Fil d'Ariane
Le président vietnamien, Vo Van Thuong, a présenté sa démission après seulement un an de mandat ce 20 mars. Selon le gouvernement, il est coupable de "violations et de manquements".
Le président Vo Van Thuong lors d'un déplacement au Japon, le 27 novembre 2023.
La chute spectaculaire du président, Vo Van Thuong, 53 ans, intervient alors que le Vietnam connaît de profonds bouleversements politiques. Son prédécesseur a également été évincé dans le cadre d'une campagne de lutte contre la corruption qui a vu plusieurs ministres limogés ainsi que des chefs d'entreprise de premier plan jugés pour fraude et corruption.
Le Vietnam est dirigé par le Parti communiste. À sa tête, se trouvent officiellement le secrétaire général du Parti, le président et le Premier ministre, les principales décisions étant prises par le Politburo, qui compte 16 membres.
Bien que le président soit le chef de l'État, l'homme fort du régime est le secrétaire général du parti, Nguyen Phu Trong, considéré comme l'architecte de la campagne de lutte contre la corruption, populaire auprès de l'opinion publique vietnamienne.
Le secrétaire général du parti communiste vietnamien Nguyen Phu Trong, lors d'une réunion du Comité central à Hanoi, Vietnam, le 12 décembre 2023.
Selon VNA, Vo Van Thuong a violé des "règlements" non spécifiés, et n'a pas donné l'exemple en tant que chef de l'État. "Les violations et les manquements du camarade Vo Van Thuong ont été mal vus par l'opinion publique, affectant la réputation du Parti, de l'État et la sienne", a ajouté l'agence d'État.
"Pleinement conscient de sa responsabilité envers le Parti, l'État et le peuple, il a présenté sa démission des fonctions qui lui avaient été confiées". L'Assemblée nationale, qui suit strictement les consignes des cadres du parti, tiendra une session extraordinaire le 21 mars pour confirmer cette démission. La vice-présidente Vo Thi Anh Xuan devrait prendre le relais jusqu'à ce qu'un remplaçant permanent soit trouvé.
Vo Van Thuong était devenu président le 2 mars 2023, après la démission surprise de son prédécesseur, Nguyen Xuan Phuc, un événement inhabituel au Vietnam, où la stabilité est mise en avant et les changements politiques soigneusement orchestrés.
Avant Nguyen Xuaen Phuc, un seul autre président vietnamien avait démissionné, pour raisons de santé. Lorsqu'il avait pris ses fonctions il y a un an, Vo Van Thuong s'était déclaré "déterminé à lutter contre la corruption" et on le croyait proche du secrétaire général du parti, Nguyen Phu Trong.
Aucun détail n'a été rendu public sur les raisons du départ de Vo Van Thuong.
Pour l'expert Benoît de Tréglodé, cette annonce marque le début de grandes manoeuvres à l'approche du congrès de 2026 qui pourrait déterminer un successeur à Nguyen Phu Trong, qui fêtera en avril ses 80 ans.
"C'est un règlement de compte politique, sous un prétexte grossier (...) En touchant à Vo Van Thuong, on touche à Nguyen Phu Trong", explique à l'AFP le directeur de recherches à l'Institut de recherche stratégique de l'Ecole militaire (Irsem), à Paris. "Ce départ fait partie de rivalités claniques au sein du parti avant un renouvellement des élites, vu que l'état de santé de Nguyen Phu Trong se détériore", poursuit-il.
Au début du mois, le ministère de la Sécurité publique avait annoncé élargir une enquête concernant une société de développement d'infrastructures dans trois provinces, dont celle de Quang Ngai (centre), dont Vo Van Thuong était auparavant le chef du parti.
Le ministère a déclaré que la société Phuc Son était soupçonnée d'avoir falsifié ses comptes afin d'échapper à l'impôt, et que ses enquêteurs avaient arrêté neuf personnes, dont cinq fonctionnaires de Quang Ngai.
Deux grands procès pour fraude et corruption ont débuté ce mois-ci, l'un à Hanoï, l'autre à Hô Chi Minh-Ville (sud), impliquant certains des plus grands chefs d'entreprise du pays.