Entre le drame d’Olembé et les nombreuses polémiques autour de l’état de la pelouse de Japoma, les hôtels jugés inconfortables et les soupçons de favoritisme à l'endroit du Cameroun, la compétition aura essuyé de nombreuses critiques. Même si certains estiment que ce fut une réussite.
Une entrée censée être ouverte mais gardée fermée, l’assouplissement des mesures d’accès au stade, l’incivisme des spectateurs camerounais, des agents de sécurité déployés en nombre très réduit… « Il y a eu quelques défaillances », avait tranché Patrice Motsepe, le président de la CAF, au lendemain de la bousculade meurtrière qui a fait 8 morts et une trentaine de blessés le 24 janvier 2022 à l’entrée sud du Complexe d’Olembé à Yaoundé.
Près de trois semaines après cette tragédie, l’Afrique du football porte toujours le deuil. Et rien que pour ces illustres disparus, des commentateurs s’accordent à dire que la 33ème Coupe d’Afrique des Nations (CAN) organisée en terre camerounaise aura été un échec, un désastre, un fiasco.
D’une polémique à l'autre
D’un peu partout dans le monde en effet, la CAN 2021 a été la risée des réseaux sociaux. Selon Twitter et Instagram par exemple, l’on aurait assisté à la pire CAN jamais organisée dans l’histoire du football africain. Les hashtag #PireCan et #CanDeLaHonte ayant fait fureur sur la toile durant toute la compétition. Logique ! Le tournoi a souvent fait l’objet de nombreuses railleries causées par des polémiques parfois fondées, parfois non.
La CAN camerounaise a été sifflée pour l’état « déplorable » de la pelouse du stade principal du Complexe de Japoma à Douala. Et aussi pour les hôtels dits « inconfortables » aux conditions hygiéniques jugées « ignobles ». Le sélectionneur de la Gambie avait même créé le buzz en déclarant que ses joueurs dormaient à six dans une chambre, utilisant « les mêmes sanitaires et les mêmes douches ». Mais la Fédération gambienne devait ensuite se fondre en excuses pour ces propos qui ne reflétaient pas la réalité.
Autre sujet de polémique : la fiabilité des test Covid. Toutes les équipes ont été touchées par le virus, sauf… le Cameroun. Une situation qui a fait émerger des soupçons de traitements de faveur dont aurait bénéficié la patrie de Samuel Eto’o. Notamment en prélude des huitièmes de finale. Le pays hôte de la compétition a affronté ce 24 janvier-là, une équipe des Comores privée d’au moins six cadres dont les trois gardiens. Tout ceci après que la CAF a décidé de renvoyer la veille une version mise à jour des normes sanitaires autour du Covid-19, semant la confusion. Résultat : le Cameroun s’est imposé 2-1.
La victoire de la ferveur populaire
Tout n’a cependant pas été noir au pays des Lions Indomptables. Outre la troisième place décrochée par Vincent Aboubakar et ses coéquipiers, le Cameroun a aussi remporté la victoire de la ferveur populaire. Le spectre de l’annulation de la CAN qui a plané sur le pays pendant de nombreux mois, voire des années, a nourri une envie démesurée chez les Camerounais, obligeant la CAF à imposer une jauge à 80% des capacités des stades.
Si l’obligation de présenter un carnet de vaccination et un test Covid négatif a refroidi quelques aficionados au début du tournoi, le gouvernement a ensuite trouvé les astuces pour combattre le phénomène des tribunes vides : distribution des tickets, mise à disposition de bus gratuits pour le transport des spectateurs, arrêt des classes et des activités dans la fonction publique entre 13 heures et 14 heures.
Le « douzième homme » local n’a pas hésité à prêter ses talents aux pays amis comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire, l’Algérie ou encore le Nigeria. L’enjeu et l’émotion commandant la raison, on a même vu un public camerounais apprendre l’hymne national de l’Egypte en quelques heures, pour accompagner les Pharaons lors des huitièmes de finale. Mais l’ambiance était encore plus animée dans les fans zones. Entre concerts de musique et jeux divers, l’alcool a coulé à flot et des relations amicales et amoureuses se sont créées.
Terrorisme : le pari de la sécurité remporté
Le Cameroun a aussi et surtout relevé le pari sécuritaire de cette Coupe d'Afrique des Nations. Confronté à la menace terroriste dans les régions du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et de l’Extrême-Nord, le pays que dirige Paul Biya a réussi à tenir loin des stades, les groupes armés qui avaient promis de perturber la compétition. Le Cameroun a aussi contribué à propulser la CAN au rang des produits les plus performants au monde. Avec un milliard de vues sur TikTok, 900 millions d’impressions sur toutes les chaînes, 2,8 millions d’heures de visionnage sur YouTube le jour de la finale, la CAN 2021 est bien partie pour durer dans l’histoire.
« Je constate avec beaucoup de joie que la CAN 2021 au Cameroun fut la plus médiatisée et la plus mouvementée positivement de toutes celles dont j’ai participé », s’est réjoui Gianni Infantino dans un message de félicitations adressé à Samuel Eto’o, le patron de la Fécafoot. « Le football africain, a ajouté le président de la FIFA, va visiblement prendre de la valeur à nouveau, grâce à cette grosse prestation que nous a offert le Cameroun ». Si cela vient de la plus haute instance du football mondial, que dire de plus ?