Football africain : les bons et mauvais souvenirs de Vahid Halilhodzic sur le continent

De la folie du Raja Casablanca champion d'Afrique 1997 à ses larmes du 8e de finale du Mondial-2014 avec l'Algérie, Vahid Halilhodzic, sélectionneur du Maroc, qui va débuter la CAN-2022 contre le Ghana lundi (17h00) à Yaoundé, raconte ses bons et mauvais souvenirs africains.
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Halilhodzic souvenirs
Vahid Halilhodzic lors d'un entraînement de son équipe le FC Nantes, 24 janvier 2019, Nantes France.
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De la folie du Raja Casablanca champion d'Afrique 1997 à ses larmes du 8e de finale du Mondial-2014 avec l'Algérie, Vahid Halilhodzic, sélectionneur du Maroc, qui va débuter la CAN-2022 contre le Ghana lundi (17h00) à Yaoundé, raconte ses bons et mauvais souvenirs africains à l'AFP.

1997 : "La chaleur du Raja" Casablanca

"Il y avait la guerre chez moi (en Bosnie, NDLR), je suis venu de là-bas pour entraîner une équipe de 2e division (Beauvais), malheureusement l'Unecatef (syndicat des entraîneurs) et Guy Roux (son président) ont suspendu mon poste (en 1994), j'étais très fâché après lui, ils n'ont pas accepté mon diplôme de Sarajevo.

Je n'avais plus de boulot, j'avais tout perdu pendant la guerre (en Yougoslavie), il fallait que je travaille ! Henri Michel et Michel Hidalgo m'ont appelé (en 1997): +Un grand club au Maroc veut que tu vienne+.

On était presque éliminés de la Ligue des champions d'Afrique, puis on a presque tout gagné et quatre mois après on était champions d'Afrique

Vahid Halilhodzic

Je ne connaissais pas grand chose là-bas, mais j'ai découvert un club extraordinaire, je ne savais pas que le Raja était aussi populaire. Quand je suis arrivé, j'ai trouvé plusieurs milliers de supporters au stade à l'entraînement, qui demandaient des explications. J'ai discuté, j'ai dit: +Merci, mais maintenant partez, je dois travailler+.

On était presque éliminés de la Ligue des champions d'Afrique, puis on a presque tout gagné et quatre mois après on était champions d'Afrique (en 1997, contre Obuasi Goldfields, 0-1/1-0, 5-4 t.a.b.). Sur la corniche à Casa, il y avait des millions de personnes, un évènement gravé dans ma mémoire. Et j'habitais le quartier du Wydad, l'autre grand club de la ville (rires)!"

2010 : "Manque de respect" en Côte d'Ivoire

"C'était une situation très compliquée à la CAN-2010, car le Togo, dans notre groupe, s'est fait attaquer par des rebelles (deux morts dans la délégation). Mes joueurs faisaient tout pour quitter cette compétition, Didier Drogba, Yaya Touré me disaient: +Vahid, on ne peut pas, on est menacés+.

Je pense qu'ils étaient presque soulagés d'être éliminés (en quarts de finale par l'Algérie, 3-2 a.p., avec une égalisation à 2-2 de l'Algérie à la 90e+2). Ils ont eu un petit peu raison, je les comprends, mais ça m'a coûté ma place pour la Coupe du monde (remplacé par Sven-Goran Eriksson), alors qu'on avait fait un parcours d'exception.

Les joueurs m'ont appelé pendant la Coupe du monde et me regrettaient

Vahid Halilhodzic

L'Algérie, c'était notre première défaite. C'était plus que du manque de respect, c'était vraiment dégoûtant, je l'ai très mal vécu, j'ai reçu un fax, je n'ai même pas été reçu par le président, même pas par le secrétaire pour m'expliquer. +Tu n'as pas gagné la CAN, c'est fini+: on me l'a dit avec des mots cruels, sans aucune classe. Les joueurs m'ont appelé pendant la Coupe du monde et me regrettaient. C'est lui (Eriksson) qui a récupéré l'argent pour son énorme staff et profité de mon travail."

2014 : avec Algérie, "il nous a manqué très peu"

"La Coupe du monde 2014, c'est un de mes meilleurs souvenirs. A mon arrivée (en 2011), j'ai rebâti complètement l'équipe, et ce n'était pas facile. Je me souviens des critiques quand j'ai fait jouer des gars comme (Islam) Slimani, Ryad Mahrez... Aujourd'hui ils ont compris que j'avais raison. Cette Coupe du Monde (8e de finale perdu contre l'Allemagne 2-1 a.p.), c'est une récompense pour tout notre travail.

Les Allemands ont dit que leur match le plus difficile avait été contre l'Algérie.

Vahid Halilhodzic

Au retour, l'accueil était phénoménal, je ne sais pas combien de monde il y avait dans les rues, de l'aéroport jusqu'au palais présidentiel. On a mis 5 à 6 heures au lieu de 20 minutes! On a failli faire un des plus grands exploits, ce match contre l'Allemagne, il nous a manqué très peu. Je n'ai jamais revu ce match, c'est un grand souvenir mais c'est un de mes plus grands regrets comme entraîneur. A la mi-temps, j'ai dit: +C'est maintenant les gars, il ne faut pas avoir peur, il faut avoir confiance, on peut gagner ce match!+

En prolongations, je savais que ça devenait presque impossible, l'Allemagne était la meilleure équipe du monde. Mais nous avons tous été les protagonistes de ce match. Les Allemands ont dit que leur match le plus difficile avait été contre l'Algérie. (Ses larmes) Je restais sur le terrain, je savais qu'on avait raté un exploit."