Un pas de plus a été franchi par le Real Madrid qui s'est qualifié pour la finale de la Ligue des champions en battant Manchester City mercredi 4 mai par le score de 3-1 au match retour à domicile à Santiago Bernabeu (4-3 pour Manchester City au match aller). Il tentera de remporter un 14e titre face à Liverpool qu'il va rencontrer pour la troisième fois à ce stade de la compétition. "Irréel", "irréaliste", "d'un autre monde", les commentaires de la presse spécialisée sont dithyrambiques.
Une qualification acquise avec la manière, celle d'une équipe qui ne renonce jamais, même après avoir été menée par deux buts d'avance sur l'ensemble des deux matchs à la 89e minute. Le Real marque deux fois coup sur coup à la 90e et 92e minute de jeu grâce à Rodrygo et l'emporte en prolongations avec un but sur penalty de Benzema.
Que s'est-il passé ? "Hier, c'est vrai qu'il y a eu ce moment d'hésitation de Manchester City qui avait parfaitement joué pendant 89 minutes, résume Xavier Barret, journaliste sportif spécialiste du football, comme pour le Paris Saint-Germain à la dernière demi-heure en huitièmes de finale et Chelsea en prolongation en quarts qui n'a pas réussi à tenir le choc, le Real Madrid lui a une capacité à se surpasser qui est assez étonnante".
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Cette remontada du Real est à l'image de sa campagne dans cette Ligue des Champions. "Tout le parcours du Real cette saison est basée sur des retournements de situation, des qualifications obtenues alors que tout le monde le donnait éliminé, confirme Patrick Julliard, journaliste spécialiste du football, avec Benzema à l'origine de ces retournements qui incarne cette combattivité, cette croyance dans la victoire toujours possible. D'autres équipes se laisseraient abattre par le destin, le Real ne l'accepte jamais et cherche toujours à s'imposer."
Une telle "remontada" relève de l'exploit, dont le Real Madrid est la meilleure incarnation. "Ce ne sont pas les seuls, mais c'est quelque chose de très ancré dans leur histoire", souligne Xavier Barret. "Ce n'est pas nouveau, cela existe depuis longtemps dans l'histoire du Real Madrid, souvent on souligne ce stade où il évolue depuis toujours, ce public extrêmement exigeant qui ne supporte pas la médiocrité, et cette capacité à renverser les situations les plus compromises".
"C'est très rare. Il y a beaucoup d'irrationnel par rapport au standart habituel, commente Patrick Julliard. On a un football fait avec tellement d'intensité, avec en plus la règle des 5 changements, on peut davantage bouleverser son équipe et faire rentrer des hommes frais en fin de match. Toutes ces raisons font qu'il y a un peu plus de retournements de ce genre mais le Real a quelque chose de particulier, un ADN de vainqueur de Ligue des champions."
La recette du Real Madrid, elle est culturelle. "Sa magie c'est son histoire qui fait que quand on est le Real Madrid, on doit toujours gagner, être toujours à la hauteur de réputation du club. Il y a un niveau d'exigence qui existe depuis les années 50 quand ils ont commencé à gagner les premières coupes d'Europe et qui s'est perpétué à travers les générations", rappelle Xavier Barret.
C'est aussi un club formateur, ce que l'on oublie trop souvent, insiste cet expert qui souligne que l'équipe des jeunes du Real a pour la première fois remporté l'avant-dernière Youth League, la Ligue des Champions des jeunes. En résumé, "ils sont performants à tous les niveaux, au niveau état d'esprit avec cette histoire, au niveau formation, et puis au niveau infrastructures et business."
Sur ce dernier point, Xavier Barret reconnait le mérite d'un dirigeant comme Fiorentino Perez qui a fait franchir un cap au club. "C'est le seul club hors Angleterre, Bayern de Munich et PSG à pouvoir rivaliser. Ils ont des gros moyens financiers, plutôt bien gérés malgré des passe-droits par le passsé, tout cet ensemble en fait un club extrêmement compétitif".
Le Real Madrid est déjà champion de la Liga, le championnat espagnol. "Il ne faut pas minimiser la performance, au sein d'une Liga qui a perdu ses grandes stars Ronaldo et Messi. Malgré tout, le Real a un savoir-faire en championnat, mais les supporters restent un peu sur leur faim car l'équipe est souvent dans la gestion, un petit peu gagne-petit, commente Patrick Julliard.
Mais quand il s'agit de la Ligue des Champions, le Real Madrid se surpasse, et c'est d'autant plus vrai avec leur entraîneur Carlo Ancelotti. "Sur le plan de la combattivité, des ressources morales, il n'y a pas grand monde qui peut rivaliser avec le Real, ce sont des vertus mentales. Cela n'est pas étonnant car Ancelotti est un coach qui réussit à mettre les joueurs dans les meilleures conditions mentales, humaines au sens large : c'est ce qu'incarne son Real, des joueurs qui donnent tout."
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Sur le plan individuel, il faut souligner l'extraordinaire saison de l'attaquant madrilène Karim Benzema, le joueur le plus décisif des 5 grands championnats, si on fait la somme du nombre de buts et de passes décisives. Ce que l'on retiendra à coup sûr selon Patrick Julliard de cette saison du Real Madrid, "c'est la rencontre d'une force mentale collective et d'un joueur en état de grâce".
La dernière marche, c'est pour la troisième fois Liverpool, à Paris au Stade de France. Les Reds ont remporté leurs deux coupes nationales, et sont encore en lice pour le titre en Premier League anglaise et pourraient réaliser un quadruplé historique avec la Ligue des Champions. Cette finale Liverpool-Real Madrid est la plus disputée dans cette compétition, avec un parfum de revanche après la défaite du Real Madrid en 2018 à Kiev.
En filigrane de cette rencontre, il y a aussi la lutte pour le Ballon d'or, auquel pourraient prétendre les deux joueurs de Liverpool l'Egyptien Mohamed Salah et le Sénégalais Sadio Mané, face à l'ogre français Karim Benzema. Pour Patrick Julliard, "tout cela est dans la tête des joueurs et cela donne du piment supplémentaire". Tous les ingrédients sont réunis pour un final en apothéose.
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