Vu d'Iran : et si Barack Obama avait été le plus dur des présidents ?
L'élection de Barack Obama avait suscité l'espoir d'une transformation de la politique américaine au Proche et au Moyen Orient, y compris et peut-être même surtout en Iran. Espérance des gouvernants que la main de fer se relâche, espérance des citoyens que de meilleures relations antre Washington et Téhéran permettent d'accélérer les transformations d'une société verrouillée. Non seulement il n'en n'est rien, nous dit Hamdam Mostafavi, journaliste d'origine iranienne, chef des informations du site internet du magazine Courrier international, mais Obama s'est montré bien plus dur que ses prédécesseurs avec le régime des Mollahs.
Les Iraniens pensaient qu’il leur apporterait la paix. S’il a réussi à éviter la guerre jusqu’ici, il a néanmoins appliqué une politique sans concession à l’égard de Téhéran. “Ou-ba-mast” [il est avec nous] : un jeu de mots qui en disait long sur l’espoir que les Iraniens mettaient en Obama il y 4 ans. Après une mise au ban des nations avec le fameux “axe du mal” de George W. Bush, il semblait que les relations Iran-Etats-Unis ne pouvaient que s’améliorer. L’élection d’Obama avait donc été accueillie avec enthousiasme par les Iraniens, de l’intérieur comme en exil. Mais la désillusion n’a pas tardé : le président américain n’a pas su prendre une position ferme quand des milliers d’Iraniens ont défilé dans les rues pour protester contre la réélection de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence en juin 2009. Barack Obama a aussi manié mieux que n’importe quel président avant lui la politique de la carotte et du bâton. Après la main tendue des premiers mois, il est vite passé à la manière forte. Les années de tergiversations de Bush, forts en mots mais moins en actes, après la découverte du programme nucléaire iranien en 2002, étaient finies. Barack Obama est monté d’un cran dans la politique anti iranienne : gel des avoirs iraniens aux Etats-Unis, sanctions contre la Banque centrale iranienne, interdiction pour les entreprises américaines et des pays alliés de faire du commerce avec l’Iran, pression pour l’embargo pétrolier de l’Union européenne. L’Iran fait face à une situation économique pratiquement similaire aujourd’hui à celle qui a frappé le pays pendant la guerre Iran-Irak et à un isolement diplomatique croissant. L'Iran plus mal traitée que la Corée du Nord Même si, en apparence, l’ère de l’axe du mal est révolue, l’Iran est resté montré du doigt comme l’un des pays les plus dangereux du monde. La rhétorique guerrière et anti israélienne du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, même si elle reste dans la lignée de ses prédécesseurs, n’a pas servi l’Iran. Téhéran n’a ainsi pas bénéficié de négociations directes, alors que Washington a discuté avec la Corée du nord, sur son programme nucléaire. Alors même que Washington n’affiche pas de problème avec les programmes nucléaires pourtant bien plus secrets que celui de l’Iran - qui est signataire du TNP (traité de non-prolifération) - de ses alliés pakistanais, ou israélien. Reste que les politiques d’Obama n’ont pas délogé les hommes au pouvoir à Téhéran, ni fait évoluer radicalement leur attitude. L’opposition iranienne dénonce les sanctions qui affectent principalement la population, rendant les produits de consommation plus cher chaque jour. Romney semble plus enclin à la guerre qu’Obama, ou en tout cas prêt à appuyer d’éventuelles frappes israéliennes contre l’Iran. Jusqu’ici, les sanctions et la guerre larvée (cyber attaques, assassinats de scientifiques) n’ont pas encore fait la preuve formelle d’avoir réussi à arrêter de manière définitive et durable le programme nucléaire iranien. Plutôt que des frappes, le nouvel occupant de la Maison-Blanche devra sans doute imaginer des manières de discuter directement avec le pouvoir à Téhéran, dont l’influence sur des conflits en cours (Syrie, Irak, Afghanistan) reste incontournable.