Fil d'Ariane
A 30 ans, le navigateur français va concourir à la 37e édition de la Coupe de l'America à la barre du défi français Orient Express le 12 octobre 2024 à Barcelone. Une consécration pour celui qui fait figure d'étoile montante de la régate mondiale.
Les deux navigateurs Franck Cammas (à gauche) et Quentin Delapierre (à droite) font partie de l'équipe du Défi français Orient Express pour la Coupe de l'America 2024, Paris, 2 février 2023.
"Toutes les conditions sont réunies pour accomplir quelque chose d'incroyable". Quentin Delapierre, jeune navigateur français, s'est imposé en quelques années seulement comme l'étoile montante de la régate mondiale, jusqu'à être nommé barreur du défi français pour la prochaine Coupe de l'America.
A 30 ans, dont huit passés en tant que navigateur professionnel, c'est sa première participation à une campagne pour l'aiguière d'argent, plus vieux trophée sportif du monde, qui débutera officiellement le 12 octobre 2024 à Barcelone.
Originaire de Vannes (Morbihan), ce marin au regard perçant et à la voix posée succède à des grands noms de la voile française à la barre d'un défi tricolore comme le médaillé d'or olympique Marc Pajot ou, plus récemment, Franck Cammas.
"C'est quelque chose d'incroyable. Il s'agit d'une compétition qui m'a toujours fait rêver. Les bateaux utilisés sont d'immenses engins volants, qui restent systématiquement au contact", a expliqué Delapierre lors d'un entretien avec l'AFP en mai.
"C'est comme ça que je m'amuse. Ce qui me passionne, ce n'est pas juste le fait de naviguer. Oui, ça me procure des sensations, mais c'est de me battre pour chaque mètre sur l'eau. J'ai cette volonté permanente de mieux jouer avec le vent, de mieux régler mon bateau", a-t-il ajouté.
A Barcelone, où le défi français Orient Express se délocalisera cet été après des mois de préparation en Bretagne, Delapierre s'entrainera aux côtés d'un équipage jeune qui a fait ses armes sur le circuit SailGP.
Avec le régleur d'aile Kévin Peponnet, 32 ans, ils ont terminé 4e de la dernière saison de ce prestigieux championnat regroupant l'élite mondiale en régate. Appliqués et talentueux, les deux hommes ont amorcé leur rêve de gloire ensemble, dans une chambre d'hôtel pendant des Jeux Olympiques de Tokyo.
"On regardait une étape de SailGP ensemble et on s'est dit: ce serait dingue d'y être un jour ! Quentin a cette capacité à fédérer autour d'un projet, à rassembler. Être deux ans plus tard sur une Coupe de l'America avec lui, c'est dingue", a confié Peponnet à l'AFP.
Pour Delapierre (8e en mixte sur un Nacra17), comme pour Peponnet (11e en 470), il a d'abord fallu digérer la déception japonaise. "Je me suis dit : +est-ce que je suis techniquement au niveau d'un champion olympique ? Physiquement, oui probablement. Mentalement, non. Il y avait encore du travail à faire", se souvient Delapierre.
Le Vannetais fait appel aux services du préparateur mental Thomas Sammut, qui a notamment accompagné Florent Manaudou. Quelques mois après Tokyo, le téléphone sonne. Bruno Dubois, l'entraîneur de l'équipe de France de SailGP, souhaite lui confier la barre de son F50, catamaran capable de frôler les 100 km/h sur l'eau.
"C'était simplement l'un des plus gros défis de ma carrière. L'équipe était dernière du championnat, il fallait le relever sans compromis. Mais je me sentais prêt à être l'homme de devant", dit-il avec le recul.
Après un début de saison difficile, Delapierre insiste pour intégrer Peponnet à l'équipe, qui signe ensuite ses premières victoires d'étape et rate finalement de peu le podium à la fin de l'année.
"Le lien qui existe entre eux est l'une des clefs de notre réussite. Quentin sait faire confiance à Kévin et inversement. Garder cette colonne vertébrale était évident au lancement de la campagne pour la Coupe de l'America", relève Dubois, qui fera également office d'entraîneur à Barcelone.
Sur les pontons, le sens marin de Quentin, fils du régatier Jean-Philippe Delapierre, en a conquis plus. "C'est le navigateur le plus excitant à regarder sur l'eau en ce moment ", a estimé en avril le Britannique Ben Ainslie, marin le plus titré de l'histoire (4 médailles d'or olympique, une Coupe de l'America) et concurrent en SailGP.
Même le hauturier Thomas Coville (Sodebo), chez qui Delapierre a signé son premier contrat en 2015 en tant qu'analyste de la performance, ne tarit pas d'éloge à son égard. "Je n'ai pas souvenir chez les régatiers français d’un profil aussi complet", a-t-il récemment dit au média spécialisé Tip And Shaft.
Tombé amoureux de la voile ado, lors d'une navigation dans le Golfe du Morbihan, Delapierre a désormais l'occasion d'écrire l'une des plus belles pages de la régate française. Il devra pour cela continuer son apprentissage éclair pour tutoyer les plus grands.