Fil d'Ariane
Entretien. Mission accomplie pour Hugues Fabrice Zango. Champion du monde de triple saut en extérieur à Budapest en août dernier, le Burkinabè a remporté la médaille d'or aux Mondiaux d’athlétisme indoor, samedi 2 mars à Glasgow, avec un saut de 17,53 mètres au 5e essai. Chaque occasion de battre ses concurrents fait grandir sa confiance en cette année olympique, son objectif majeur, confiait l'athlète burkinabè à Simon Rodier et Camille Balland avant la compétition.
Le champion burkinabé de triple saut Hugues Fabrice Zango lors des qualifications aux championnats du monde d'athlétisme à Eugene aux Etats-Unis, 21 juillet 2022.
TV5MONDE : L’objectif lors de ces Championnats du Monde Indoor de Glasgow parait clair : seule la victoire vous intéresse ?
Hugues Fabrice ZANGO, champion burkinabè de triple saut : L’objectif c’est clairement de gagner ce samedi, avec la manière. Gagner avec la manière car il y a les adversaires qui sont montés sur le podium de Budapest lors des championnats du monde l’été dernier. Gagner, c’est aussi mettre un coup au moral des adversaires pour cet été
TV5MONDE : On se dit parfois que les championnats du monde indoor lors d’une année olympique, c’est moins important… Vous, vous préférez appuyer sur l’aspect mental de ce type de concours ?
Hugues Fabrice ZANGO : Il y a pas mal de choses que l’on prend en compte… D’abord, je ne choisis pas mes compétitions par hasard, je calcule en fonction des athlètes qui sont là, j’invite même certains adversaires à venir concourir sur certains concours juste pour le fun ! Mais oui il y a toute une stratégie derrière à mettre en place pour les Jeux Olympiques, et en l’occurrence sur des championnats comme ceux-là, c’est toujours bien de prendre le dessus. D’une certaine manière, cela conforte les autres dans leur position de deuxième et c’est bien (sourire)
TV5MONDE : Il y a donc un aspect mental très important dans votre sport ?
Hugues Fabrice ZANGO : Absolument ! À moins que l’on soit Mondo Duplantis (Le perchiste suédois, champion olympique et double champion du monde -NDLR) qui vole complètement au-dessus des autres, lorsque l’on a des performances très similaires, très condensées entre les concurrents, alors le moindre centimètre, le moindre doute que l’on pourrait insuffler à l’adversaire, c’est bon à prendre. Samedi, l’idée c’est donc de gagner une fois de plus contre ces mêmes adversaires là, et du coup les conforter au deuxième rang.
TV5MONDE : Votre rentrée cet hiver a été bonne, notamment avec une victoire à Liévin avec 17m21. Est-ce qu’il y a des objectifs de distance par rapport à votre état de forme actuel ?
Hugues Fabrice ZANGO : D’abord, notre plan c’est bien sûr l’été. Cet hiver on a travaillé un paramètre que je n’avais pas travaillé depuis un bon moment… je suis dans une phase de transition, une phase assez trouble, qui demande beaucoup d’énergie nerveuse pour pouvoir respecter toutes les consignes. L’objectif n’était vraiment pas de sauter loin, et d’ailleurs à chaque fois que j’ai sauté c’était entre guillemets un peu la merde… Et à chaque fois, Teddy (son coach Teddy Tamgho – NDLR) me disait « Reste dedans, reste concentré ». Parce qu’il sait qu’avec l’état de forme dans lequel je suis, si je veux sauter à 17m60, vraiment je peux le claquer les doigts dans le nez, ce n’est pas un souci. Mais lorsque l’on veut passer un cap au niveau des intentions de saut, qu’on a beaucoup de temps -et comme je suis champion du monde, j’ai du temps-, je peux vraiment me focaliser sur une grosse stratégie et des changements profonds au niveau physique, technique et aussi mental pour pouvoir arriver à point aux Jeux Olympiques.
Donc cet hiver c’est vraiment un gros passage, je n’ai pas d’objectif de performances là comme ça, mais je sais que je sauterai vraiment plus loin que ce que j’ai pu faire cet hiver
TV5MONDE : Vous avez un objectif et vous le portez sur vous, c’est de représenter votre drapeau. Cela ajoute un plus à des championnats ?
Hugues Fabrice ZANGO : Oui absolument ! Cela ajoute de l’adrénaline et moi j’aime sauter sous pression, j’aime quand c’est vraiment chaud, quand je n’ai pas beaucoup de solutions et que je n’ai qu’à foncer ! C’est vraiment là que je fais mes meilleurs résultats. C’est pour cela que la plupart du temps je peux traîner 5 essais dans un concours et que finalement c’est au 6ème que je me réveille. C’est vraiment dos au mur que je révèle mes vraies capacités. Je n’ai droit qu’à l’action à ce moment-là. Et là vraiment il y a tout le pays qui me soutient. J’ai juste annoncé Glasgow sur les réseaux sociaux, et cela a déjà pris de grandes proportions… Tout le monde attend naturellement une médaille d’or parce que les gens se disent qu’avec toutes les médailles que j’ai déjà, il n’y a que l’or qui est logique désormais pour moi et pour le Burkina Faso ! Moi cela me fait un peu rire, mais c’est exactement ce que je vais leur apporter du coup (rires)
TV5MONDE : Vous n’avez pas de pression ? Vous prenez ces attentes de façon très positive ?
Hugues Fabrice ZANGO : Tout à fait ! Pour moi c’est normal, j’ai voulu tout cela. C’est une responsabilité que j’ai créée et que j’accepte. J’accepte mon statut. Il n’y a plus qu’à produire !