
Fil d'Ariane
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky accuse la Russie de ne pas respecter le cessez-le-feu pour Pâques, que Vladimir Poutine venait d’annoncer. Il s’agirait de la plus grande pause dans les combats ces trois dernières années.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'exprime lors d'un briefing à Kiev, Ukraine, jeudi 17 avril 2025.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé, samedi 19 avril, la Russie de violer le cessez-le-feu que Vladimir Poutine venait d'annoncer pour Pâques et que l'Ukraine s'est engagée à respecter, ce qui constituerait la pause la plus significative dans les combats en trois années de conflit.
"Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe décrète une trêve de Pâques aujourd'hui, de 18 heures (15 heures GMT, ndlr) à minuit entre dimanche et lundi (21 heures GMT dimanche). Je donne l'ordre de cesser toutes les hostilités pendant cette période", a déclaré le chef de l'État russe.
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"Nous supposons que la partie ukrainienne suivra notre exemple", a-t-il ajouté, tout en demandant aux forces russes de se tenir prêtes à une "réponse immédiate et complète" en cas de "violations de la trêve".
"Si la Russie est prête à vraiment s'engager, l'Ukraine fera de même", a écrit le président ukrainien sur X, ajoutant qu'il proposait "d'étendre le cessez-le-feu au delà du 20 avril".
En fin de journée, Volodymyr Zelensky a toutefois assuré sur X que "des assauts russes se poursuivaient dans plusieurs secteurs du front", tandis qu'une alerte antiaérienne a retenti à Kiev.
Le gouverneur de la région de Kherson, dans le sud de l'Ukraine, a pour sa part fait état au même moment d'attaques de drones russes.
"Vers 18 heures" (15 heures GMT), une attaque de huit drones russes a mis le feu à des appartements dans une tour d'habitation et, plus tard dans la soirée, trois drones ont frappé deux villages, a indiqué Oleksandre Prokoudine, tandis que l'armée de l'air ukrainienne déclenchait des alertes aux raids aériens dans plusieurs régions de l'est.
"Les combats se poursuivent et les attaques russes continuent", a déclaré samedi soir le chef d'état-major de l'armée ukrainienne. "Dans certaines zones de la ligne de front, l'artillerie russe continue d'être entendue, malgré la promesse de silence du dirigeant russe. Des drones russes sont utilisés".
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"Poutine vient de faire des déclarations sur sa prétendue disposition à un cessez-le-feu. Nous savons que ses paroles ne sont pas dignes de confiance et nous examinerons les actes, pas les paroles", a mis en garde le ministre ukrainien des Affaires étrangères Andriy Sybiga.
Interrogés par l'AFP, des soldats ukrainiens ont également exprimé leur extrême méfiance face aux Russes.
"Il est impossible de croire à un quelconque cessez-le-feu de la part de ces gens", a ainsi lancé Dmitri, un militaire de 40 ans qui profitait d'une pause au soleil à Kramatorsk, dans l'est.
"Je pense que cet homme (Poutine) est diabolique, un meurtrier, mais il peut le faire. Il pourrait le faire pour donner un peu d'espoir ou pour montrer son humanité. Quoi qu'il en soit, bien sûr, nous n'avons pas confiance. Ces 30 heures ne mèneront à rien", a-t-il martelé, avant de conclure qu'"il est certain que les massacres de notre peuple et du leur continueront".
La Russie a par ailleurs annoncé samedi avoir échangé 246 prisonniers de guerre ukrainiens, contre le même nombre de prisonniers russes, en plus de 31 blessés ukrainiens et 15 blessés russes.
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Les Émirats arabes unis, médiateur sur ce dossier, ont confirmé l'opération, saluant "le plus grand échange" de prisonnier depuis le début de la guerre, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères publié samedi soir.
La fête de Pâques, l'une des plus importantes du calendrier chrétien, qui commémore la résurrection du Christ est célébrée cette année dimanche, à la même date par les catholiques et les orthodoxes.
Des tentatives d'instaurer un cessez-le-feu à cette occasion en Ukraine ont déjà eu lieu à deux reprises depuis le début du conflit en février 2022.
En avril 2022, une première initiative en ce sens, prise par le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, ne s'était pas concrétisée du fait du refus de la Russie, qui avait jugé que l'armée ukrainienne aurait pu en profiter pour se regrouper et de se réarmer.
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L'année suivante, en janvier 2023, le patriarche de l'Église orthodoxe russe Kirill avait exhorté les deux belligérants à interrompre les hostilités pour Pâques et la Russie avait décrété un cessez-le-feu de 36 heures. Celui-ci avait néanmoins été qualifié de "piège" par l'Ukraine et les affrontements avaient continué.
La trêve ordonnée, samedi, par M. Poutine intervient alors que les efforts de l'administration de Donald Trump pour trouver une issue au conflit en Ukraine paraissent dans l'impasse ces derniers jours.
Le président américain a en conséquence menacé, vendredi, de se retirer des négociations faute de progrès rapides dans les discussions séparées que ses lieutenants ont depuis plusieurs semaines avec Kiev et avec Moscou.
Le même jour, le Kremlin avait dit considérer que le moratoire sur les frappes contre les sites énergétiques, annoncé en mars pour 30 jours mais dont la mise en œuvre restait floue, avait "expiré". La Russie et l'Ukraine s'accusaient de surcroît presque quotidiennement de le violer.
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Donald Trump avait initialement proposé un cessez-le-feu inconditionnel et complet, dont le principe avait été accepté par Kiev sous la pression de Washington mais écarté par Vladimir Poutine.
La Russie a par ailleurs revendiqué samedi avoir "libéré" la quasi-totalité - "99,5%" -, de la région russe de Koursk, cible en août 2024 d'une offensive surprise des forces ukrainiennes.
Une telle progression replacerait à nouveau en totalité le front sur le sol ukrainien, ce qui renforcerait la confiance de la Russie.
À Moscou, Evgeniy Pavlov, 58 ans, a exprimé son scepticisme vis à vis de la trêve annoncée.
"Il ne faut pas donner de répit à l'Ukraine. Si nous insistons, cela signifie que nous devons aller jusqu'au bout", a-t-il dit à l'AFP.