Fil d'Ariane
Le 13 janvier prochain, au stade Olympique d'Ebimpé, près d'Abidjan, la Côte d'Ivoire donnera face à la Guinée-Bissau le coup d'envoi de la CAN 2023. Présentés comme l'un des grands favoris de cette trente-quatrième édition, les Éléphants du Français Jean-Louis Gasset ont levé certains doutes mais devront déjouer quelques pièges pour être à la hauteur des attentes de tout un peuple.
C'est avec une étiquette de favori dans le dos que la Côte d'Ivoire abordera la CAN 2023, que le pays accueille à compter du 13 février prochain. Sacrés à deux reprises lors des 33 précédentes éditions, les Éléphants, coachés depuis le mois de mai 2022 par le Français Jean-Louis Gasset, accueillent le tournoi pour la deuxième fois. Leur précédente expérience en tant qu'organisateur s'était soldée en 1984 par une élimination précoce et une victoire finale du Cameroun, l'un des ses tombeurs du premier tour. La compétition ne rassemblait alors que huit équipes, rendant le moindre faux pas potentiellement fatal. Versés cette fois dans un groupe A à leur mesure, avec pour adversaires successifs la Guinée-Bissau, le Nigeria et la Guinée équatoriale, les coéquipiers de Serge Aurier devront toutefois éviter de se mettre dans le rouge d'entrée. Où en sont-ils alors que va débuter cette trente-quatrième Coupe d'Afrique de l'histoire ?
Le bilan des derniers mois incite plutôt à l'optimisme. Sèchement battue par une fringante Zambie (3-0), le 17 juin dernier dans le cadre des éliminatoires de cette CAN 2023, la Côte d'Ivoire qui était qualifiée d'office, paraît depuis s'être mise en ordre de bataille. Après la déroute subie à Ndola, le président de la Fédération ivoirienne de football, Yacine Idriss Diallo, n'avait il est vrai guère laissé le choix au sélectionneur et à ses hommes. « Cette défaite contre la Zambie marquait la fin de la phase test effectuée par Gasset, qui devra présenter, en septembre prochain, une équipe basée sur des critères forts, dont la bonne santé des joueurs, leur régularité en club, leur engagement et leur détermination à défendre le drapeau national », avait alors déclaré le dirigeant.
Après une courte victoire sur le Lesotho en septembre (1-0), ce sont les deux prestations consistantes réussies le mois suivant contre le Maroc et l'Afrique du Sud (1-1 à chaque fois), davantage que les résultats bruts de ces deux amicaux, qui ont donné l'impression que le message présidentiel avait été bien reçu. L'efficacité n'était toutefois pas encore au rendez-vous au cours de ces deux matchs nuls gagnés « aux points ». Elle pointa le bout de son nez en novembre, à l'occasion des premières rencontres à enjeu disputées en 2023 par la Séléphanto, dans le cadre des deux premières journées des éliminatoires de la Coupe du Monde 2026 : la réception des Seychelles (9-0) puis le déplacement en Tanzanie pour affronter la Gambie (2-0), ont marqué le réveil offensif d'une équipe en pleine montée en puissance.
S'il n'avait jamais travaillé en Afrique avant de prendre les rênes de cette équipe ivoirienne, le sélectionneur Jean-Louis Gasset est arrivé fort d'une grande expérience dans la constitution et la gestion d'un effectif. En manque de gardien convaincant depuis la suspension de l'expérimenté Sylvain Gbohouo, le technicien français a eu la bonne idée de faire confiance au portier d'Angers, Yahia Fofana. Cet ancien international Espoirs français (22 sélections avec les équipes de France U17 à U21) a rapidement pris ses marques dans un groupe composé en partie de Franco-Ivoiriens, parmi lesquels le défenseur Evan Ndicka (AS Rome), l'ailier gauche Jonathan Bamba (Celta Vigo), qui retrouvera son ex-coéquipier du LOSC Nicolas Pépé (Trabzonspor), et l'avant-centre Sébastien Haller (Borussia Dortmund).
Si ce dernier a été convoqué malgré une blessure à la cheville, les deux premiers nommés sont les autres recrues convaincantes de l'année 2023. On peut leur ajouter Seko Fofana. Des doutes étaient possibles, quant à l'accueil par le groupe de ce joueur à éclipses. Ils ont été rapidement balayés, grâce à des contenus probants. Parti cet été monnayer ses talents en Arabie Saoudite, l'ancien Lensois paraît donner son meilleur aux côtés de Franck Kessié et d'Ibrahim Sangaré, lui qui va jouer sa première CAN dans le pays de ses ancêtres...
On le voit, la Côte d'Ivoire de ce début d'année 2024 présente un effectif complet et talentueux dans toutes les lignes. Alors, qu'es-ce qui pourrait la faire dérailler lors de cette CAN disputée devant son public ?
Le premier motif d'inquiétude pourrait paradoxalement venir des joueurs eux-mêmes. Les places seront chères, et certains pourraient prendre ombrage de ne pas faire partie des titulaires. C'est sans doute pour prévenir un tel danger que le talentueux ailier de Galatasaray, Wilfried Zaha, a été mis de côté. « Cela a été le cas le plus épineux. Déjà, dans l'équilibre de l'effectif, nous avions beaucoup de droitiers. C’est un choix de sélectionneur, a expliqué Jean-Louis Gasset au moment de la présentation de sa liste des 27. J’ai essayé de privilégier le sportif et la vie de groupe... J’ai eu des discussions avec des illustres personnages comme Aimé Jacquet, Didier Deschamps et Hervé Renard, qui ont fait des choix forts à des moments et seul le résultat entre en ligne de compte. Au final, c’est après la compétition qu’on sait si c’était une bonne ou une mauvaise décision. »
Autre inconnue, le mental d'une équipe habituée depuis quelques éditions à caler dès que la route s'élève. En 2019, le quart de finale contre l'Algérie fut fatal. Deux ans et demi plus tard, ce fut l'Égypte qui mit fin au parcours ivoirien dès les huitièmes de finale. Jamais aussi brillants que dans les matchs de gala, les Éléphants devront cette fois donner le meilleur d'eux-mêmes à l'occasion des matchs couperets. Un troisième sacre continental est (notamment) à ce prix.