Fil d'Ariane
La Norvège prévoit d'interdire totalement les voitures polluantes en 2025. La population ne dispose plus que de sept petites années pour se convertir aux véhicules n'émettant pas de CO2. L'objectif est ambitieux -et paradoxal, dans l'un des premiers pays producteurs d'hydrocarbures au monde. Il semble tout à fait atteignable quand on voit la progression spectaculaire des ventes de ce type de modèles dans le pays scandinave depuis le début de la décennie.
En 2017, la moitié des véhicules vendus étaient soit totalement électriques -fonctionnant uniquement sur batteries ou avec une pile à hydrogène- (20,9% des ventes nationales), soit hybrides, c'est à dire proposant à la fois un moteur thermique et un électrique (31,3% des ventes).
La Norvège est devenue le troisième marché mondial pour la voiture zéro émission. Le petit pays de 5 millions d'habitants se paye le luxe de trôner sur le podium aux côtés de deux géants : la Chine et les Etats-Unis.
Pour réussir ce pari, les autorités norvégiennes ont instauré une série de mesures incitatives. La première est fiscale : les véhicules 100% électriques sont totalement exemptés de la redevance d'immatriculation et de la TVA (fixée à 25%). L'avantage moyen a été calculé à 14 000 euros. La seconde mesure est une politique volontariste dans l'installation de bornes de chargement. Elles sont très nombreuses aussi bien dans les rues que dans les parkings privés. Et la recharge en électricité est souvent gratuite.
En Norvège, posséder une voiture zéro émission offre également le privilège de rouler sur les voies réservées aux bus, de ne pas payer le stationnement, ni les péages urbains ou les voyages en ferry.
Des mesures qui allègent considérablement le coût initial d'achat de ces voitures.
Pourtant, selon Joseph Beretta, président de l'Avere (Association nationale pour le développement de la mobilité électrique), ce modèle norvégien n'est pas exportable en France. "On ne peut pas dire qu'avec ce même modèle, on arrivera au même résultat. Les deux pays sont différents en terme de taille du parc automobile et de richesse".
Pour lui, "les Norvégiens ont les moyens de s'acheter des voitures électriques, ils s'équipent massivement en Tesla ou BMW (NDLR : des modèles haut de gamme). En France, on en est pas à ce niveau-là. C'est pour cela qu'on compte beaucoup sur le marché de l'occasion. On demande au gouvernement la création d'une prime pour l'achat d'une voiture électrique d'occasion".
Par ailleurs, en Norvège, l'échéance de 2025 pousse les consommateurs à s'équiper dès maintenant en électrique. L'échéance est plus lointaine ailleurs. La France, par exemple, s'est fixé l'objectif 2040 pour la disparition des moteurs polluants.
Néanmoins, les autorités françaises appliquent aussi des mesures incitatives inspirées du modèle norvégien : prime à l'achat et à la conversion, bonus écologique, stationnement gratuit dans certaines villes, crédit d'impôt sur les bornes de recharge, "droit à la prise"...
Autant de mesures qui incitent Joseph Beretta à l'optimisme. "Quand je vois des chiffres de croissance réguliers et continus depuis 2010, je me dis qu'on est vraiment sur la bonne voie" s'enthousiame le patron de l'Avere.