'opposition "LeMan", aux cris de "LeMan, salauds, n'oublie pas Charlie Hebdo".
C'est une référence explicite et menaçante aux attentats djihadistes contre l'hebdomadaire satirique français le 7 janvier 2015, qui avait décimé la rédaction, faisant 12 morts et 11 blessés.
Cela n'a rien à voir avec le prophète Mahomet. Nous ne prendrions jamais un tel risque.
Tuncay Akgun, rédacteur en chef du magazine Leman
Le gouverneur du district central de Beyoglu a interdit mardi tout rassemblement dans la zone et prévenu, par communiqué, que d'autres quartiers pourraient être concernés par cette mesure. La veille des affrontements ont éclaté en soirée dans le quartier d'Istiklal à l'annonce d'arrestations ordonnées contre les membres du journal Leman.
Des policiers prennent position avant une manifestation contre le magazine satirique LeMan après avoir publié une caricature qui représenterait prétendument le prophète Mahomet, Istanbul, Turquie, le mardi 1er juillet 2025.
Plusieurs dizaines de personnes en colère ont d'abord attaqué un bar fréquenté par le personnel de la revue dont ses caricaturistes, puis des échauffourées ont rapidement dégénéré impliquant près de 300 personnes, selon l'AFP.
La police a réagi avec des tirs de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes pour les disperser.
Joint par l'AFP, le rédacteur en chef du magazine, Tuncay Akgun, en déplacement à l'étranger, a nié toute intention malveillante. "Ce dessin n'est en aucun cas une caricature du prophète Mahomet", a-t-il défendu, arguant que le personnage est un musulman tué à Gaza dans les bombardements d'Israël.
"Il a été appelé Mohammed, c'est une fiction. Plus de 200 millions de personnes dans le monde islamique s'appellent Mohammed". "Cela n'a rien à voir avec le prophète Mahomet. Nous ne prendrions jamais un tel risque", a insisté Tuncay Akgun.
Six mandats d'arrêts visent des rédacteurs et collaborateurs du magazine accusés d'avoir publié un dessin qui "dénigre ouvertement les valeurs religieuses".
Quatre d'entre eux dont l'auteur du dessin ont été arrêtés, selon le ministre de l'Intérieur Ali Yerlikaya. "Ces individus sans vergogne devront répondre de leurs actes devant la justice". Le ministre turc a même publié la vidéo de l'arrestation sur son compte X.
Le dessin en question montre deux personnages dans le ciel, au-dessus d'une ville écrasée sous les bombes: "Salam aleykoum, je suis Mohammed", dit l'un en serrant la main de l'autre qui répond: "Aleykoum salam, je suis Musa (Moïse)".
"Le dessinateur a voulu montrer la droiture du peuple musulman opprimé en représentant un musulman tué par Israël, il n'a jamais eu l'intention de rabaisser les valeurs religieuses", s'est défendu le magazine sur X.
Des manifestants scandent des slogans lors d'une manifestation contre le magazine satirique LeMan après la publication d'une caricature représentant prétendument le prophète Mahomet, devant la mosquée Taksim, à Istanbul, en Turquie, le mardi 1er juillet 2025.
En mars 2002, les dessinateurs de Charlie Hebdo avaient rendu visite à Leman et publié conjointement avec leurs confrères turcs un numéro spécial. Charlie Hebdo se référait alors à "LeMan" comme "notre petite sœur turque".
Les détracteurs de Leman appellent à un rassemblement de protestation samedi dans un parc adjacent à la mairie d'Istanbul.
Le représentant en Turquie de l'organisation Reporters sans frontières (RSF) a dénoncé mardi ces arrestations et l'intervention de la police. "La sécurité des caricaturistes doit désormais représenter le sujet principal pour les autorités", estime Erol Onderoglu.