JO Pékin 2022 : Marco Odermatt l'avènement d'un skieur funambule

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MARCO ODERMATT
Marco Odermatt lors du slalom géant de ce 13 février au JO de Pékin. Il remporte l'épreuve.
 
AP/Alessandro Trovati
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Médaillé d'or du géant des JO de Pékin dimanche, le Suisse Marco Odermatt éclabousse le ski mondial de sa classe d'acrobate, faite d'audace et d'agilité, Le skieur de 24 ans avoir surmonté ses premières désillusions domine son sport avec une facilité étonnante. Retour sur son parcours.
Il n'était qu'un espoir parmi d'autres du fertile ski suisse. "Odi" s'est révélé aux Championnats du monde junior 2018 de Davos, en remportant cinq titres sur six possibles (descente, super-G, team event, combiné et géant), mieux que son compatriote Beat Feuz en 2007 (descente, super-G et combiné).

Son passage sur le circuit senior, réputé délicat dans toute carrière sportive, n'a été qu'une progression constante: encore 24e au général en 2018-2019 avec ses deux premiers podiums en géant. Il finit 17e en 2019-2020 avec une première victoire au super-G de Beaver Creek.

Et le grand blond aux airs d'ado explose dès la saison suivante, avec une fin d'hiver si étourdissante qu'il revient sur les talons d'Alexis Pinturault dans la course au gros globe. Il échoue d'un souffle lors des finales de Lenzerheide.

Une progression fulgurante en 2020-2021


Avec les attentes viennent les premières déceptions. À commencer par les Championnats du monde de Cortina d'Ampezzo début 2021, où le prodige signe une encourageante quatrième place en descente mais repart sans médaille et sort dès la première manche du géant.

L'épilogue de la Coupe du monde l'a aussi confronté à la cruauté de ce sport d'extérieur, avec l'annulation pour cause de météo défavorable de la descente puis du super-G de Lenzerheide - deux chances majeures de détrôner Pinturault.
 
PODIUM OVERMATT
Marco Odermatt brandit sa médaille d'or du slalom géant ce 12 février. Le Slovène Zan Kranjec et le Français Mathieu Faivre complètent le podium.
AP /Luca Bruno


"La première étape, c'était simplement de savoir que je pouvais rivaliser avec les meilleurs dans mes trois disciplines" pour en tirer "de la confiance", relativisait-il auprès de l'AFP en octobre, assurant avoir vite surmonté l'épreuve.

Il y a eu aussi ses débuts olympiques manqués à Pékin, avec une septième place en descente puis une sortie de piste en super-G. Trop de pression ? "Non, je suis assez relax", assurait-il samedi en visioconférence, casquette en arrière et mine espiègle.

"Lara (Gut-Behrami, championne olympique du super-G, ndlr) et Beat (Feuz, médaillé d'or en descente, ndlr) ont dû patientier 3-4 JO pour mettre la dernière pièce du puzzle", soulignait-il.

Si le leader de la course au gros globe écrase cette année le circuit de géant (avec quatre victoires en cinq courses) et a déjà remporté deux super-G, c'est en descente que sa progression sidère le plus.

Un gabarit plus fluet que les as de la vitesse


Odermatt ne s'y est, certes, pas encore imposé mais peu le voyaient jouer les premiers rôles dès cette saison, avec son gabarit plus fluet que les as de la vitesse et une connaissance limitée des pistes.

Mais en enchaînant deuxième place à Bormio, deuxième puis quatrième sur le mythique Lauberhorn de Wengen - qu'il découvrait -, puis cinquième et deuxième à Kitzbühel, le surdoué n'a fait que renforcer une question: où sont donc ses limites ?

À écouter rivaux et entraîneurs décrire le meilleur skieur du moment, un terme frappe par son absence: celui de puissance. Bien que solide physiquement, "Odi" n'est pas un colosse du calibre du Norvégien Aleksander Aamodt Kilde, son rival en vitesse et principal poursuivant au général.
 

Un toucher de neige extraordinaire. Il carresse la neige, a une super glisse et ne force jamais son ski.

Fred Perrin, responsable technique de l'équipe de France.

Là où le jeune champion éblouit, c'est par son "toucher de neige extraordinaire et une science de la course déjà très grande (...) Il caresse la neige, a une super glisse et ne force jamais son ski", salue Fred Perrin, responsable du groupe technique français.

D'où l'audace de ses trajectoires directes, puisqu'on l'a vu rectifier le cap en plein vol sur le super-G de Beaver Creek (vainqueur), rattraper une erreur sur une jambe dans celui de Bormio (8e), se rétablir malgré une grosse faute en bas de la Streif à Kitzbühel (2e) et manquer de glisser puis frôler une porte lors du géant dimanche.

"Ce qu'il fait magnifiquement bien maintenant, c'est qu'il a son équilibre complètement sous contrôle. Que ce soit la balance avant-arrière ou latérale, on a l'impression qu'il ne peut jamais rien lui arriver", résumait l'an dernier la légende suisse de la descente Didier Cuche.